«La Bible ne dit rien sur l'homosexualité»: un point de vue protestant

Zoug, 28.08.2015 (cath.ch-apic) «La Bible ne dit absolument rien sur l’homosexualité, telle qu’elle est aujourd’hui définie d’un point de vue scientifique par la psychologie», affirme le pasteur Andreas Haas. Le représentant de l’Eglise réformée du canton de Zoug donne son point de vue, le 28 août 2015 pour «Christ und Welt» sur la récente polémique suscitée par les propos de Mgr Vitus Huonder, évêque de Coire.

L’évêque grison avait cité fin juillet, lors d’un congrès à Fulda, en Allemagne, un passage du Lévitique selon lequel «Si un homme couche avec un homme comme on couche avec une femme, ils ont fait tous deux une chose abominable, ils seront punis de mort: leur sang retombera sur eux» (Lévitique 20:13). Ces propos ont suscité de vives protestations, notamment au sein de l’Eglise catholique.

Le pasteur Haas n’a pas apprécié non plus le choix de citations de l’Ancien Testament de Mgr Huonder. Selon l’ecclésiastique protestant, les propos de l’évêque de Coire ont peut-être rencontré l’approbation d’un petit cercle minoritaire de catholiques conservateurs, mais ils ont également contredit le message de Jésus et nuit non seulement à l’Eglise catholique, mais aussi aux réformés. Pourtant sur ces questions de l’homosexualité et du traitement des couples de même sexe, les Eglises protestantes et l’Eglise catholique vivent dans un autre monde, assure le pasteur.

Une Eglise lucernoise très ouverte

«Cet aspect est malheureusement peu connu dans l’opinion publique, car il n’est pas assez communiqué», explique-t-il. Les gens ne savent souvent pas que, dans les Eglises réformées, les bénédictions de couples homosexuels – assimilées à des mariages – se font aussi naturellement que pour les couples hétérosexuels (au moins en Suisse alémanique ndlr). Et le pasteur de rappeler que, contrairement à ce qui se passe dans l’Eglise catholique, le mariage n’est pas chez les réformés un sacrement. Il souligne que ce type de bénédiction a été beaucoup discuté dans le monde réformé, et qu’une ligne d’ouverture a finalement été adoptée. Andreas Haas indique que dans les Eglises réformées du canton de Lucerne, ainsi que dans d’autres cantons, la bénédiction de couples de même sexe est carrément inscrite dans le règlement. La pratique serait courante même dans les Eglises où ce point n’est pas entériné par écrit.

Le pasteur Haas admet que certaines Eglises réformées distinguent encore les bénédictions des mariages, un aspect qui est du ressort de chaque Eglise cantonale. Il souligne également la présence d’éléments fondamentalistes au sein des Eglise réformées qui «n’ont rien à envier aux catholiques conservateurs», en particulier dans les zones rurales.

Il relève qu’à Zoug, dans une communauté réformée «très ouverte sur le monde», les bénédictions de couples homosexuels n’ont jamais été remises en question. Il explique avoir lui-même bénit et mariés plusieurs de ces couples.

«L’amour doit être bénit»

Le pasteur assure que, dans des domaines tels que la sexualité, la prise en compte des résultats de la science fait partie de la nature des Eglises réformées. «Il est maintenant certain que l’orientation sexuelle n’est pas quelque chose que l’on choisit mais qui nous est donné», martèle-t-il. Et sur ce type d’homosexualité, telle qu’elle est aujourd’hui définie d’un point de vue scientifique par la psychologie, la Bible ne dit absolument rien, affirme le pasteur. Pour ce dernier, tout ce qui se base sur la coercition ou la persuasion d’une mauvaise conscience  est à considérer comme «inhumain».

Pour le pasteur, c’est l’amour entre deux êtres humains qui est en fin de compte bénit dans les unions homosexuelles. Ce genre de relations mérite, comme toute autre, d’être accompagné spirituellement, affirme Andreas Haas. Il regrette que «les organisations patriarcales comme l’Eglise catholique» voient toujours la chose autrement.

La Bible comme message de libération

A propos du passage du Lévitique cité par Mgr Huonder, le pasteur estime que «l’évêque aurait eu quelque peu besoin de se faire aider au niveau de l’exégèse. Il aurait ainsi compris que le Lévitique – dans lequel on peut trouver encore bien d’autres choses auxquelles on ne peut souscrire actuellement- ne parle pas de l’homosexualité en tant que telle». Andreas Haas souligne que «ces écrits sont à mettre en relation avec la préservation de la dignité humaine.» Cela peut également s’appliquer aux écrits de saint Paul, qui fustigent les relations sexuelles entre personnes de même sexe, mais qui ne parlent en fait pas de l’homosexualité issue d’une orientation naturelle, assure le pasteur zougois.

«L’interprétation historico-critique de la Bible en est, chez certains théologiens catholiques, encore à ses balbutiements,» note avec regret Andreas Haas. «Nous ne devons pas prendre la Bible à la lettre, mais nous devons la prendre au sérieux!» Les textes de la Bible sont foncièrement fascinants. «Si on les interprète consciencieusement, alors la Bible devient ce qu’elle doit être: un message de libération», conclut le pasteur. (apic/C+W/rz)

Raphaël Zbinden

Portail catholique suisse

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