Gabrielle Nanchen à Belfaux aux 50 ans du Mouvement Chrétien des Retraités

Belfaux, 26 juin 2015 (Apic) Près de 300 aînés provenant de tout le canton de Fribourg ont fêté à la paroisse de Belfaux les 50 ans de la «Vie Montante», rebaptisée en 1974 Mouvement Chrétien des Retraités (MCR). Point d’orgue de cette journée, la conférence de l’ancienne conseillère nationale Gabrielle Nanchen, qui fut, en 1971 à l’âge de vingt-huit ans, l’une des dix premières femmes à avoir siégé sous la coupole fédérale.

En introduction de la journée, Blanche Bovet, présidente du MCR du canton de Fribourg, a salué la mémoire des «valeureux pionniers» qui ont lancé le mouvement dans le canton il y a un demi-siècle. Et de relever que «quand on devient vieux, on devient un coffre-fort rempli de trésors… Le temps de la retraite est un temps pour apprécier les petits bonheurs, sans doute plus modestes, mais tout aussi essentiels, comme la joie des découvertes, la convivialité et surtout la joie intérieure liée aux opportunités de vivre davantage la gratuité et la sagesse».

Une pionnière au Conseil national

La présidente a cependant relevé que le Mouvement a de la peine à recruter de nouveaux membres. Soulignant les multiples distractions offertes aujourd’hui aux seniors, elle a dit son espoir que ce Jubilé donne un nouvel essor et de nouvelles forces au mouvement des retraités.

Présentant Gabrielle Nanchen, l’invitée du jour, elle rappela qu’elle fut, en 1971, année de l’introduction du suffrage féminin en Suisse, l’une des dix premières femmes élues au Conseil national où elle siègera jusqu’en 1979.

«Je suis heureuse de me retrouver à Belfaux 40 ans après l’invitation que m’avait faite Félicien Morel, alors tout juste élu socialiste au Conseil national. J’en ai un très bon souvenir. Je suis aussi honorée d’avoir été associée aux 50 ans de la Vie Montante, moi qui étais membre de la Jeunesse étudiante chrétienne (JEC) à Lausanne il y a 50 ans», déclare d’emblée la conférencière.

Cette alerte Valaisanne née à Aigle, dans le canton de Vaud, d’un père italien et d’une mère française, militante socialiste et chrétienne, mère et grand-mère, fut assistante sociale diplômée. Après son passage au Parlement fédéral dans les années 1970, elle poursuit son engagement pour davantage de justice sociale.

Licenciée en sciences sociales de l’Université de Lausanne et diplômée en travail social de l’Ecole d’études sociales de Lausanne, Gabrielle Nanchen milite – et écrit – pour l’égalité hommes-femmes et la solidarité entre le Nord et le Sud de la planète. Mais c’est surtout en tant que pèlerine passionnée de la route de Saint-Jacques de Compostelle qu’elle est venue à Belfaux.

Un coeur et un esprit ouverts aux autres

Dans l’église de Belfaux comble, devant un public séduit par la profondeur et le langage poétique de cette croyante au coeur et à l’esprit ouverts aux autres, Gabrielle Nanchen décrit ses pérégrinations sur le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle. Bien qu’elle se fût entraînée à la marche tous les dimanches, en mettant dans son sac à dos des dictionnaires de plus en plus lourds, le vrai chemin n’a pas été de tout repos: les douleurs physiques, la peur des chiens errants, la pluie et le froid, la solitude, la peur d’être malade, de se faire dévaliser, voire de se faire violer…

«J’ai failli renoncer. Il me faut marcher 20 à 25 km par jour, avec l’angoisse de trouver à manger, de trouver un gîte… Mais j’apprends à rencontrer les autres. Entre pèlerins, c’est très facile et très simple, on parle de l’essentiel, on partage l’eau de sa gourde, un bout de fromage… On est sans domicile fixe, juste ce que l’on a sur le dos.On dépend de ce que l’on va trouver sur la route. J’ai appris à recevoir, c’est plus difficile que de donner! Quand j’étais perdue et que j’avais peur, j’ai rencontré des ‘anges gardiens’ au bord de la route, pour m’indiquer le chemin quand je m’étais égarée».

