Calme relatif dans Alep en ruines

«A Alep, ça n’a jamais été aussi grave que maintenant», a déclaré le Père Ibrahim Alsabagh, prêtre franciscain, le 3 mai 2016 à l’Aide à l’Eglise en Détresse (AED). Il a appelé les chrétiens du monde entier à prier, spécialement ce vendredi, pour la ville syrienne qui connaît un calme relatif depuis l’entrée en vigueur, jeudi, d’un cessez-le-feu de 48 heures.

«Je n’ai pas de mots pour décrire toute la souffrance que je vois tous les jours», a déclaré ce religieux, d’Alep, à l’AED. «Des missiles et des bombes tombent sur les églises, les mosquées, les écoles et les hôpitaux. Dix-sept personnes ont été tuées lors d’une attaque contre notre hôpital. Et ce nombre pourrait encore augmenter», prévient le père Ibrahim Alsabagh. Le secrétaire adjoint de l‘ONU, Stephan O’Brien a observé que les attaques prenant quotidiennement pour cible les établissements de santé de la ville, contribuent à rendre la situation plus difficile encore, entravant l’accès aux soins de milliers de civils.

«Davantage un vendredi saint qu’un dimanche de Pâques»

«Quand les bombes ne tombent pas, il règne un calme lugubre, comme dans un cimetière. Les rues sont quasiment désertes», poursuit le Père Alsabagh. La fête de la Pâque orthodoxe, dimanche dernier, a été très triste, ajoute le prêtre catholique. «C’était davantage un vendredi saint qu’un dimanche de Pâques. Les offices religieux ont été très peu fréquentés. Les gens ont enterré leurs morts, ou par peur, sont restés à la maison. C’est déprimant». Le prêtre se demande quand la communauté internationale se réveillera enfin «pour en finir avec ce nouveau Sarajevo».

 Manifester la tendresse de Dieu

Le Père Ibrahim observe de plus en plus de stress psychique chez les gens. Le nombre de dépressions nerveuses augmente ainsi que les maladies mentales. «C’est une telle misère!», lance le père Alsabagh qui garde toujours à l’esprit les paroles du pape François, qui incite à manifester aux gens la tendresse de Dieu. «Nous, les prêtres et religieux, sommes vraiment devenus des pères pour les gens, mais plus encore des mères qui cherchent à panser maternellement et avec tendresse leurs blessures».

«Quand les bombes ne tombent pas, il règne un calme lugubre»

L’exode se poursuit

Cela fait près de deux ans que le Père Ibrahim travaille dans cette ville du nord de la Syrie, partagée et férocement disputée entre le gouvernement syrien et les rebelles. «Ceux qui peuvent fuir s’enfuient. Dimanche dernier, les routes pour quitter la ville étaient pleines de réfugiés», constate le prêtre. Ceux qui sont restés sont les plus pauvres, une partie de la population vit dans des maisons à moitié détruites.

Une observation corroborée par  Stephan O’Brien: «Ceux qui restent dans l’est d’Alep, occupée par les rebelles, environ 300’000 personnes, vivent dans la peur constante de la prochaine attaque aérienne», a déploré le Secrétaire général adjoint. Il ajoute que les 1,3 million de personnes situées dans la partie ouest de la ville, tenue par les troupes gouvernementales, ont trouvé refuge dans des caves pour échapper aux «tirs de mortiers qui continuent de frapper ce qu’il reste de leur maison».

La ville connaît un calme relatif depuis jeudi 5 mai, minuit, au lendemain de l’accord d’arrêt momentané des hostilités, négocié entre les Etats-Unis et la Russie. Il suit deux semaines de violences meurtrières entre forces rebelles et gouvernementales.

Une ville morcelée

La ville d’Alep, enjeu stratégique dans la guerre syrienne, est âprement disputée. Les troupes gouvernementales de Bachar El Assad, renforcées par des mercenaires russes et des combattants du Hezbollah libanais et de l’Iran combattent durement les rebelles du front Al-Nosra, branche d’al-qaida en Syrie auxquelles s’ajoutent des groupes islamistes non-djihadistes et des brigades armées de l’opposition modérée au pouvoir. Les kurdes enfin, alliés avec les forces pro-régime, contribuent à encercler la partie nord d’Alep. (cath.ch-apic/aed/onu/com/bh)

Bernard Hallet

Portail catholique suisse

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