En 2012, l’Eglise protestante de Genève, au bord de la déroute financière, avait décidé de drastiquement réduire la voilure en prévoyant de passer de quelque 80 postes à 50 entre 2014 et 2020, rappelle «Le Courrier» de Genève. Cet exercice, nécessaire pour revenir à l’équilibre financier, s’est fait sans licenciements, mais en ne remplaçant pas les départs. Alors qu’en 2011-12, les charges se montaient à 14,5 millions de francs, elles sont cette année de 13,1 millions. Une douzaine d’équivalents plein temps ont déjà disparu.
Cette réduction de personnel a nécessité de régionaliser le travail des pasteurs. «Ces départs non remplacés, c’est très dur, il y a davantage de travail, car il est difficile d’abandonner des tâches, et il y a davantage de fatigue», admet Eric Vulliez, responsable des finances de l’Eglise protestante de Genève. Il précise néanmoins qu’un accompagnement a été mis sur pied en parallèle au plan de redressement. Mais pour lui, les paroissiens «ont compris qu’il fallait une mise en commun des ressources et nous soutiennent».
Le redressement a aussi touché la caisse de pension de l’Eglise, plombée par un ratio actifs/retraités très défavorable. A fin 2011, le taux de couverture était de 85%, avec un découvert de 10 millions. En décembre 2014, le taux était de 95,8%, grâce notamment à la recapitalisation de biens immobiliers. L’objectif est un taux de 100% ou plus en 2018.
Enfin l’Eglise protestante genevoise a pu bénéficier d’une bonne mobilisation des donateurs pour environ 9 millions de francs. Rappelons que le canton du bout du Lac, au contraire de la majorité des cantons suisses, ne connaît pas d’impôt ecclésiastique, mais uniquement une contribution volontaire des fidèles.
Sur le plan pastoral, l’Eglise protestante souhaite mieux répondre aux attentes des 18-39 ans, très peu présents dans les communautés paroissiales. L’institution réformée les invite à faire leur propre Eglise. Le constat est que les jeunes adultes ont soif de spiritualité, mais peinent à se retrouver dans l’offre existante de l’Eglise protestante. «Le culte du dimanche, avec son rythme et son langage, ne leur convient pas forcément. Les facultés de théologie ont formé des pasteurs académiciens, alors que les nouvelles générations à qui ils s’adressent ne se contentent plus qu’on leur transmette nos vérités. Elles aspirent donc à des espaces qui leur correspondent, où pouvoir discuter du sens de la vie», explique la pasteure Carolina Costa. Elle a été chargée cet été avec son collègue Nicolas Lüthi de mettre sur pied des projets destinés aux jeunes. Le principe est de partir de leurs propres envies et propositions. Une première démarche est «Le Lab», pour laboratoire, un groupe de rencontre proposant des temps d’échange et d’initiation à la vie spirituelle. Mme Costa estime à une soixantaine le nombre de jeunes embarqués dans l’aventure, mais elle espère que les projets feront des émules.
Par ailleurs, une antenne LGBT va être ouverte, pour accueillir de jeunes homosexuels ayant des difficultés à vivre leur religion. Ils se sentiront écoutés sans être jugés.
L’enthousiasme de Carolina Costa a déjà débouché sur la série vidéo web «Ma femme est pasteure», qui rencontre un joli succès auquel elle ne s’attendait pas forcément. «L’idée était d’aller à la rencontre d’un public jeune via le web et l’humour, afin de casser l’image négative de l’Eglise. Nous détournons des scènes de la Bible, il y a beaucoup d’influence des Monty Python.» Avec 50 à 60 000 vues par vidéo, le succès est là. Il s’est aussi vérifié à travers une large couverture médiatique. La production, financée par les Eglises protestantes de Suisse romande, a aussi été sélectionnée dans quatre festivals internationaux de web séries.
L’Eglise protestante genevoise souhaite aussi développer le concept d’»Eglise
des enfants». L’idée est d’amener les enfants à développer leur spiritualité en suivant leur propre cheminement: «Les enfants sont porteurs de leurs propres croyances, ils ont leur idée de Dieu et beaucoup de choses à nous apprendre. On a longtemps pensé que nous devions leur transmettre notre savoir, mais leur inculquer nos ›vérités’ suscite souvent des réactions de rejet à l’adolescence. Il s’agit plutôt de trouver les mots pour éveiller leur spiritualité, dans un cadre ludique, avec des animations» a expliqué le pasteur Etienne Jeanneret. (apic/le courrier/mp)
Maurice Page
Portail catholique suisse
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