Se délester de tout ce qui encombre le corps et l’esprit

Près de trois mois de marche, où la Valaisanne se déleste de tant d’objets qui lui semblaient indispensables, et aussi de tout ce qui encombre l’esprit: la hargne, les inimitiés, les rancoeurs, les sentiments d’échecs… «Après presque trois mois de marche, je suis arrivée à Compostelle, moi qui m’en croyais incapable, physiquement et psychiquement. J’ai dit merci à Saint Jacques, mais j’avais une telle nostalgie, la peur de ne plus retrouver cette joie que j’avais ressentie tout au long du voyage, la peur de retrouver les soucis quotidiens».

Et c’est à ce moment qu’elle découvre à sa grande stupéfaction l’instrumentalisation qui fut faite dans l’histoire de l’apôtre Saint Jacques, qui devint Santiago Matamoros, le tueur des Maures, «représenté sous les traits d’un cavalier en train de piétiner de pauvres bougres basanés portant des turbans. On avait fait de l’apôtre un massacreur de musulmans!»

Le pouvoir de l’époque l’avait transformé en porte-drapeau de la Reconquista, l’offensive de la royauté catholique contre la présence maure en Espagne. La vue de cette image d’un passé révolu a cependant été un tournant pour Gabrielle Nanchen, la poussant à fonder l’Association Compostelle-Cordoue, qui veut favoriser le «vivre ensemble» de personnes de cultures différentes. Elle est aujourd’hui la présidente d’honneur de cette association qui invite à changer notre regard sur les autres «pour éviter les guerres de religion dont Santiago Matamoros est un symbole».

«Conduire le monde des aînés vers Dieu»

La journée du Jubilé a été entrecoupée des prestations du Choeur des Gueux, le quatuor gruérien qui a animé musicalement la messe présidée par Mgr Alain de Raemy. Commentant l’épisode biblique où l’Eternel apparut à Abraham qui avait atteint la limite d’âge de 99 ans, l’évêque auxiliaire du diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg a rappelé que l’âge était une chance de faire les choses plus en détail et non plus forcément en grand. Aumônier du MCR, le Père spiritain Francis Zufferey a souligné que le témoignage de Gabrielle Nanchen, sur le thème «La vie est chemin», invite à regarder le chemin que le MCR a parcouru en 50 ans. Il est devenu au fil des ans un mouvement oecuménique d’action chrétienne inspiré par la parole de Dieu, «un chemin de vie et chemin de foi, que nous poursuivons en Eglise pour conduire le monde des aînés vers Dieu». JB


Encadré

Gabrielle Nanchen, socialiste et chrétienne

Gabrielle Nanchen est née en terre vaudoise en 1943. Après des études en sciences sociales, elle s’engage au sein du parti socialiste valaisan. Elle fut présidente de «Femmes, rencontres, travail», vice-présidente de la Commission fédérale pour les questions féminines, présidente de Swissaid, déléguée de la Direction du développement et de la coopération (DDC) pour les questions Nord-Sud , présidente de la Fondation pour le développement durable des régions de montagne, membre de l’assemblée du CICR.

Elle a écrit plusieurs ouvrages:

 


Encadré

Le MCR, représenté au Conseil Suisse des Aînés

Le Mouvement Chrétien des Retraités – Vie Montante MCR-VM est membre de la Fédération Suisse des Retraités (FSR), qui fait partie de la Fédération des Associations des Retraités et de l’Entraide en Suisse (FARES). Par ce biais, il est représenté au sein du Conseil Suisse des Aînés (CSA). Le CSA existe depuis novembre 2001 et a qualité d’organe consultatif du Conseil fédéral pour les questions de la vieillesse. Comptant actuellement un peu moins de 1’800 membres, le MCR subit une érosion continue depuis 25 ans et qui concerne tous les cantons. JB

