Saints Théodule et Maurice, les icônes «bankable» du Moyen Age

Sion: Exposition sur l’utilisation de l’image sainte en politique dans les Alpes

Sion, 15 mai 2013 (Apic) La figure de Saint Maurice martyr d’Agaune a été amplement utilisée par la dynastie des Savoie pour leur règne sur les Alpes occidentales. Saint Théodule, premier évêque du Valais, a été la figure de proue de la conquête du Bas-Valais savoyard. Ce sont là quelques aspects de la thématique de l’utilisation de l’image sainte par le politique, développée par le Musée d’histoire du Valais, dans son exposition «Saint et politique. Sculptures médiévales dans les Alpes».

La manifestation sera visible du 17 mai au 22 septembre 2013 à Sion. Elle se concentre sur l’iconographie des saints valaisans Théodule et Maurice. Certaines des œuvres présentées le sont pour la première fois en Valais.

Existe-t-il une culture alpine? Y’a-t-il quelque chose qui lie les habitants des Alpes occidentales au niveau du mode de représentation iconographique? Ce sont ces questionnements qui ont orienté les recherches conjointes des cinq principaux musées des Alpes occidentales (Aoste, Suse, Annecy, Genève et Sion), relève Marie Claude Morand, directrice des musées cantonaux du Valais et du projet transfrontalier, lors de la conférence de presse du 15 mai au centre d’expositions de l’Ancien Pénitencier de Sion.

L’exposition sédunoise ne présente ainsi qu’un des aspects du large travail réalisé depuis 2002 par l’équipe de recherche plurinationale sur l’image des saints dans les Alpes occidentales à la fin du Moyen Age. La manifestation est divisée en plusieurs thèmes particuliers, présentés dans les cinq institutions muséales qui ont participé à la recherche. Chaque site porteur d’une exposition présente une thématique qui lui est propre.

La diversité des techniques médiévales

A travers les exemples de Maurice et Théodule, l’exposition de Sion montre le processus de politisation dont certains saints ont fait l’objet durant le haut Moyen Age. Elle s’articule dans deux salles principales. La première propose les débuts du culte des saints Maurice et Théodule. Elle montre le développement foudroyant de la dévotion au martyr d’Agaune à travers l’Europe. La seconde salle montre les changements iconographiques dans les représentations de saint Théodule (sculptures, retables, vitraux, monnaies, etc), en fonction de la politique locale valaisanne et de l’utilisation de l’image du saint par les évêques de Sion.

«Au-delà du discours iconographique, l’exposition veut aussi mettre en avant la diversité des technique médiévales: sculptures, peintures, travaux d’orfèvrerie, enluminures, vitrail, broderie, monnaies et sceaux», explique Patrick Elsig, directeur du Musée

d’histoire du Valais.

Le triptyque de saint Théodule, exposé en primeur

Une grande partie des œuvres sont montrées pour la première fois. «Si cette exposition peut offrir un aussi large panel d’objets, c’est grâce aux prêts de nombreux musées, institutions religieuses, paroisses ou particuliers qui ont complété les pièces du Musée d’histoire du Valais», explique Patrick Elsig. L’historien de l’art valaisan confie à l’apic qu’il aurait aimé présenter la fameuse «lance de Saint Maurice» dont la légende dit qu’elle a été forgée à partir de l’un des clous avec lesquels le Christ a été crucifié. Patrick Elsig est toutefois conscient que l’objet, conservé au Musée du Trésor Impérial de Vienne, ne pourra jamais être emprunté.

Le parcours de l’exposition se termine par une œuvre exceptionnelle, exposée en primeur après cinq ans de restauration: le triptyque de saint Théodule. «Tout en représentant des scènes traditionnelles de la vie du saint patron du diocèse, cette pièce de la fin du XVIe siècle ouvre le discours sur de nouvelles tendances artistiques et sur de nouveaux modes de pensée», ajoute le directeur du musée d’histoire du Valais.

Autres musées, autres thématiques

A partir de fin mai, le Musée d’art et d’histoire de Genève se concentrera sur saint Pierre, patron de la ville et du diocèse de Genève, ainsi que sur les saintes héroïques les plus vénérées dans le duché, Barbe, Marie-Madeleine, Catherine et Marguerite. Début juin, le Musée-Château d’Annecy abordera la question du culte de saint Antoine l’ermite-guérisseur au feu ardent, particulièrement développé du côté français des Alpes. Fin juin, le Musée du Trésor de la Cathédrale d’Aoste réfléchira sur les cultes locaux de saint Grat, saint Ours et saint Eldrade, très répandus dans la région. Le Musée diocésain de Suse, en collaboration avec le Musée national suisse de Zurich, présentera les saints Bernard,Gothard et Christophe, figures importantes liées aux lieux de passage et à la géographie alpine. Le Musée savoisien de Chambéry exposera durant la même période plusieurs sculptures du territoire savoisien récemment restaurées.

Pour plus d’informations: www.musees-valais.ch

Encadré 1

Un livre et deux voyages pour visiter les cinq lieux d’exposition

Un livre de 250 pages, publié en commun par les cinq institutions participantes et présentant les thématiques de chacun d’entre eux est sorti de presse pour l’occasion.

Un voyage organisé au départ de Genève les 30, 31 août et 1er septembre prochain, ainsi qu’au départ de Sion, permettront de visiter les cinq lieux d’exposition.

Encadré 2

Saint Maurice et Saint Théodule

Maurice d’Agaune ou saint Maurice et ses compagnons de la légion thébaine de Haute Egypte sont morts pour leur foi vers la fin du IIIe siècle. Ils avaient reçu l’ordre de tuer tous les habitants près d’Octodure, l’actuel Martigny. Les soldats auraient été condamnés à mort pour avoir refusé d’attaquer d’autres chrétiens. Selon un texte anonyme tardif, ils auraient subi le martyre pour ne pas avoir accepté de sacrifier aux dieux païens avant le combat.

Théodore d’Octodure ou Théodule du Valais fut peut-être un missionnaire chrétien venu d’Orient. Il a été le premier évêque du Valais à la fin du IVe siècle. Il aurait entrepris sous la direction de saint Ambroise, la christianisation des régions alpines de la Suisse actuelle, intégrées alors à l’Empire romain. Sa participation au concile d’Aquilée en 381 est attestée et on lui attribue la lettre du synode de Milan (393) au pape Siricius, ainsi que l’établissement de la vénération de saint Maurice. (apic/rz)

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