Augmentation du nombre de personnes en fin de droit: Caritas s'inquiète

Dans le rapport sur le développement économique et social qui vient de paraître dans l’almanach social 2016, Caritas Suisse constate que cela fait dix ans qu’il n’y avait plus eu autant de personnes ayant épuisé leurs indemnités de chômage. En même temps, le démantèlement des prestations liées aux besoins relègue les personnes en situation de pauvreté encore plus en marge de la société.

«Malgré un ralentissement de la croissance, l’économie suisse est toujours sur la bonne voie. Mais la situation s’aggrave pour les personnes en situation de pauvreté et celles disposant d’un faible revenu», écrit l’organisation caritative suisse dans un communiqué de presse diffusé le 21 décembre 2015.

Nombre croissants de personnes en fin de droit

L’inquiétude liée au développement économique a marqué l’année 2015, selon Caritas Suisse. «Après la réévaluation du franc suisse en début d’année, les experts ont rivalisé de pessimisme dans leurs pronostics relatifs au développement économique de la Suisse. Or, les derniers mois leur ont donné tort: l’économie suisse est pour l’instant plus résistante que ce qu’ils présumaient. Malgré les pertes subies par l’économie d’exportation et le ralentissement de la croissance, le Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO) table sur un renforcement de la conjoncture en 2016».

«Au vu de la bonne santé de l’économie, il y a lieu de s’inquiéter du nombre croissant de personnes en fin de droit», constate Caritas dans son rapport sur le développement économique et social. Pas moins de 36’500 hommes et femmes ont épuisé leur droit aux indemnités en 2014. «C’est le chiffre le plus haut depuis dix ans. Les personnes de plus de 45 ans, celles qui n’ont pas de formation scolaire post-obligatoire ou pas la nationalité suisse, les femmes, ainsi que les personnes vivant seules, sont plus touchées que la moyenne. Une fois qu’elles ont épuisé leurs droits aux indemnités de chômage, beaucoup ne retrouvent plus de travail et dépendent de l’aide sociale. Celles qui trouvent un emploi sont souvent employées dans des conditions précaires : elles travaillent sur appel ou de façon temporaire, se voient contraintes de conclure des contrats à durée limitée ou doivent se contenter d’un temps partiel. Trois quarts des personnes sous-occupées sont des femmes. Chez celles qui élèvent seules leurs enfants, le taux de sous-occupation (16 %) est supérieur à la moyenne, ce qui explique en partie que ce groupe compte quatre fois plus de ‘working poors’ que l’ensemble de la population».

Assurance-maladie

Caritas constate en outre que l’augmentation constante des primes d’assurance-maladie fragilise les personnes disposant d’un faible revenu. «Au cours des 20 dernières années, la prime standard est passée de 173 francs par mois en 1996 à 396 francs en 2014, soit une augmentation de 4,7 % en moyenne par année. Parallèlement, la réduction individuelle des primes a continuellement été revue à la baisse. Entre 2010 et 2013, les cantons ont réduit leurs contributions à la réduction de primes de 169 millions de francs. Les familles dont le revenu est légèrement supérieur au seuil de pauvreté sont les plus touchées. Les coûts fixes élevés auxquelles elles doivent faire face risquent de les entraîner dans la pauvreté».

Caritas observe aussi un constant démantèlement des prestations au niveau de l’aide sociale. «Les normes de la Conférence suisse des institutions d’action sociale (CSIAS) ont ainsi été durcies l’an dernier. Avec la révision décidée, le minimum vital social n’est plus garanti pour les familles nombreuses et pour les jeunes. Le supplément minimal d’intégration pour les gens qui, pour des raisons de santé ou des raisons familiales, ne peuvent pas chercher un emploi, a également été supprimé. Ces réductions touchent aussi les personnes élevant seules leurs enfants, puisque leurs obligations familiales les limitent dans leur activité lucrative ou dans leurs recherches d’emploi».

Le démantèlement de l’aide sociale et de la réduction individuelle des primes accule les personnes en situation de pauvreté encore plus en marge de la société et dégrade les conditions de vie des gens dont le revenu dépasse à peine le seuil de pauvreté, selon le rapport de Caritas. Bettina Fredrich, responsable du service de politique sociale de Caritas Suisse, demande de corriger cette tendance à la désolidarisation. «Les personnes à l’aide sociale ont besoin de perspectives. Cela passe notamment par des investissements dans la formation continue et les cours de rattrapage. Par des mesures de formation ciblées, on peut améliorer durablement la situation des personnes exposées à la pauvreté et prévenir la spirale de la pauvreté». (cath.ch-apic/com/pp)

Pierre Pistoletti

Portail catholique suisse

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