Tchéquie: Le corps du Père Josef Toufar, tué en 1950, transféré dans son église

Prague, 16.07.15 (cath.ch-apic) Des milliers de personnes ont assisté le 12 juillet 2015 au transfert des restes mortels du Père Josef Toufar, mort sous la torture de la police secrète communiste tchèque en 1950. La dépouille du prêtre, jetée par les communistes dans une fosse commune, a été déposée dans l’église du village de Cihost dont il était le curé.

L’évêque de Sadowa, Mgr Jan Vokal a présidé la célébration tandis que l’homélie a été prononcée par l’archevêque de Prague, le cardinal Dominik Duka. Ce transfert constitue une étape importante pour la reconnaissance des crimes commis par le régime communiste contre l’Eglise catholique en Tchécoslovaquie. Grâce à l’engagement de longues années de sa famille et de quelques personnalités, le corps du Père Toufar a pu être exhumé en novembre 2014 du cimetière de Prague-Dablice et identifié. Cette procédure était également nécessaire pour le procès en béatification ouvert en avril 2014.

 Héros d’un film de propagande malgré lui

Josef Toufar, mort à l’âge de 47 ans en février 1950, est le premier d’une longue liste de 173 prêtres tchécoslovaques tués par les communistes entre 1950 et 1953. Son histoire est assez surréaliste.

Josef Toufar est en effet le protagoniste principal de l’affaire dite du ’miracle de Cihost’. Le 11 décembre 1949, dans l’église de Cihost, un village de la région de Vysocina, un crucifix se serait mis à bouger sur l’autel pendant l’homélie du prêtre. La police secrète, la StB, mise au courant, avait alors accusé le prêtre d’avoir manigancé un faux miracle pour inciter les croyants à s’opposer à l’idéologie communiste.

Josef Toufar fut arrêté, emprisonné et brutalement torturé. Dans un contexte de rapports exacerbés entre le régime et l’Eglise, le pouvoir avait décidé de se servir de l’affaire pour organiser un procès exemplaire. Le prêtre devait alors figurer dans un court métrage de propagande prétendant reconstruire le miracle selon la logique de la police secrète. Josef Toufar aurait élaboré un mécanisme ingénieux et l’aurait manipulé lui-même pendant la messe. Toujours selon propagande cette mise en scène d’un ’miracle’ faisait partie d’une conspiration de la CIA et du Vatican.

Au moment du tournage, le prêtre, épuisé par les tortures, n’avait pas pu jouer son rôle et avait été remplacé par un figurant. Tourné la nuit pour éviter la curiosité des fidèles, le film reproduit à 376 exemplaires avait ensuite été largement diffusé dans tout le pays.

Josef Toufar a succombé aux interrogatoires musclés auxquels il a été soumis à Valdice, prison dans laquelle le régime communiste envoyait ses détenus politiques. Il est mort d’une hémorragie interne en février 1950, deux mois seulement après le prétendu ’Miracle de Cihost’.

Les faits restent une énigme

Selon le postulateur de la cause, Tomas Petracek, «Josef Toufar était tout à fait innocent dans l’affaire. Il n’a pas vu ce qui s’est passé, il n’en a été informé que par la suite. Quant aux faits mêmes, à savoir le mystérieux mouvement de la croix sur l’autel pendant la troisième messe de l’Avent en décembre 1949… Vous savez, c’est une énigme. C’est un mystère. Il n’existe aucune explication simple, plausible et acceptable de ce qui s’est réellement passé.»

Cette histoire, au-delà de son aspect religieux, a donné lieu à diverses interprétations littéraires et artistiques dont la dernière en date est un opéra monté en 2013 au Théâtre national tchèque. (apic/rp/mp)

Maurice Page

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