Les protestants de France dénoncent «l’accueil trop parcimonieux des réfugiés»

Les protestants de France dénoncent le manque de générosité de la France dans l’accueil des réfugiés. Réunis en Synode national à Nancy la semaine de l’Ascension 2016, les 200 délégués de l’Eglise protestante unie de France (EPUDF), qui regroupe depuis 2013 l’Eglise réformée et l’Eglise évangélique luthérienne, ont notamment réclamé une politique de solidarité envers les exilés arrivant de Syrie et d’Irak.

Dans son message d’ouverture intitulé «De la peur à l’encouragement», le pasteur Laurent Schlumberger, président du Conseil national de l’EPUDF, a appelé l’assemblée à choisir la confiance comme antidote à la peur qui ronge les rapports sociaux. Il a exhorté les membres de son Eglise à vivre cette confiance comme un puissant levier pour mieux assumer leur responsabilité sociale. Cet appel a été particulièrement entendu.

Pour une politique à la fois généreuse et réaliste des exilés

Les délégués protestants ont ainsi voté «à la quasi-unanimité deux résolutions demandant, d’une part, l’organisation d’une protestation publique contre l’accueil trop parcimonieux des réfugiés en France et, d’autre part, l’interpellation du gouvernement français afin qu’il propose une politique à la fois généreuse et réaliste des exilés syro-irakiens». Le Synode a transmis des recommandations pour la vie de l’Eglise, en vue de développer son engagement pour être «une Eglise de témoins».

Dans son message au Synode, le pasteur Schlumberger a souligné que «la peur est une ressource précieuse pour tout gouvernement, qui dispose ainsi d’un dérivatif par rapport à son impuissance dans d’autres domaines». Et de déplorer que depuis un an, «nous avons assisté à l’irruption de peurs sociales violentes et porteuses d’effets potentiellement ravageurs. La peur issue des attentats, jointe à la désignation de l’étranger ‘du Sud’ comme étant une menace, et à une frilosité politique pas très éloignée de la paralysie, prépare des lendemains qui pourraient être très périlleux».

«C’est pourquoi, a-t-il poursuivi, brandir la peur, l’entretenir, fait courir un grand péril à notre vie démocratique et même aux ressorts profonds de notre culture».

Injonction populiste

Le président du Conseil national de l’EPUDF relève la tentation – «explicitement chez quelques-uns, insidieusement chez beaucoup» – de faire un amalgame dramatique avec la question des réfugiés du Proche et du Moyen-Orient et d’une partie de l’Afrique. «Sous les doubles effets de la peur et de l’injonction populiste, bien des gouvernements européens mettent des restrictions radicales à l’accueil non pas seulement de migrants mais aussi de réfugiés».

Le pasteur Schlumberger regrette ainsi que le gouvernement français soit l’un des plus limitatifs «au regard des valeurs et des capacités de notre pays». Il s’est engagé, en septembre dernier, à accueillir 30’000 réfugiés du Proche-Orient sur deux ans, à comparer par exemple aux 25’000 réfugiés accueillis ces trois derniers mois dans un Canada presque deux fois moins peuplé que la France et qui vient de s’engager à en accueillir 10’000 de plus. «Et encore l’engagement français n’est-il à ce jour réalisé qu’à hauteur de quelques centaines de familles. La moitié des quelques 500 places d’accueil rendues disponibles sous la houlette de la Fédération de l’entraide protestante restent vides!»

Gratitude envers les épiscopats francophones

En outre, le Synode national a pris acte «avec reconnaissance du fait que les épiscopats francophones ont dûment interrogé le protestantisme français sur une modification dans la forme liturgique de la prière du Notre-Père».

Il a donc recommandé à l’ensemble des paroisses de l’EPUDF d’adopter la nouvelle traduction, proposée par l’Eglise catholique, d’une des phrases du Notre-Père, prière fondamentale pour tous les chrétiens. Les arguments exégétiques peuvent justifier plusieurs traductions, sur cette phrase comme sur d’autres demandes du Notre-Père. Le Synode national recommande par conséquent aux paroisses et Eglises locales d’utiliser pour la 6e demande, la version «ne nous laisse pas entrer en tentation» retenue pour les Eglises catholiques francophones

«Le Synode, sensible à la démarche de concertation catholique, a ainsi choisi de donner la priorité à l’argument œcuménique, veillant à ce que les chrétiens francophones puissent continuer à dire ensemble le Notre-Père, comme ils le font déjà depuis 50 ans».

A la veille de l’année 2017, qui verra la commémoration des 500 ans de la Réforme, le Synode de l’EPUDF dit sa «volonté renouvelée de témoigner de sa foi et de son engagement dans la société pour partager la confiance que Dieu offre à chacun».  (cath.ch-apic/com/epudf/be)

Jacques Berset

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