Domdidier, 16 janvier 2015 (Apic) «Le drame de l’Eglise, c’est de s’être institutionnalisée, d’avoir établi très vite des règlements excluant tous ceux qui ne cadrent pas avec eux». Plaidant pour une Eglise qui accueille «sans limites» et ne rejette personne, le jésuite Jean-Bernard Livio a tenu en haleine la cinquantaine de personnes qui avaient répondu le soir du 15 janvier 2015 à l’invitation de la section broyarde de l’Action des chrétiens pour l’Abolition de la Torture (ACAT).
Réunis à l’Oasis, le centre paroissial de Domdidier, les participants ont suivi l’argumentation foisonnante de ce jésuite passionné de Bible et d’archéologie. Une partie du temps au Moyen-Orient, il conduit en Terre sainte des groupes «Bible en mains» et leur fait connaître la «Crèche de Bethléem», qui accueille et scolarise des enfants abandonnés. En Europe ou au Québec, il allie ses connaissances bibliques et sa passion pour la formation des adultes.
Jeudi soir, il devait répondre à toute une liste de questions posées par René Canzali, de l’équipe ACAT-Broye. Relevant, au préalable, qu’aujourd’hui, dans le monde, la moitié des pays pratiquent la torture, R. Canzali a souligné que cet état de fait était «incompréhensible pour nous, car en tant que chrétiens, nous sommes appelés à pratiquer l’amour du prochain». Mais la question qui le taraude – c’est pour cela qu’il avait invité le jésuite de la communauté de Notre-Dame de la Route, c’est la désaffection grandissante envers l’Eglise sous nos latitudes, alors qu’ailleurs elles sont encore bondées. «La quasi disparition des jeunes aux messes nous invite à une réflexion approfondie», a-t-il lancé. «L’Eglise remplit-elle son rôle, ne devrait-on pas la transformer, voire la supprimer ?»
Face à ces questions brûlantes, le Père Livio a relevé qu’en ce début du XXIe siècle, «nous sommes désormais mûrs pour savoir que l’Eglise, ce n’est pas les autres, c’est nous! Avec vous, nous sommes l’Eglise! Et pour cela, il n’y a ni besoin de préalable ni de diplôme. L’Eglise est une société ouverte à tout le monde, elle accueille tout le monde. Ce n’est pas une société avec ses cotisations et son règlement de service».
Donnant une définition de l’Eglise, le religieux souligne que c’est le rassemblement de ceux qui sont interpellés, «pas par les cloches de l’église juste à côté, pas par la convocation de la secrétaire de la paroisse…, mais par un homme extraordinaire qui s’appelle Jésus». «Et un jour, ce Jésus a essayé de faire comprendre à sa bande d’amis qu’il y avait un sens dans leur vie, celui de se mettre en route, d’aller vers, mais sans jamais dire où et quel était le but, alors que c’était lui le but».
Finalement, déclare-t-il, l’Eglise a surtout besoin d’aération, d’ouvrir les fenêtres. Et d’affirmer qu’en ce qui concerne le christianisme, il ne doit pas y avoir de modèle ni pensée uniques: «la diversité, le pluralisme, c’est quelque chose tout à la fois de merveilleux et d’énervant. Ne réduisons pas nos Eglises à un dénominateur commun, il ne pas faut vouloir l’uniformité mais au contraire s’enrichir de nos différences!»
Le Père Jean-Bernard Livio, connu pour sa série des célèbres «Vendredis bibliques» au Centre spirituel et de formation de Notre-Dame de la Route (NDR) à Villars-sur-Glâne et ses «jeudis de NDR» sur l’Histoire de l’Eglise, donne également des sessions bibliques ou des retraites ignatiennes. Mais il est souvent sur les routes pour rejoindre celles et ceux qui, amoureux du Christ Jésus, cherchent une formation pour mieux se mettre au service de leurs communautés villageoises en manque de prêtres. Quand il n’est pas outre-atlantique pour former des enseignants québécois ou donner des retraites à des religieuses canadiennes. (apic/be)
Jacques Berset
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