Niamey, 19 janvier 2015 (Apic) Selon la police nigérienne, 45 églises chrétiennes ont été incendiées à Niamey, la capitale du Niger, ainsi que dans les villes de Zinder et de Maradi, au sud du pays, suite aux émeutes anti-Charlie Hebdo qui ont secoué le pays vendredi 16 et samedi 17 janvier 2015. Les émeutiers s’en sont pris à de nombreux bâtiments de communautés religieuses et causé la mort d’une dizaine de personnes. Mgr Michel Cartatéguy, archevêque de Niamey, avait demandé à toutes les paroisses de la ville de suspendre la célébration eucharistique du dimanche 18 janvier 2015.
Le premier bilan des émeutes fait état de la destruction de cinq hôtels, de 36 débits de boissons, d’un orphelinat et d’une école chrétienne. La dizaine d’églises que compte Zinder, deuxième ville du pays, ont été brûlées ou saccagées.
Dimanche 18 janvier, ces violences ont touché la capitale Niamey. Les manifestations ont dégénéré en émeutes. 12 églises sur 14 ont été incendiées ainsi que des maisons religieuses. Seule la cathédrale de Niamey a été préservée. Dans le diocèse de Maradi, 2 églises ont été saccagées. Des églises protestantes ont aussi été attaquées par les manifestants. A Zinder, plus de 300 chrétiens se trouvaient toujours dimanche soir sous protection militaire, rapporte lundi Radio Vatican. Les manifestants ont mis le feu à la plus grande bibliothèque de la ville, située au sein du Centre culturel franco-nigérien.
Mgr Michel Cartatéguy, «encore sous le choc», dit toute son incompréhension et son inquiétude pour l’avenir. Ces 12 églises ont été complètement pillées, saccagées et profanées. «Tout est brûlé (…) il ne reste plus rien, tout est ruines et poussières».
«Seule la cathédrale est encore debout, mais pour combien de temps ?», se demande Mgr Cartatéguy. L’archevêque de Niamey a réuni lundi matin 19 janvier les prêtres et les responsables des communautés «pour prier en silence et méditer sur l’amour des ennemis ». «Nous sommes peut-être, souligne-t-il, en train de vivre l’agonie de Jésus dans nos propres corps», a-t-il déclaré à Radio Vatican.
L’archevêque originaire du Pays basque français se réjouit tout de même des «témoignages forts de solidarité de la communauté musulmane». Mgr Cartatéguy indique que plusieurs religieuses ayant tout perdu ont été protégées et sont encore dans des familles musulmanes. «Nous n’avons rien contre la communauté musulmane et sur place nous n’avons aucun problème avec elle», insiste-t-il.
Il estime que les responsables de ces actes sont «manipulés». Face à cet embrasement, l’archevêque de Niamey demande aux autorités d’offrir une protection efficace, «car cela pourrait continuer (…) on est en train de repérer les chrétiens qui sont dans la ville!».
Le chef de l’Etat nigérien Mahamadou Issoufou a dénoncé les émeutiers, refusant que des églises soient brûlées. «Pouvons-nous accepter qu’elles le soient au nom de notre religion ? De quel tort sont coupables les Eglises et les chrétiens du Niger ? Ceux qui pillent ces lieux de cultes, qui les profanent, qui persécutent et tuent leurs compatriotes chrétiens ou les étrangers qui vivent sur le sol de notre pays n’ont rien compris à l’islam», déclare-t-il dans un communiqué.
Le président nigérien déplore que ces manifestations violentes donnent une très mauvaise image «de notre pays si chaleureux et de nos populations si hospitalières». «Où veulent-ils que s’en aillent nos compatriotes de confession chrétienne en décidant de détruire leurs domiciles et de s’approprier leur bien ?», souligne-t-il encore. Le président nigérien a également souligné que cette attitude porte préjudice aux musulmans qui vivent dans les pays ou l’islam est minoritaire. « Nous condamnons ces agitations, déplorons les pertes en vie humaine et le nombre de blessés», a conclu Mahamadou Issoufou. (apic/ravat/com/be)
Jacques Berset
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