C’était un vendredi, il y a peu à Banda Aceh. Trois badauds se tenaient assis à siroter un café alors que la ville, autour d’eux, fermait. Les commerces baissaient leur rideau, les échoppes repliaient la marchandise et les restaurants repliaient les tables. A Banda Aceh, les portes de l’établissement où se tenaient les trois badauds, comme celles des commerces tout au long de la rue, fermaient et les rues étaient vides de voitures. Bientôt, des policières de la charia allaient commencer leur ronde en ville, réprimandant les hommes musulmans qu’elles rencontreraient pour se dérober à l’obligation religieuse hebdomadaire de la prière à la mosquée.
Nos trois buveurs de café, pour ce qui les concernaient, ne s’estimaient pas visés. «C’est bon, nous avons le temps, nous allons bientôt nous diriger vers la mosquée», explique Mirza Rizqan en riant. «Nous y allions de toute façon, renchérit son ami Sarjev. Pour les hommes d’Aceh, ne pas aller à la mosquée, c’est vraiment la honte !»
«Cela n’a rien à voir avec la pression [de la police de la charia], ajoute Mirza Rizqan. Les habitants d’Aceh vont à la mosquée … Les gens qui viennent d’autres provinces ne comprennent pas la culture d’Aceh».
A Aceh, où 98 % de la population est musulmane, l’islam règne sur la plupart des aspects de la vie quotidienne. Mais comme la religion est de plus en plus la norme dans la législation et la réglementation, les politiques visant à instaurer la stabilité ont plutôt produit de nouvelles fractures après les conflits survenus dans cette province.
«Pourquoi nous mettons en œuvre la charia?», commente Al Hudri, chef provincial de l’Agence de l’ordre public et de la police de la charia. Et de répondre sans marquer une pause: «Pour mettre bon ordre à la vie quotidienne».
Les trois décennies de lutte à Aceh pour l’indépendance ont connu une fin brutale en août 2005, il y a dix ans, lorsque les dirigeants du Mouvement pour un Aceh libre (Gerakan Aceh Merdeka, GAM) ont signé un accord clôturant le conflit et ouvrant la voie à une région autonome intégrée dans la grande République unitaire d’Indonésie.
Bien que les négociations aient duré des années, le protocole d’accord (MoU) signé à Helsinki en août 2005 survint moins de huit mois après le tsunami dévastateur du 26 décembre 2004 et depuis, les conséquences des deux événements ont été inexorablement liées.
*Un message de Dieu». C’est ainsi que de nombreux Acehnais interprètent la catastrophe naturelle. Au sein du musée du tsunami, une longue passerelle suspendue sur un étang artificiel a été baptisée «le Pont de la Paix» parce qu’»après l’événement du tsunami, Aceh a enfin obtenu la paix», ainsi que l’explique un guide touristique.
Ces dix dernières années, Dieu, l’autonomie et la loi islamique sont devenus si étroitement imbriqués qu’ils forment un discours officiel cohérent.
«La situation économique, avant le MoU, était très, très sombre. Et puis, la politique, [les questions] sociales…, nous avons eu de gros problèmes pendant la période de conflit », explique Syahrizal Abbas, le chef de l’Agence pour la charia à Aceh.
«Après le protocole d’accord, Aceh a connu le problème du conflit et celui du tsunami. Nous voulions obtenir de fortes personnalités pour susciter de bonnes compétences chez les habitants d’Aceh… Et maintenant, [nous nous concentrons sur] la manière de construire une société stable pour la population d’Aceh».
La réponse, a conclu le gouvernement, était une mise en œuvre «en douceur» dans la mise en place de la charia. L’alcool, le jeu, l’adultère ont été interdits et sanctionnés par le recours – vivement critiqué – de la flagellation. Une agence de police religieuse a été créée pour donner des avertissements et livrer les contrevenants aux autorités compétentes. Les tribunaux islamiques ont commencé à traiter des affaires tandis que les responsables politiques ont mis au point des réglementations de plus en plus minutieuses. Le vrai succès, cependant, a été de gagner l’opinion publique.
