Le pape François appelle à la vérité sur le massacre arménien

Rome, 9 avril 2015 (Apic) Trois jours avant la célébration d’une messe en mémoire du génocide arménien, le 12 avril 2015 au Vatican, le pape François a assuré qu’il prierait Dieu pour qu’advienne «dans l’amour pour la vérité et la justice», «un consensus raisonnable sur la lecture de si tristes événements».

Devant les évêques de l’Eglise arménienne catholique, le pape a souhaité des «gestes concrets de réconciliation et de paix entre les nations». Il n’a pas cité la Turquie qui refuse de reconnaître la qualification de ›génocide’ pour le massacre des populations arméniennes survenu dès avril 1915 sous l’Empire ottoman.

Le déchainement des forces obscures

Sans jamais prononcer le mot de ›génocide’, le pape François en a cependant donné une proche définition devant les évêques arméniens catholiques: «des profondeurs du cœur de l’homme, les forces les plus obscures peuvent se déchainer, capables de parvenir à programmer systématiquement l’anéantissement du frère, à le considérer comme un ennemi, un adversaire, ou même un individu privé de sa propre dignité humaine». Le droit international définit ainsi un génocide comme «l’extermination physique, intentionnelle, systématique et programmée d’une population ou d’une partie d’une population en raison de ses origines ethniques, religieuses ou sociales».

Dans cette allocution, le pape François a également rendu hommage au pape Benoît XV (1914-1922) qui «intervint auprès du sultan Mehmet V pour faire cesser le massacre des Arméniens». Le pape a aussi assuré prier pour le «dialogue œcuménique entre l’Eglise arménienne catholique et l’Eglise arménienne apostolique, qui se souviennent qu’il y a cent ans comme aujourd’hui, le martyre et la persécution ont déjà réalisé ›l’œcuménisme du sang’».

Avant l’intervention du pape, le patriarche de Cilicie des Arméniens, le catholicos Nersès Bedros XIX a affirmé pour sa part que, «lors du génocide du peuple arménien, il y a 100 ans, un million et demi de personnes ont été atrocement massacrées en raison de leur foi chrétienne».

1,5 millions de morts

Le massacre des populations arméniennes, perpétré sous l’Empire Ottoman à compter du 24 avril 1915, fit au moins 1,5 million de morts. Depuis, la qualification juridique de ce massacre comme génocide suscite un débat international. Il est, à ce jour, reconnu comme tel par les parlements d’au moins 21 pays, dont la France depuis 2001.

Si les papes ont toujours veillé à ne pas utiliser publiquement le terme de ›génocide’, le choix de célébrer une messe pour les Arméniens, une douzaine de jours avant les commémorations du centenaire du génocide de 1915, apparaît fort symbolique. En novembre 2000, Jean-Paul II (1978-2005) avait cependant signé avec le catholicos Karékine II une déclaration dans laquelle les deux hommes affirmaient que «le génocide arménien, au début du siècle, (avait) constitué un prologue aux horreurs qui allaient suivre». En privé, en juin 2013, le pape François avait quant à lui qualifié ce massacre de «premier grand génocide du 20e siècle».

A l’approche de cette messe, la tension est palpable entre le Saint-Siège et la Turquie. L’ambassade de Turquie près le Saint-Siège a en effet convoqué une conférence de presse peu après la célébration. Si la Turquie n’a jamais reconnu officiellement un génocide, l’actuel président turc, Recep Tayyip Erdogan, avait présenté en 2014 les condoléances de son pays aux descendants des victimes. (apic/imedia/bl/pp)

Pierre Pistoletti

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