«Son option pour les pauvres n’était pas idéologique, mais évangélique», a soutenu le cardinal Angelo Amato au micro de Radio Vatican, le 22 mai, à la veille de présider la messe de béatification de Mgr Oscar Romero devant quelque 250 000 personnes dans la capitale salvadorienne. Le haut prélat enterre ainsi les critiques au sujet de l’archevêque salvadorien assassiné par des miliciens d’extrême-droite alors qu’il célébrait la messe et accusé d’avoir des liens avec le mouvement de la Théologie de la libération. Ce mouvement a longtemps suscité la suspicion du Vatican, qui craignait des dérives marxistes.
Dans L’Osservatore Romano, Mgr Vincenzo Paglia, postulateur de la cause de l’évêque salvadorien, a assuré pour sa part que «sa béatification sous le pontificat du premier pape latino-américain confère au témoignage de Romero une force particulière». Le président du Conseil pontifical pour la famille a par ailleurs relevé des similitudes entre le pape François et l’archevêque salvadorien. «L’affirmation du pape François: ›Comme je voudrais une Eglise pauvre pour les pauvres’, lie Romero de manière forte à l’actualité de l’Eglise et à sa mission».
La messe de béatification, à San Salvador, verra la participation de plusieurs cardinaux et d’une centaine d’évêques. Y participeront aussi les présidents du Salvador, Salvador Sanchez Cerén, d’Equateur, Rafael Correa, du Honduras, Juan Orlando Hernandez, et du Panamá, Juan Carlos Varela, ainsi que les vice-présidents de Bolivie, Costa Rica, Cuba et Belize.
Ouverte en 1993, la cause de béatification de Mgr Romero est parvenue à Rome en 1997. Complexe en raison de la récupération de la figure de l’évêque salvadorien par le courant de la Théologie de la libération, le processus romain aura duré près de deux décennies. Outre la Congrégation pour les causes des saints, le dossier de l’évêque martyr était passé entre les mains de la Congrégation pour la doctrine de la foi et de son préfet de l’époque, le cardinal Joseph Ratzinger. Elle avait alors été bloquée pour des raisons idéologiques.
Interpellé par I.MEDIA en mai 2007 dans l’avion qui le menait au Brésil, Benoît XVI avait qualifié Mgr Oscar Romero de «grand témoin de la foi», regrettant cependant qu’un camp politique ait voulu le prendre à tort comme porte-drapeau. Pour autant, c’est Benoît XVI lui-même, quelques mois avant de démissionner, qui a réellement débloqué la cause. Le procès de béatification, avec l’élection du premier pape latino-américain, a ensuite connu une certaine accélération.
En janvier dernier, la commission de théologiens de la Congrégation pour les causes des saints a validé le martyre en haine de la foi de Mgr Oscar Romero. Début février, le pape François a autorisé la congrégation à promulguer le décret reconnaissant le martyre de l’évêque salvadorien, permettant sa prochaine béatification sans qu’il soit besoin de lui attribuer un miracle.
Le 24 mars 1980, Oscar Romero, archevêque de San Salvador, était assassiné alors qu’il célébrait la messe dans la chapelle de l’hôpital de la Divine Providence, dans la capitale salvadorienne. Pendant ses obsèques, le 30 mars 1980, l’armée avait tiré sur la foule, faisant plusieurs dizaines de victimes. Une commission des Nations unies a ensuite établi que son assassinat avait été ordonné par des militaires de son pays.
Dès sa nomination, en 1977, il était entré en conflit avec la haute bourgeoisie, l’armée et le pouvoir, défendant l’option préférentielle pour les pauvres. La veille de sa mort, il avait demandé aux soldats de refuser d’obéir aux ordres de tuer, malgré les menaces de mort perpétrées à son endroit. (apic/imedia/bl/mp)
Maurice Page
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