«Dans la province d’Aceh, il n’y a personne portant des pancartes dans les rues pour protester contre la mise en œuvre de la charia. En fait, si nous ne faisons rien, les gens vont nous combattre. Si nous restons silencieux, les gens feront quelque chose», souligne le chef de la police de la charia Al Hudri. »Nous avons le soutien de la population d’Aceh», commente Syahrizal Abbas
Veiller à la morale publique s’est en effet révélé être un grand succès à Aceh. Dans les rues de Banda Aceh, la capitale provinciale, propriétaires de magasins et étudiants, hommes et femmes, jeunes et vieux, ont tendance à apporter un soutien absolu à la charia. Les critiques concernent une certaine hypocrisie et une application inégale, mais on vante la loi elle-même.
«Il est bon que la police de la charia mette en place des barrages routiers pour contrôler la population. Les habitants d’Aceh portent essentiellement la tenue vestimentaire musulmane, mais les nouveaux arrivants ne le font pas, aussi il est bon d’en avoir», explique ainsi Lale, vendeuse de souvenirs sur le marché vaste et vide de Pasar Aceh. Couverte de la tête aux pieds, en dépit de la chaleur torride, Lale estime que le gouvernement pourrait aller plus loin. «Ils ne sont pas tellement sévères. Ils devraient être plus stricts. Il devrait y avoir plus de barrages routiers et les gens qui sont arrêtés doivent être mis en garde».
Dans un café à l’université, de nombreux étudiants sont d’accord. Portant des jeans de couleurs sombres, les cheveux plaqués en arrière avec du gel, les garçons fument sans répit tout en expliquant les avantages et les inconvénients de la charia. Un trio de jeunes filles portant jupes longues et chemises arborant des logos de marques sourient, tout en manifestant leur soutien unanime.
«C’est mieux, en fait, car Aceh est différent des autres provinces, nous devons donc couvrir nos corps, explique Fia, 18 ans, un foulard bleu drapé soigneusement sur ses épaules. Dans l’avenir les lois seront peut-être assouplies, mais il y a actuellement de nombreux contrevenants et nous en avons donc besoin».
Un de ses camarades, Mukti, ajoute que le principal problème est la tendance de la police à persécuter les «petits». «Je suis d’accord avec la charia… mais ici la mise en œuvre de la charia n’est pas exemplaire. C’est juste pour la population locale, mais les fonctionnaires du gouvernement, la police, ils ne s’y conforment pas», dit-il.
Les condamnations sont rares, en partie parce que critiquer une telle loi peut apparaître comme une critique de la religion dont cette législation est issue. Plus important, cependant, est le phénomène d’effacement des mémoires qui a cours depuis dix ans à Aceh.
«Les populations locales ont tendance à oublier leur histoire», déclare Haki, le seul étudiant qui admet être opposé à la loi. «Aceh s’est certes construit sur l’enseignement islamique, mais autrefois il n’y avait pas de réglementation comme actuellement».
Surnommée la «Terrasse de La Mecque», Aceh a longtemps été connue pour son rôle dans la diffusion de l’islam en Asie du Sud-Est. Le sultanat d’Atjeh Darussalam, l’un des premiers Etats islamiques et centre d’étude islamique de la région, a prospéré à partir du XVIème siècle. Ses sultans et sultanes (quatre femmes ont gouverné successivement au XVIIème siècle) ont protégé et fait grandir une nation prospère et considérable, redoutée des commerçants et des colonisateurs. Lorsque les Hollandais entreprirent finalement des actions en vue d’annexer le sultanat dans les années 1870, ils se heurtèrent à une résistance sans précédent. La guerre fit rage à Aceh pendant 35 ans, jusqu’à ce que la région finisse par succomber en 1904.
Au cours de la seconde moitié du XXème siècle, comme la province luttait pour l’indépendance de l’Indonésie, Aceh est restée pieusement et fièrement musulmane, tout en manifestant peu d’intérêt à imposer la Loi islamique par le haut. Même le GAM, principale organisation luttant pour la liberté et à l’origine de la plupart des gouvernements actuels de la province d’Aceh, n’était pas officiellement intéressé par la fondation d’un «Etat islamique».
«Nous encourageons les gens à être de bons musulmans, mais nous ne pensons pas que ce soit à l’Etat d’en décider, déclarait ainsi Amni Ahmad Marzuki, porte-parole du GAM, au Christian Science Monitor en 2002. Nous avons le sentiment que Djakarta se sert de la charia pour détourner les gens des vrais problèmes locaux».
