Dans son interview du 19 mai 2015 au quotidien valaisan Le Nouvelliste, «Mgr Lovey a exprimé les choses d’une façon qui a paru contradictoire à beaucoup de gens», affirme l’abbé Pralong, auteur du livre «Mais qui a dit que Dieu n’aimait pas les homos?», publié en 2013. Il réaffirme que l’évêque est un homme ouvert sur ces questions et qu’il a récemment encouragé la formation d’un petit groupe d’homosexuels catholiques du diocèse. «Les membres du groupe qui l’ont rencontré m’ont dit combien ils avaient été bouleversés par l’accueil extrêmement positif de l’évêque», relève Joël Pralong. Il précise que deux personnes organisant la Pride, qui se déroulera à Sion le 13 juin prochain, ont donné le même son de cloche, après une entrevue avec Mgr Lovey. Il imagine que lorsque l’évêque se rendra compte que ses mots ont pu blesser, «il reprendra le fil de son discours, pour repréciser ses propos».
L’abbé valaisan relève que si de nombreuses personnes se sont déclarées indignées par les déclarations de Mgr Lovey, il existe une «masse silencieuse» chez laquelle elle trouve une résonnance. Joël Pralong explique ainsi qu’il a reçu un coup de téléphone d’un jeune homme qui se retrouvait dans cette idée d’une souffrance, à laquelle sont souvent confrontés les homosexuels.
Le directeur du séminaire de Sion explique également, sans vouloir parler à la place de l’évêque, que l’expression «faiblesse de la nature» a peut-être été mal interprétée. «Ce mot est connoté négativement, mais je crois qu’il peut aussi avoir un sens positif. La faiblesse peut donner lieu à un enrichissement», souligne l’abbé Pralong. De même, le terme de «guérison» utilisé par l’évêque de Sion n’est pas à comprendre, selon le prêtre, comme la sortie d’une maladie que serait l’homosexualité, un point que Mgr Lovey énonce clairement dans Le Nouvelliste. «Pour moi, ‘guérison’ est un terme adéquat dans le cadre d’une homosexualité provisoire, chez un grand nombre de jeunes et d’adolescents, indique Joël Pralong. Dans ce cas, la prière peut avoir un effet positif pour aider le jeune à trouver son chemin. Le mot ‘guérison’, en spiritualité, n’a pas le même sens qu’en médecine. Cette ‘guérison’ est une rencontre profonde avec le Christ, qui me libère de l’isolement et du repli sur soi dans lequel me plongent mes difficultés, pour m’ouvrir à la vie, aux autres, afin de trouver mon chemin de bonheur».
L’abbé Pralong assure que, pour lui, ce qui est important est ce qui se passe sur le terrain. Plutôt que de faire du «copier-coller» du discours de l’Eglise sur l’homosexualité, il tente de partir de ce que la personne vit. «Il s’agit de cheminer avec la personne, sans jugement, de voir ce qui peut être destructeur ou constructeur dans sa relation, avec comme base les fondements du message chrétien». Le directeur de séminaire prend, pour parler de l’enseignement de l’Eglise, l’analogie d’un «sommet de 4’000 mètres», que l’on aimerait atteindre, «car tout y est si beau», mais d’où l’on doit descendre, à l’instar du Christ descendu parmi les hommes, pour rencontrer les personnes dans leurs réalités de vie. Il assure que, même s’il adhère à 100% au fait d’appliquer les critères éthiques de l’Eglise, il réagit dans les interviews principalement en tant que «pasteur», qui chemine avec les personnes sans les juger.
Quoiqu’il en soit, Joël Pralong assure «se réjouir» de son évêque. «C’est un homme de cœur, proche des ‘petits'».
Encadré 1
Vives réactions aux propos de l’évêque
Les déclarations de Mgr Lovey ont provoqué de nombreuses réactions de la part des milieux homosexuels et sur les réseaux sociaux. A l’image de la députée socialiste valaisanne Barbara Lanthemann, pour qui les propos de l’évêque de Sion sont «ignorance, condescendance, mépris de la nature de chaque individu». Elle a envoyé, au nom de l’organisation suisse des lesbiennes LOS, un communiqué aux médias soulignant que l’organisation est «profondément choquée et révoltée» par les propos tenus par l’évêque de Sion, rapporte le 20 mai Le Nouvelliste.
L’association ajoute que les propos de Mgr Lovey «incitent au rejet» et «à l’exclusion» et espère qu'»il trouvera les mots pour corriger ce que nous appelons un dérapage volontaire dans un esprit d’apaisement à quelques semaines de la Pride Valais/Wallis».
D’autres communiqués ont suivi durant la journée, dont l’un du comité de la Pride Valais/Wallis 2015 qui «condamne sans réserve l’amalgame entre l’homosexualité et la maladie (…) Nous espérons que c’est une maladresse de l’évêque», confie Sébastien Nedaz, porte-parole du comité qui a reçu des dizaines de réactions. «Les gens se sentent blessés».
Quant à l’association Pink Cross, soit la fédération suisse des gays, elle va plus loin en demandant que l’évêque de Sion s’excuse publiquement et retire des propos qualifiés de «fallacieux et infondés».
Encadré 2
Les extraits de l’interview de Mgr Lovey ayant suscité ces réactions:
Que répondez-vous aux parents espérant pouvoir «changer» leur enfant homosexuel?
Dans l’environnement des personnes homosexuelles, les proches le ressentent parfois comme une blessure ou une souffrance. Dès lors, il faut honorer leur désir que ça change. Pour la question de fond – «Est-ce qu’une personne homosexuelle peut changer?» – il y a un domaine sur lequel on peut miser: la prière. Sur le plan de la grâce et de la foi, la prière ne pourrait-elle pas être un lieu de changements? Elle a déjà guéri des malades à maintes reprises. Le problème de fond n’est pas celui de l’homosexualité mais de la sexualité tout court et en général. De nature, l’être humain est sexué, masculin-féminin. Et il n’est pleinement humain que s’il vit cette complémentarité. C’est une question de morale naturelle. L’Eglise, à juste titre, continue de dire qu’on ne peut pas modifier cet état de nature.
Mais l’homosexualité n’est-elle pas dans la nature de la personne et donc impossible à changer?
Certes, la personne est souvent comme cela dès le départ mais cela ne veut pas dire que ce n’est pas modifiable. Des guérisons psychologiques existent. L’homosexualité peut être guérie.
Pour vous, c’est donc une maladie?
Non, c’est une faiblesse de la nature. La preuve, c’est qu’il y a une souffrance réelle de la personne qui le vit et de son entourage. Mais cela n’enlève rien à l’humanité de la personne homosexuelle, ni à sa dignité. (apic/nouv/rz)
Raphaël Zbinden
Portail catholique suisse
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