Le pape François, qui fête ses 79 ans ce 17 décembre 2015, semble toujours bénéficier d’une grande popularité chez les fidèles catholiques. Il suffit de constater l’enthousiasme des foules venues à sa rencontre au Vatican ou lors de ses récents voyages pour constater que cette popularité se confirme aux quatre coins de la planète. Pour autant, le pape ne fait pas l’unanimité chez les catholiques, certains reprochant au pape une forme de démagogie à l’origine de cette popularité.
Démagogue, le pape? Dans son essai Le pape François, un combat pour la joie (Le Passeur Editeur), le vaticaniste de l’Agence France Presse (AFP) Jean-Louis de la Vaissière, tente de dépasser ce préjugé. L’auteur reconnaît volontiers que certaines plaisanteries de ce pape qui parle de Don Camillo ou se présente comme un «curé de campagne», sont démagogues. Mais François, croit-il savoir, est «volontairement démagogue», dans le but de «montrer que l’Evangile n’est pas loin des gens». Mais pour les catholiques soucieux du respect de la doctrine et de la tradition, le pape va justement trop loin dans ce dialogue avec les non croyants ou avec les fidèles d’autres religions. Il suffit de voir ce mouvement lancé sur Twitter accompagné du hashtag #NotMyPope (Pas mon pape), publiant des photos du pape dans des situations jugées alarmantes: avec un moine bouddhiste, un rabbin, un imam, etc.
Mais les critiques vont au-delà de la forme, à savoir le comportement parfois peu protocolaire du pape François. D’autres fidèles, perturbés par ses discours ou décisions – la réforme des procès en nullité de mariage, par exemple -, «ont très peur de ce qu’ils voient comme une insécurité doctrinale», ou le fait de «privilégier la miséricorde sur la vérité», constate Jean-Louis de la Vaissière. Pourtant, estime le vaticaniste, «ces six derniers mois ont montré que l’Eglise ne renie rien de sa doctrine: elle ne juge pas, mais ne se renie pas». Pour lui, le pape «ne cède rien», il a seulement «l’esprit dialectique d’un jésuite, et respecte les non-croyants, les agnostiques, voire même les anticléricaux s’il estime que ce sont des hommes bons».
Au sein du clergé, les opinions sont aussi mitigées sur ce pape qui n’est pas toujours tendre avec les prêtres. Carriérisme, mondanités, corruption, bureaucratie, ou encore la rigidité des prélats qui «mordent», tout y passe. «Ceux qui sont honnêtes le prennent mal, et cela crée un vrai malaise», reconnaît Jean-Louis de la Vaissière. Mais c’est surtout au sein de son propre gouvernement que François semble rencontrer les plus grandes difficultés. Si sa diatribe contre les «15 maladies» de la curie, lors de ses vœux de Noël de 2014, est encore dans les esprits, c’est aussi la réforme de la curie qui suscite «des inquiétudes sur les postes qui seront supprimés», relève le spécialiste de l’AFP. «Ces derniers mois ont laissé la place à des séries d’audits, de créations de commissions. Il y a un sentiment de flou, très mal vécu en interne», confirme ainsi Marie Duhamel, journaliste à Radio Vatican, qui vient de publier un «livre-objet» particulièrement réussi: Pape François (éditions Mame).
La méthode employée par le pape, qui a choisi de s’entourer d’une garde rapprochée de neuf cardinaux n’ayant pas fait carrière à la curie romaine, est aussi vivement critiquée. De nombreux prélats ›anciens de la curie’ regrettent ainsi de ne pas être plus consultés. Les proches du pape, eux, avancent que la réforme de la curie sera avant tout spirituelle, à travers un changement des mentalités. En lançant le grand Jubilé de la miséricorde, le pape François semble lancer un nouveau pari, au peuple entier des fidèles, mais aussi à ses détracteurs, comme une invitation à la réconciliation. Reste à savoir si le message sera entendu partout. (cath.ch-apic/bl/rz)
Raphaël Zbinden
Portail catholique suisse