Alors qu’Aceh pourrait ne pas avoir eu besoin de recourir à une réglementation islamique en tant qu’Etat libre, la charia s’est avérée une aubaine pour un Etat autonome en difficulté. D’une part, elle a modifié les débats. Au lieu de discuter politique ou corruption, des infrastructures ou de l’économie, les gens parlent de la manière dont leurs voisins sont vêtus.
«L’esprit était différent de l’idéal, qui est de rendre la vie de la population plus prospère. En pratique, cependant, ce dont les gens se soucient concerne les tenues vestimentaires, et tels ou tels symboles… La mise en œuvre de la charia ne change pas la situation économique, les services et équipements publics», explique une militante féministe qui s’exprime sous couvert de l’anonymat pour des raisons de sécurité. Elle souligne que, étant étudiante dans les années 1980 et 1990, elle portait alors des jupes courtes, jouait au tennis en short et portait rarement un voile. «La réglementation a modifié [la situation], et cela a été bien accueilli dans la société. Si nous interrogions les gens d’Aceh, la réponse serait ›oui’, ils soutiennent la mise en œuvre de la charia».
Dans un premier temps, quand la charia a été mise en œuvre, aucune police n’existait. A sa place, des voisins se regroupaient pour arrêter et punir ceux qu’ils estimaient se comporter de manière immorale. Ce niveau inhabituel de responsabilisation a probablement joué un rôle non négligeable pour la popularisation de la charia.
«Au début, c’est la société qui a effectué le nettoyage. Il y a eu des cas où on a coupé les pantalons et les cheveux de certaines personnes. Sur les marchés traditionnels, par exemple, on a jeté des œufs pourris sur celles qui ne portaient pas de foulards», rappelle la militante. Aujourd’hui, la police demeure fortement dépendante de ces arbitres locaux du comportement moral.
Marzuki M. Ali, président de la police provinciale de la charia, précise que la majorité des cas dont son administration est saisie est le fait de signalements faits par des civils. «La plupart du temps, les cas que nous traitons proviennent de rapports faits par des gens ordinaires. Aussi le processus est long. Les gens arrêtent les contrevenants et nous les livrent», explique-t-il.
Les rares personnes interrogées affirmant qu’elles n’aimaient pas la charia ont en commun une extrême aversion envers la censure publique. «Quand je suis avec ma copine, on n’a pas de mauvaises pensées, mais les gens nous regardent et pensent du mal de nous. Cela nous met mal à l’aise, déclare Haki. Nous ne nous sentons pas à l’aise [sous la charia], nous nous sentons frustrés.»
Rahman, vingt-trois ans, réceptionniste à Banda Aceh, explique que la pression sociale est devenue si forte qu’il cherche à partir. «Si je vais au parc avec une amie, simplement pour nous asseoir et discuter, on [nous arrête]: qu’est ce que vous faites?»
Pour le pire, une telle vigilance au quotidien a pu dégénérer jusqu’à une extrême violence. En mai dernier, une femme a été violée par huit de ses voisins, y compris un garçon de 13 ans, après avoir été surprise seule avec un homme marié. Les membres du groupe, la plupart ayant ensuite été arrêtés, ont battu et retenu l’homme avant de violer et d’agresser la femme. C’est seulement après l’agression, qui s’est terminée par l’arrosage du couple avec des eaux de vidange, qu’ils les ont remis à la police religieuse pour être châtiés selon la charia. L’homme a reçu six coups de fouet, tandis que la femme – enceinte au moment du verdict – devra subir la flagellation après avoir accouché.
Ce n’est un secret pour personne que les femmes ont particulièrement à redouter la charia. Les statistiques de la police pour 2014 indiquent que les femmes sont citées dans une proportion deux fois supérieure à celle des hommes. Sur 1’817 cas traités par la police religieuse, 1’236 concernaient des contrevenants de sexe féminin.
La Commission nationale d’Indonésie sur les violences faites aux femmes (Komnas Perempuan) a souligné à plusieurs reprises les aspects discriminatoires de la charia à Aceh, encore que cela ait eu peu d’effet, la situation semblant empirer.
