Grossesses précoces, pauvreté et abus sexuels: causes des mariages d'enfants au Brésil

Brasília, 12.09.2015 (cath.ch-apic) Un rapport publié début septembre par l’ONG brésilienne Promundo, qui étudie depuis 1997 les questions de genre, révèle qu’en 2010, au moins 88’000 garçons et filles brésiliens, entre 10 et 14 ans, étaient mariés. Le chiffre grimpe à 567’000 pour la tranche d’âge de 15 à 17 ans.

Le rapport, élaboré à partir des chiffres du recensement de 2010, indique que les grossesses précoces, la pauvreté et la volonté de fuir les violences domestiques et les abus sexuels commis au sein du foyer sont les principales raisons des milliers de mariages.

Le document réalisé par l’ONG brésilienne Promundo comprend également les résultats d’une étude qualitative menée en 2014 par des chercheurs de l’Université Fédérale du Para, dans le nord du pays, auprès de plusieurs dizaines de jeunes filles mariées, ayant 15 ans d’âge moyen, mais aussi de leurs conjoints (tous âgés de plus de 20 ans) et de travailleurs sociaux dans le domaine de l’enfance.

Une violation des droits humains

Cette étude révèle que le mariage des enfants et des adolescents au Brésil est généralement différent des rituels existants dans certains pays d’Afrique et d’Asie, où les jeunes filles sont promises par les familles dans le cadre de mariages arrangés ou même forcés. Chez le géant sud-américain, ce sont plutôt les grossesses précoces, la pauvreté et la volonté de fuir les violences domestiques et les abus sexuels commis au sein même du foyer dont sont issues ces gamines qui sont les principales raisons de ces mariages. Des unions pour lesquelles, les épouses ont 15 ans en moyenne et sont généralement neuf ans plus jeunes que leurs conjoints.

Le mariage des enfants est reconnu internationalement comme une violation des droits humains et défini par la Convention des Nations Unies sur les Droits de l’Enfant (CRC), que le Brésil a ratifiée en 1990. Un pays où l’âge minimum légal pour se marier est fixé à 18 ans pour les hommes comme pour les femmes, avec cependant quelques exceptions, reconnues par le Code civil.

Perte de vie sociale…

La première exception, partagée par la plupart des autres pays, permet à des jeunes mineurs à partir de 16 ans de se marier avec le consentement des parents (ou l’autorisation de leurs représentants légaux). La seconde est que la jeune fille mineure peut se marier avant d’avoir ses 16 ans en cas de grossesse. Et la dernière exception, prévue par le Code Civil, est le mariage permis avant les 16 ans révolus pour éviter «l’imposition d’une peine criminelle» en cas de viol. Autrement dit, un violeur peut éviter une punition s’il se marie avec sa victime.

Dernier point de cette enquête qualitative, les conséquences sur la vie sociale et l’équilibre psychique des jeunes filles mariées précocement. Ces dernières ont en effet majoritairement regretté de voir disparaître progressivement leurs liens d’amitié et leur vie sociale, pour devoir passer une grande partie de leur temps à s’occuper du mari et des enfants. Des époux souvent jaloux et parfois même violents.

… Et des rêves de jeunes filles

Les chercheurs ont indiqué que les jeunes filles ont en grande majorité le sentiment de passer du contrôle parental à celui de l’époux. Elles ont également majoritairement reconnu avoir dû enterrer leurs rêves d’études et de réalisation professionnelle, en étant confrontées à leurs responsabilités de mères et aux tâches qui leur incombe.

D’après une estimation de l’Unicef de 2011, le Brésil est le 4ème pays au monde pour le nombre de mariages d’enfants. Dans cette étude, 877’000 femmes alors âgées de 20 à 24 ans, avaient en effet assuré s’être mariées avant d’avoir 15 ans. Ce classement est toutefois à relativiser, car il n’inclue pas, par manque de données fiables, des pays comme la Chine, le Bahreïn, l’Iran, l’Israël, le Koweït, la Libye, l’Oman, le Qatar, l’Arabie Saoudite, la Tunisie et les Émirats Arabes Unis… entre autres. (apic/jcg/pp)

Pierre Pistoletti

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