Cette ville qui comptait autrefois 30’000 habitants – et qui hébergeait l’an dernier tout autant de réfugiés des villages sunnites voisins détruits par les bombardements – était tombée aux mains des djihadistes dans la nuit du 5 au 6 août 2015. Les fondamentalistes islamiques ont alors vandalisé le cimetière chrétien et incendié les deux églises de la ville ainsi que le monastère de Mar Elian (Saint Julien), un édifice du Ve siècle, que le Père Jacques Mourad, prieur du couvent, avait restauré.
«Ils voulaient utiliser une église comme école pour enseigner la charia, la loi islamique, et ils ont brûlé tous les livres, les habits sacerdotaux, même les jeux des enfants!», avait confié récemment le religieux syriaque à cath.ch.
Le Père Mourad accueillait à Mar Elian jusqu’en mai dernier tant des chrétiens que des musulmans, dont de nombreux réfugiés sunnites des villages alentours, rasés lors des combats avec l’armée gouvernementale. Des djihadistes de Daech l’avaient capturé en compagnie du diacre Boutros, le 21 mai, dans sa chambre, au cœur du couvent de Mar Elian.
Le prêtre avait réussi à s’échapper des griffes des terroristes en octobre 2015, après être resté 84 jours aux mains de cette organisation qui lui promettait la mort s’il refusait de se convertir à l’islam.
«Pour eux, nous sommes presque des animaux, en tout cas des ›kouffars›, des mécréants. Ils étaient très agressifs, nous insultaient, nous traitaient mal, essayaient de nous faire peur. Ils en sont restés aux menaces verbales, mais j’ai senti le fil du couteau sur mon cou. Ce n’était qu’un simulacre d’exécution, mais c’était très éprouvant, une dure expérience de souffrance».
Sur les 900 chrétiens que comptait la ville, 277 étaient restés malgré l’arrivée de Daech. Certains ont été décapités, assassinés par balles ou tués dans des bombardements. Cinq sont toujours prisonniers. Le reste a réussi à s’échapper fin 2015, selon le Père Mourad.
Durant les huit mois d’occupation par les djihadistes de Daech, les chrétiens restés dans la ville avaient dû signer un contrat religieux collectif qui les mettait comme «dhimmis» sous la «protection» de Daech. Ils devaient payer la «jizzya», l’impôt de soumission dû par les non musulmans.
Selon les journalistes arrivés sur place lundi 4 avril sous escorte de l’armée gouvernementale, les djihadistes de Daech avaient écrit sur un mur encore debout du monastère de Mar Elian: «Les lions du califat sont venus vous dévorer». Une partie du monastère, qui était un important lieu de pèlerinage, a été détruite au bulldozer en août dernier et réduite à l’état de gravats. Dans ce qui était resté debout, les terroristes utilisaient les locaux comme atelier pour confectionner des bombes et des pièges à l’aide de bombonnes de gaz. (cath.ch-apic/com/olj/be)
Jacques Berset
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