Dans un communiqué publié en novembre 2014, la commission a noté le nombre croissant des mesures politiques à Aceh «qui présentent un caractère discriminatoire au nom de la religion et de la morale».
Des organisations locales et internationales de défense des droits de l’homme soutiennent depuis longtemps que les contraintes vestimentaires, les coiffures et la manière appropriée de conduire une moto sont intrinsèquement discriminatoires, mais ce sont les moins visibles des oppressions qui font des ravages.
Dans les universités d’Aceh, les femmes sont nombreuses dans les salles de cours. Elles vont à bicyclette, parcourent librement les rues et la ville, gèrent des magasins et dirigent des entreprises. Ce ne sont pas les situations de claustration et d’agressivité qu’on rencontre dans les pays soumis à la charia. Et pourtant, les conditions sont de plus en plus difficiles.
Komnas Perempuan, par exemple, a relevé l’an dernier 365 pratiques discriminatoires, soit une augmentation de plus de trois fois depuis que ces résultats ont été officiellement présentés aux autorités nationales en 2009, soit à l’époque 154 cas.
Là où les femmes ont autrefois régné sur un sultanat et lancé des mouvements de résistance, elles ont été réduites au statut de victimes ayant besoin de protection.
«C’est utile à titre préventif. Il nous faut admettre qu’il y a des cas de viols et d’autres crimes actuellement. Ce sont des conséquences négatives. Notre objectif principal est donc de les [les femmes] protéger», explique Badruzzaman Ismail, chef du Conseil de l’Aada d’Aceh et l’un des premiers rédacteurs de la loi. Cette attitude est très répandue au sein de la population.
«Les femmes constituent le maillon le plus faible», argumente Ibn Khairan Eban, un négociant en pierres précieuses et imam à temps partiel, lorsqu’on l’interroge sur les raisons latentes des règles restrictives visant les femmes.
Au moment des élections, ce sentiment s’est confirmé. En 2010, un président du conseil de district d’Aceh a fait les manchettes de la presse après avoir appelé au remplacement de la dirigeante d’un sous-district au motif qu’en vertu de la charia, «il est interdit à une femme de devenir leader». Aujourd’hui, sur 69 membres du Parlement, 10 seulement sont des femmes.
Hors de la vue du public, la rigueur de la loi a conduit à un nombre préoccupant de violences faites aux femmes, notamment les violences conjugales, selon les militants. La dernière enquête à grande échelle, qui s’est déroulée en 2013 et fut conduite par une coalition d’ONG, a révélé que près des trois quarts des cas de violences faites aux femmes étaient conjugales.
«Si l’on considère la situation des femmes, on y trouve des textes réglementant leur corps et leur moralité. Les femmes sont encore des objets», explique Roslina Rasyid, directrice de l’organisation d’aide juridique LBH APIK de Banda Aceh. «Je ne peux pas prévoir si la situation des femmes à Aceh sera pire ou meilleure dans l’avenir. Il y a des vagues instables – avec des hauts et des bas».
Pour toutes les questions d’actualité, cependant, le véritable test surviendra en fin d’année, lorsqu’il est prévu qu’Aceh impose son Code pénal islamique sur une grande échelle. La législation, appelé Qanun Jinayat, devrait entrer en vigueur en septembre prochain, soit un an après son adoption par le conseil législatif d’Aceh.
On a porté une grande attention sur le fait que Qanun Jinayat est la première réglementation prescrivant les châtiments de la charia pour les non-musulmans. Bien que les autorités ait affirmé à Ucanews qu’elles n’avaient aucun intérêt à poursuivre les non-musulmanes ne portant pas le voile, par exemple, elles seraient légalement tenues de le faire en vertu de la loi.
Des dizaines de milliers d’habitants d’Aceh non musulmans, comme les voyageurs de passage, devront faire face aux mêmes prescriptions sur la vie quotidienne que leurs voisins musulmans. Les contrevenants, indépendamment de leur croyance, doivent s’attendre à s’exposer à des poursuites devant un tribunal de la charia et à la flagellation, châtiment de la charia.
La loi a également été sous le feu des critiques pour sa criminalisation de l’homosexualité, qui est punie de peines de flagellation et de fortes amendes.
