Un couple d’auditeurs au synode appelle à «changer de regard sur les divorcés remariés»

Rome, 15.10.2015 (cath.ch-apic) Le synode des évêques sur la famille, au Vatican, est entré dans sa troisième phase et aborde nombre de questions concrètes parmi lesquelles l’accueil des personnes divorcées remariées. Une question qui ne concerne pas seulement les couples vivant cette situation mais tous les baptisés, appelés à une conversion du regard. C’est en substance le plaidoyer de Christian et Nathalie Mignonat, auditeurs au synode, que l’agence I.MEDIA a rencontré en marge des débats. Le couple lyonnais sexagénaire, responsable national des ‘Equipes Reliance’ pour les personnes divorcées remariées, se fait porteur de la parole de couples chrétiens engagés dans une nouvelle union, devant les évêques du monde entier.

Quelles sont vos impressions depuis le début du synode? Comment voyez-vous votre rôle?

C’est une opportunité extraordinaire de rencontrer des évêques et à travers eux tous les pays qu’ils représentent avec leurs cultures différentes et leur façon différente d’exprimer leur foi. C’est une certaine responsabilité d’avoir été appelés au sommet de la gouvernance de l’Eglise, et d’être associés à ce processus. Dans les Circuli minores, nous n’avons pas le droit de vote, mais nous pouvons demander comme les autres à prendre la parole. Nous sommes «auditeurs», ce qui signifie que nous sommes d’abord là pour écouter. Nous nous situons plutôt dans une position de service: nous apportons aux pères synodaux notre expérience de vie, dans certains créneaux particuliers. Nous pouvons également être une sorte de «baromètre de la réception», c’est-à-dire aider à ce que certains mots ou formulations plus obscurs, puissent être mieux entendus, mieux compris.

Les ‘Equipes Reliance’ proposent de laisser plus de pouvoir pastoral au niveau des Eglises particulières. Pourquoi?

C’est le sentiment d’un certain nombre de pères de nos Circuli minores qui, confrontés à cette grande diversité des situations humaines, songent à faire remonter cette proposition de façon relativement ferme. Il est clair qu’il faut qu’il y ait un «ensemble directeur» qui s’applique à tous parce que nous sommes Eglise universelle. Par contre, les modalités pratiques pastorales peuvent peut-être trouver des solutions plus modulables selon les régions à travers les conférences épiscopales ou autres organes. C’est une voie à explorer, de façon à pouvoir s’ajuster au mieux à la problématique de telle ou telle Eglise particulière.

Les ‘Equipes Reliance’ proposent aussi un «chemin de discernement» pour l’accès aux sacrements des personnes divorcées-remariées. En quoi cela consiste-t-il?

Nous avons fait travailler nos équipes sur ces sujets parce que nous pensons que c’est une façon dynamique de voir la question. Cela montre que les chrétiens ne s’enferment pas dans un refus mais qu’ils agissent aussi en termes de proposition. L’idée essentielle de ce «Chemin d’Emmaüs» est de rencontrer les personnes là où elles en sont et non pas d’en rester à un simple concept ni de plaquer des règles générales sur des situations diverses. Les personnes divorcées-remariées ne vivent pas leur situation de la même manière, suivant qu’il s’agisse de personnes qui ont été abandonnées, de personnes épousant quelqu’un de divorcé mais dont c’est pour elles-mêmes la première union, etc. Puisqu’il n’existe pas d’uniformité des situations, il est sans doute préférable de pouvoir proposer non pas un seul chemin mais «des» chemins, c’est à dire d’accompagner les personnes à partir de leur situation réelle, personnelle. Il est juste qu’un couple remarié depuis 25 ans, ayant déjà fait une démarche de pardon, n’ait pas le même itinéraire à faire qu’un jeune couple éloigné de la foi…

Au début des travaux, le pape François a rappelé que la question des divorcés-remariés n’était pas la seule question du synode…

Un certain nombre de pères synodaux se sont plaints que cette question «pollue» un peu le débat. Le pape leur a dit de mettre en parenthèse cette question qui sera abordée au moment prévu. Il est bon de ne pas se cristalliser là-dessus parce que c’est une question parmi d’autres, et que certaines problématiques d’autres pays sont aussi urgentes et dramatiques. Pour les personnes divorcées remariées, cet aspect de la pastorale est vraiment très important.

Qu’attendez-vous de ce synode?

Nous allons donner la parole que nous portons et nous comptons sur le Saint Esprit pour donner une juste réponse. Mais il faut souligner aussi qu’un des enjeux du synode est la conversion de tout le Peuple de Dieu. Les chrétiens doivent se poser la question d’un changement de regard. Que ce soit sur les migrants, sur les violences faites aux enfants ou aux femmes, nous sommes tous appelés à la conversion, toute la communauté est amenée à se remettre en question et à agir. En France, on entend des paroles très dures en direction des personnes divorcées-remariées, certaines personnes refusant par exemple qu’ils enseignent le catéchisme à leurs enfants. La parabole du Fils prodigue est très claire avec le Fils aîné: si on veut participer à la joie du banquet, il faut entrer dans la salle et c’est là que l’on trouve le Père. (apic/imedia/ak/rz)

Raphaël Zbinden

Portail catholique suisse

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