Les quelque 50 participants à l’événement ont souligné que le respect de la dignité humaine se fondait d’abord sur la qualité des relations humaines sur le lieu de travail, mais que le cadre de travail pouvait aussi violer cette dignité. «Sa protection n’est jamais définitive, un engagement collectif est nécessaire pour qu’elle soit respectée», ont martelé les militants chrétiens.
Le thème du forum était «Dignité au travail… à quelles conditions?». A l’aide d’une méthode interactive, les participants ont commencé par prendre conscience des valeurs fondamentales au travail: sens, respect, compétences, alliances. Ils ont ensuite relevé les obstacles s’opposant à ces valeurs dans la pratique. Grâces aux échanges en groupe, parfois très personnels, chaque participant a pu s’interroger sur la négociation constante à mener entre ses désirs, ses valeurs et les contraintes du réel. Il a été possible de mettre en lumière des réalités parfois violentes, mais aussi la capacité de résilience que beaucoup ont manifestée à travers leur témoignage.
Trois éclairages sont venus ponctuer les échanges en petits groupes. Pierre Farron, pasteur à Lausanne, a relevé la dimension psychologique. Le travail est source de développement pour la personne qui travaille, lorsqu’il est reconnu par les pairs et la hiérarchie. Sans cette reconnaissance, il est source d’épuisement, de souffrance. Pour Philippe Leu, du ministère protestant genevois «Evangile et Travail», la dignité humaine ne dépend pas du travail, ni ne découle de lui. Et d’interroger: «pour reconnaitre un humain (comme tel!), faut-il le voir à l’ouvrage? Ou bien, l’humanité des personnes transcende-t-elle leur ›faire’, leur pratique?» Enfin Jean-Claude Huot, agent pastoral catholique est revenu sur la valeur même du travail, soulignant qu’aux yeux du croyant, il était porteur de dignité, car l’humain est créé à l’image de Dieu et qu’il participe ainsi à son œuvre créatrice.
Un «avocat du diable», joué par Pascal Bregnard, responsable du Département Solidarités de l’Eglise catholique dans le canton de Vaud (ECVD), est venu interpeler les participants à plusieurs reprises. Il a ainsi aidé les participants à visualiser les conditions de la dignité au travail. Celle-ci demande des changements au niveau de la hiérarchie, de la gouvernance et de la gestion. Si l’on a un climat sécurisant au niveau de ces trois instances, il est possible de se parler, de se respecter. Ce respect engendre l’estime, la reconnaissance de l’identité de la personne. Un autre point central est le dialogue: pouvoir écouter, partager. La santé découle alors de cette reconnaissance. La dignité au travail suppose aussi que la personne fasse un travail dans lequel elle trouve un sens et qui la mette en relation, même indirecte avec les clients ou les collègues. Le travail est aussi relation humaine.
La journée s’est terminée par une interrogation: «comment dépasser ce niveau interpersonnel pour rejoindre une lutte collective?». Car la dignité de la personne ne se mesure pas à la calculette. Pourtant c’est bien la calculette que l’on retrouve dans la réalité de beaucoup d’entreprises, même dans les services publics. Et transformer cette réalité dépasse les capacités d’individus isolés.
Encadré
Les thèmes des précédents forums étaient: «Tenir debout!» en 2010 / «Insécurité au travail. Tenir ensemble» en 2011 / «Gagner assez! Salaire minimum salaire juste» en 2012. / «Oser résister pour rester digne» en 2013 / «Travailler ensemble?» en 2014.
Le «Forum œcuménique romand Monde du travail» est organisé par: la Pastorale Monde du Travail en Suisse romande, la Pastorale œcuménique dans le Monde du Travail du canton de Vaud, «Evangile et Travail» de l’Eglise protestante de Genève, Association protestante «Eglise et Monde du Travail» (Lausanne), Famille Franciscaine Romande, Communauté de Travailleurs Chrétiens, membre du Mouvement Mondial des Travailleurs Chrétiens et Communauté Romande de l’Apostolat des Laïcs (CRAL). (apic/jch/mk/rz)
Raphaël Zbinden
Portail catholique suisse
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