Tandis que la Malaisie et l’Indonésie ont annoncé qu’elles renonçaient à repousser au large les bateaux chargés de migrants qui se présentent à leurs côtes et qu’elles accueilleraient, à Djakarta, les principaux représentants des religions musulmane, chrétienne et bouddhiste d’Indonésie se mobilisent, rapporte «Eglises d’Asie» (EdA), l’agence d’information des Missions Etrangères de Paris (MEP).
S’exprimant dans un communiqué commun daté du 21 mai 2015, ils rappellent que «le problème des Rohingyas» coincés en mer entre la Birmanie qu’ils fuient et les pays riverains qui les rejettent est d’abord «une question d’humanité qui est du ressort de la nation [indonésienne] toute entière». Depuis que la crise des migrants en mer d’Andaman se développe, au moins deux mille réfugiés ont pu accoster sur la côte Nord de Sumatra, principalement dans la province d’Aceh, où les populations locales leur ont fait bon accueil.
Selon les responsables religieux, l’afflux cette année par voie de mer des réfugiés rohingya et bangladais souligne l’urgence pour l’Indonésie de se doter d’un cadre juridique approprié. Ils appellent les autorités gouvernementales à se pencher sans délai sur cette question, que ce soit en adoptant la Convention de 1951, dite «Convention de Genève», sur le statut des réfugiés et des apatrides, ou que ce soit par la publication d’une ordonnance présidentielle qui donnerait un cadre légal pour accueillir humainement ces réfugiés.
En Asie du Sud-Est, seuls le Cambodge et les Philippines sont signataires de la Convention de Genève. Selon le Haut-Commissariat aux réfugiés de l’ONU, l’Indonésie ne dispose pas de textes réglementaires ni des structures permettant d’accueillir des migrants et de déterminer leurs statuts futurs.
Les responsables religieux soulignent qu’accueillir de manière humaine des réfugiés n’est pas, à strictement parler, «une affaire religieuse», mais que c’est là une affaire qui concerne toute la nation. Le rôle de l’Etat est de se montrer proactif afin de dire aux gens comment cette question doit être gérée par l’ensemble des parties impliquées, a précisé à la presse Sugiyanto, de l’Association bouddhiste d’Indonésie (Walubi). Un responsable musulman, Maman Imanulhap, a ajouté que la principale organisation musulmane de masse du pays, la Nahdlatul Ulama, avait acquiescé au communiqué commun et appelé toutes les madrasas (écoles coraniques) à accueillir les enfants rohingya qui viendraient à trouver refuge près de là où elles sont situées.
Pour le Révérend Stephen Siahaan, de la Communion des Eglises protestantes d’Indonésie (PGI), les Rohingyas fuient des conditions de vie terribles. «Ce que nous devons faire en premier lieu, c’est sauver des gens qui sont en train de mourir; l’aspect humanitaire de ce problème ne connaît pas de frontière», a-t-il insisté.
En Malaisie par ailleurs, la CFM (Fédération chrétienne de Malaisie), qui rassemble l’ensemble des Eglises chrétiennes (protestantes et catholique) du pays, a appelé toutes les Eglises de Malaisie à apporter leur aide et à assister les agences secourant ces boat-people.
Mercredi 21 mai, l’Indonésie et la Malaisie ont renoncé à l’attitude qui était la leur cette année, à savoir repousser les bateaux chargés de migrants, et se sont mis d’accord pour accueillir temporairement les milliers de migrants qui sont actuellement en mer, «à condition que leur relocalisation ou leur rapatriement par la communauté internationale soient effectifs dans l’année». La Malaisie a annoncé le même jour que sa marine et ses garde-côtes se mobiliseront pour localiser et porter secours aux migrants piégés à bord de bateaux en perdition en mer d’Andaman depuis des semaines.
«Nous devons empêcher la perte de vies humaines», a déclaré le Premier ministre malaisien Najib Razak sur son compte Facebook. Le 19 mai, les Philippines s’étaient déclarées prêtes à accueillir 3′ 000 de ces migrants de la mer. Par ailleurs, le 19 mai, le pape François s’est exprimé pour la première fois sur cette actualité, évoquant «ces pauvres Rohingyas de Birmanie» chassés de chez eux comme «les chrétiens et les Yézidis» persécutés par l’organisation Etat islamique en Irak et en Syrie.
«Au moment de quitter leurs terres pour fuir les persécutions ils ne savaient pas ce qui leur arriverait. Et depuis des mois, ils sont sur des bateaux, là-bas… Ils arrivent dans une ville, où on leur donne de l’eau, de la nourriture et puis on leur dit: allez-vous en d’ici», a déploré le souverain pontife lors d’une messe au Vatican. (apic/eda/be)
Jacques Berset
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