Le responsable de cette œuvre d’Eglise basée à Paris, qui soutient depuis la moitié du XIXe siècle les communautés chrétiennes au Moyen-Orient, est très critique vis-à-vis du récent accord entre l’Union Européenne et la Turquie.
Dans une interview à Radio Vatican, Mgr Gollnisch fait part de son scepticisme suite aux contreparties de l’accord. En contrepartie d’une solution supposée de ces réfugiés, il a été envisagé de relancer les pourparlers pour l’entrée de la Turquie en Europe, de dispenser les ressortissants de la Turquie de l’obtention d’un visa, de donner 6 milliards d’euros à la Turquie et d’inscrire la Turquie sur la liste des pays sûrs. Ainsi l’asile politique ne sera plus donné à des ressortissants de la Turquie.
A ses yeux, ce point est assez problématique notamment par rapport à la situation de l’importante communauté kurde. «La question des réfugiés doit être traitée pour elle-même et ne pas être mise sur une sorte de traité quasiment commercial», estime Mgr Gollnisch.
«Or cet accord ne va pas être très efficace car les réfugiés ont montré leur détermination à venir vers l’Europe et vont trouver d’autres chemins. Le nombre de réfugiés qui se lanceront dans la folle aventure de la traversée de la Méditerranée va s’accentuer».
Il faut faire un discernement, poursuit-il: «Il y a parmi ces réfugiés des gens qui ont vraiment besoin d’un asile politique et nous craignons qu’ils soient considérés comme des réfugiés sans titre et soient, purement et simplement, renvoyés en Turquie. Et dans quelles conditions de camps, dans quelle situation juridique, chrétiens et yézidis, vont-ils être renvoyés en Turquie?»
Il estime qu’il aurait fallu traiter cette question davantage au niveau des Nations Unies, du Conseil de Sécurité et au niveau du Haut-Commissariat aux Réfugiés. Le Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR) vient d’ailleurs de décider de fermer certaines de ses activités, affirmant que les «hotspots» accueillant les migrants en Grèce sont devenus des centres de détention à la suite de l’accord entre l’UE et la Turquie. Le HCR avait jusqu’à présent soutenu les autorités dans les «hotspots» sur les îles grecques, où les réfugiés et les migrants sont reçus, assistés et enregistrés.
Le fait que l’Europe se sente seule responsable, déjà coupable, et doive supplier la Turquie de bloquer les réfugiés, est une approche extrêmement restrictive du problème, insiste Mgr Gollnisch. Qui demande la mise sur pied d’un vrai plan de secours, plus intense, pour l’Irak et la Syrie «pour que les gens n’aient pas à partir».
«La vraie question: que faisons-nous pour que ces gens aient d’autres ressources que de quitter leur pays. Cela suppose la paix en Syrie, la neutralisation de Daech et d’al-Qaïda. Si nous mettions les moyens voulus cela serait déjà fait depuis longtemps!»
Mgr Gollnisch n’est pas le seul à mettre en cause les appuis étrangers aux groupes terroristes qui ensanglantent l’Irak et la Syrie: Mgr Jacques Behnan Hindo, archevêque syro-catholique de Hassakè Nisibi, en Syrie, fustige la préférence des puissances occidentales pour «les contrats milliardaires avec les patrons du pétrole». Ils engendrent «des flux financiers et des ressources qui alimentent aussi les centrales de la terreur», dénonce-t-il.
Malheureusement, déclare-t-il dans une interview à l’agence missionnaire vaticane Fides, «la population innocente récolte aussi ce que les cercles et les pouvoirs européens ont semé en Syrie et en Irak ces dernières années». Le prélat d’origine turque fait à cette occasion une critique acerbe de l’incapacité des pouvoirs occidentaux à remettre en cause les relations privilégiées qu’ils entretiennent avec la Péninsule arabique, qui finance depuis des décennies un réseau de mosquées où l’on prêche le wahhabisme. C’est «une idéologie qui envenime l’islam et sert de base idéologique à tous les groupes djihadistes». (cath.ch-apic/radvat/fides/oeuvred’orient/be)
Jacques Berset
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