«#PrayForParis» est devenu un symbole de soutien envers les victimes des attentats de Paris, suite au fameux «Je suis Charlie», qui avait marqué ceux du 7 janvier 2015. Mais la formule «priez pour Paris» dérange certains, parce qu’il a un côté religieux. Parmi les sceptiques, on trouve le journal «Libération» qui rappelle que «la France est un pays laïc, où toutes les religions ont le droit d’exister, mais doivent se tenir cachées dans le domaine privé». Pour le professeur Thierry Collaud de l’Université de Fribourg, cette conception de la laïcité ne tient objectivement pas la route. «Dans une société, peut-on réellement tout vivre et tout montrer, sauf le religieux?», s’étonne le professeur, pour qui, tout être humain est religieux et ne peut, en sortant de chez lui, quitter sa part de religieux, comme il ôte son pyjama pour aller au travail.
Pour le théologien, le grand défi est de passer de cette conception polémique de la laïcité à une conception apaisée, où «toutes les religions ont le droit d’exister»… dans l’espace public. Pour autant que soient respectées les règles élémentaires du vivre-ensemble. «En quoi la laïcité serait-elle menacée si les religions étaient visibles dans l’espace public?», s’interroge-t-il.
L’auteur de «Libé» Luc le Vaillant, propose une conception idéologique de la laïcité qui se présente avant tout comme un combat contre l’Eglise catholique en France. Il l’écrit lui-même: «La bagarre a été longue depuis 1789 entre la réaction catholique et le progressisme républicain». Mais le rapport de la laïcité à l’islam s’inscrit dans une autre dynamique. «L’islam est très intéressant, car il n’est probablement pas ‘privatisable’, explique Thierry Collaud. Il vient brouiller les cartes du jeu laïcs-cathos que la France interprète depuis deux siècles avec une partition trop bien réglée».
Pour le professeur, rendre visible les religions, serait le moyen de faire ressortir leurs points problématiques et de créer le débat dans l’opinion publique. Le phénomène de radicalisation ne se propage-t-il pas justement dans la sphère privée? «Alors oui, conclut Thierry Collaud, on doit prier très fort pour Paris». (apic/gr)
Grégory Roth
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