 


Encadré

Un mouvement laïc et œcuménique

Le MCR, qui s’est appelé «Vie Montante» jusqu’en 1974, est laïc, animé par des laïcs, et œcuménique. Composé pour les deux-tiers par des catholiques et du tiers restant par des protestants, il connaît une réalité diverse. Le MCR a calqué sa structure sur la géographie des cantons romands. La faible présence du mouvement en Suisse alémanique va s’éteindre avec le groupe de Lucerne. Les cantons «locomotive» sont le Jura (570 membres), Fribourg (380 membres) et le canton de Vaud (330 membres). Suivent le Valais (280 membres), Neuchâtel (120 membres) et Genève (110 membres).

Le mouvement Vie Montante, actuel MCR, est né en 1962, à Paris. La Vie Montante s’implante en Suisse de façon informelle à Genève, Lausanne et Sion. C’est à Lausanne que la VM s’implante officiellement en Suisse romande. Le premier groupe est fondé en l’église du Saint Rédempteur à Lausanne le 3 novembre 1966. D’autres groupes seront créés en Valais, en 1967 à Genève, dès 1968 dans le canton de Fribourg et dans le Jura. Depuis 1970, le MCR-VM fait partie de la Communauté Romande de l’Apostolat des Laïcs (CRAL).

 


Encadré

Le Jura pastoral et Neuchâtel fêtent le demi-siècle d’existence du MCR

Plus de 450 membres du Mouvement Chrétien des Retraités (MCR) du Jura pastoral et du canton de Neuchâtel se sont retrouvés aux Franches-Montagnes le 18 juin dernier pour participer à la journée festive organisée à l’occasion du 50e anniversaire des deux sections.

Notre-Dame de l’Assomption, au centre de Saignelégier, la plus grande église du Jura, était juste assez grande pour accueillir les sections jurassienne et neuchâteloise du MCR. La journée d’anniversaire a débuté par une messe d’action de grâce présidée par Mgr Felix Gmür, Dans son homélie, l’évêque du diocèse de Bâle a rendu hommage aux fondateurs de ce mouvement francophone: «Il faut remercier ceux qui ont initié ce mouvement il y a 50 ans. Mais il ne faut pas seulement dire merci au passé, on peut déjà remercier les années à venir. La majorité d’entre vous a plus de 50 ans. Votre première communion s’est sûrement déroulée en latin… Mais aujourd’hui tout va très vite. Il faut chaque jour s’adapter et apprécier les changements… et il y en aura encore beaucoup dans les 50 prochaines années».

Au cours de la célébration, cinq cierges aux couleurs du MCR ont été allumés et déposés devant l’autel alors que le pasteur François Jacot, de Neuchâtel, revenait sur les étapes importantes qui ont marqué les cinq décennies du mouvement: «A ce jour la section du Jura pastoral compte 580 membres répartis dans 27 groupes. Dans le canton de Neuchâtel, il y a sept groupes qui rassemblent 125 membres».

De nouveaux défis

A la tête du MCR Jura depuis deux ans, François Merçay n’a pas manqué de rappeler la force du mouvement: «S’il s’occupe d’un aspect important de la personnalité à travers la spiritualité, le MCR a un véritable rôle social de dialogue et de convivialité. La vie des retraités a bien changé depuis 50 ans, ils ont de moins en moins de temps pour affirmer leur foi, la transmettre à leurs enfants ou à leurs petits-enfants. On ne parle plus du troisième âge, mais du quatrième. Nos membres vieillissent et, pour recruter de nouveaux membres, notre défi est d’inventer de nouvelles manières de se faire connaître». Les participants ont pu découvrir – en avant-première – un documentaire sur le MCR réalisé cette année par Jean-Claude Boillat, du Service audiovisuel du Jura pastoral (SAJP). Ce film, disponible en DVD, peut-être visionné sur le site www.jurapatoral.ch. (apic/pascaltissier/sic/be)

 

 

Jacques Berset

Portail catholique suisse

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