Abbas, de l’agence de la charia, insiste pour dire pour que l’interdiction ne sera pas trop rigoureuse, notant qu’un homme et un autre homme sont autorisés à demeurer dans une maison. Il n’existe aucune règle leur interdisant de prendre des repas ensemble, de travailler ensemble, de vivre ensemble … même dormir dans un seul lit est OK. Mais sans surprise, le qanun (la compilation des réglementations administratives de l’Empire ottoman ayant mis en place la charia) et le pouvoir discrétionnaire du sultan), qui interdit la sodomie et le saphisme, suscite de vives critiques. Les organisations des droits de l’homme ont critiqué cette disposition qui a rejeté gays et lesbiennes, vivant déjà dans cette société discriminatoire, dans une plus grande clandestinité.
Toutefois, on met à peine l’accent sur un élément crucial de la réglementation donnant aux tribunaux islamiques un droit de regard sur plusieurs délits graves. «Le Qanun Hukum Jinayat dispose de peines de substitution. Cela dépend des juges. Les peines de substitution sont la prison, l’amende et la flagellation, précise Abbas. [La loi] comporte des articles en cas de viol… Pour une affaire de viol, la peine est d’environ 100 coups de fouet».
Cette peine (un minimum de 125 et un maximum de 175 coups) est sur un pied d’égalité avec celle punissant les relations homosexuelles (jusqu’à 100 coups de fouet) ou les relations sexuelles hors mariage (jusqu’à 100 coups de fouet). En transférant les affaires de viol d’un tribunal pénal à un tribunal islamique, la loi risque de réduire au silence les victimes de viol.
Selon le Qanun Jinayat, la victime d’un viol qui dénonce son agresseur mais n’a d’autre preuve que son témoignage, pourra voir le cas rapidement abandonné. «Une clause du serment islamique permet à toute personne soupçonnée de viol et qui proclame jusqu’à cinq fois son innocence d’être admissible à l’abandon automatique des charges, la cour devant déterminer l’absence d’›autres éléments de preuve à charge’», relève l’Observatoire des droits de l’homme basé à New York, dans un communiqué publié en octobre.
Si la victime ne parvient pas à produire quatre témoins, elle pourra, à son tour, être accusée d’allégations mensongères et être punie de 80 coups de fouet.
Dans son rapport annuel publié il y a quelques semaines, Amnesty International a dénoncé cette disposition et affirmé qu’il y avait «des inquiétudes au sujet de la définition et de la production de preuves liées aux délits de viol et d’abus sexuels dans la réglementation qui ne répondent pas aux normes internationales des droits de l’homme». «Le Qanun Jinayat rendra muette la victime d’un viol sur son viol», a alerté Samsider, militante d’Aceh, dans une tribune libre publiée dans le Jakarta Globe.
L’intérieur du poste de police de la charia de Banda Aceh grouille d’agents qui plaisantent entre eux tout en s’affairant dans le bâtiment délabré où se situent leurs bureaux. Dans la cour, des camions verts fatigués flanquent une petite mosquée. «J’avais l’habitude de m’habiller comme vous», dit une policière de la charia, arborant un sourire chaleureux avant de se lancer dans une conversation précipitée assaisonnée d’impeccables expressions anglaises. «Quand j’étais au collège, je m’habillais comme les filles vivant à Djakarta … Quand je prenais le bus pour l’école, nous étions arrêtés par des barrages et on me demandait pourquoi je ne portais pas de foulard».
Ces jours-ci, la fonctionnaire, qui a demandé à ne pas être citée nommément parce qu’elle n’est pas autorisée à parler aux médias, déambule vêtue d’une longue tunique et d’un pantalon vert olive. Un foulard assorti drape modestement sa poitrine. Ainsi vêtue, elle fait partie du personnel des postes de contrôle, arrêtant des couples d’adolescents et des femmes nu-tête, recherchant les hommes qui esquivent les prières du vendredi.
Au fil des années, sa foi s’est approfondie et sa compréhension de l’islam s’est étendue. Les vêtements, fait-elle remarquer, «n’empêchent pas d’être soi-même (…) Lorsque nous arrêtons des gens, nous leur conseillons seulement comment s’habiller correctement… En portant une tenue correcte, il y a un espoir, ils peuvent avoir davantage confiance en l’islam dans leur cœur».
(apic/ucan/
Raphaël Zbinden
Portail catholique suisse
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