«C’est immoral de laisser aux générations futures un tel fardeau, celui de la pollution et du coût induit par des mauvais choix énergétiques», a dénoncé l’archevêque catholique de Lipa, Mgr Ramon Arguelles. En quelques semaines, il est devenu l’un des visages de »cette croisade anti charbon».
Le 12 avril dernier, plusieurs représentants de l’Eglise catholique philippine ont, une nouvelle fois, défilés dans la ville de Quezón City, surnommée localement " la capitale du charbon». Cette manifestation anti-charbon fait partie d’un appel international intitulé »libérons-nous des énergies fossiles».
La province de Quezón concentre en effet plusieurs centrales alimentées au charbon. D’une capacité de 735 mégawattts, la plus grosse usine se trouve à Pagbilao (735 MW). Deux autres à Mauban (1’500 MW et 420 MW respectivement). Un quatrième site de 1’200 MW est en construction à Atimonan.
A l’approche des élections présidentielles du 9 mai, Mgr Ramon Arguelles a notamment appelé les futurs élus à »tout faire pour protéger les familles des ravages causés par la pollution et le dérèglement climatique». Le prélat s’exprimait dans la ville de Lucena, devant diverses associations de la société civile, réunies à l’occasion du lancement du mouvement national «Piglas Pilipinas» (en tagalog «Libérez les Philippines»), dans le cadre de la campagne mondiale »Break Free from Fossils Fuels 2016».
Les Philippines se sont engagées à réduire de manière très ambitieuse 70% de ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030, tout en continuant pourtant à construire des centrales à charbon, afin de répondre aux besoins d’une économie en forte croissance.
Le pays se classe n°2 mondial pour sa production d’électricité géothermique et produit actuellement plus d’un tiers de sa production en énergies renouvelables. »Il y a déjà 17 usines à charbon en fonctionnement dans notre pays et 29 autres sont en projet, c’est aberrant», juge Ian Rivera, coordinateur national du Philippine Movement for Climate Justice (PMCJ). Avec d’autres, il avait marché jusqu’à Paris, lors de la dernière conférence des Nations Unies sur le climat, afin de sensibiliser l’opinion sur le sort de l’archipel, particulièrement exposé au dérèglement climatique avec une vingtaine de typhons qui vient frapper le pays chaque année.
«Nous ne changerons pas notre position: il faut se convertir aux énergies vertes, et c’est maintenant que nous devons agir. Notre soutien à cette campagne internationale de désobéissance civile est entier», assure Louise Alcade, militante au sein du groupe national Aksyon Klima («Action Climat»). Pour le P. Raul Enriquez de Pagbilao également interrogé par Ucanews, la promotion des énergies vertes et l’opposition du clergé au charbon »vont de pair avec la compassion donnée aux autres».
Signe de l’importance accordée aux questions environnementales, le cardinal archevêque de Manille, Mgr Luis Antonio Tagle, vient de créer au sein de l’archidiocèse de la capitale un nouveau ministère dédié à l’Environnement. Placée sous la houlette de Caritas Manille, cette nouvelle structure doit permettre à l’Eglise catholique philippine d’être «plus réactive» lors des catastrophes naturelles fréquentes dans l’archipel, et de pouvoir assurer «l’entretien et la protection de la Nature, une création divine «, indique le cardinal également président de Caritas internationalis.
Au moment de la publication de l’encyclique de Pape ‘Laudato si’ sur l’environnement, les évêques catholiques philippins avaient été parmi les premiers à saluer l’initiative dans une déclaration publique: »Pour les chrétiens, c’est une obligation de se préoccuper d’écologie et du changement climatique, c’est une conséquence directe de la notion morale de gérance, d’intendance et une des dimensions de la charité chrétienne. […] Laudato si’ nous enseigne que le fond du problème du changement climatique, c’est la justice». (cath.ch-apic/eda/bh)
Bernard Hallet
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