Angola : Les affaires louches de la compagnie suisse Trafigura

La Suisse doit agir contre la corruption

Lausanne, 3 février 2013 (Apic) La compagnie de courtage pétrolier suisse Trafigura contribue par ses alliances opaques à l’enrichissement d’une caste de dirigeants autocratiques au détriment de la population angolaise. C’est ce que dénonce une enquête de la Déclaration de Berne (DB) rendue publique le 3 février 2013.

Pour la DB, la Confédération ne peut rester complice d’une telle situation. Elle doit adopter une législation qui favorise la transparence pour limiter les risques de corruption et permettre aux populations de bénéficier des ressources naturelles.

Trafigura, troisième plus grande compagnie suisse en termes de chiffre d’affaires, se taille la part du lion en Angola. Basée à Lucerne et à Genève, la firme s’est alliée avec le général Leopoldino Fragoso do Nascimento, ou «Dino», conseiller spécial du général Manuel Helder Vieira Dias Jr, ou «Kopelipa», chef du Bureau militaire de la présidence angolaise, révèle la DB. Cette alliance a été consacrée par le mariage de Trafigura PTE (Singapour) avec Cochan PTE (Singapour). Cette dernière société a pour directeur le général «Dino» et pour unique actionnaire Cochan (Bahamas). Ce mariage a donné naissance à DTS Holdings, dirigée par le même «Dino» ainsi que par Claude Dauphin, un des fondateurs de Trafigura, résidant à Genève.

Des revenus faramineux

DTS Holdings bénéficie de revenus faramineux dans le pétrole grâce à un juteux contrat, évalué à 3,3 milliards de dollars en 2011: DTS exporte du brut angolais et fournit en échange l’intégralité des produits pétroliers dont l’Angola a besoin.

L’enquête de la DB révèle encore l’existence d’une troisième déclinaison de Cochan, en Angola cette fois-ci. Cette société est en partenariat avec Puma Energy, une autre filiale de Trafigura, pour un contrat d’investissement de 931 millions de dollars. Cette alliance baptisée Pumangol Holdings est basée aux Iles Vierges britanniques. En 2011, Trafigura a enfin vendu 20% de Puma Energy à Sonangol Holding LDA, liant davantage encore les destinées de l’Angola et de la firme helvétique.

L’adresse de Cochan à Luanda, capitale de l’Angola, est la même que celle d’une quarantaine de sociétés appartenant à un trio d’officiels angolais, tous proches du président Dos Santos, au pouvoir depuis 1979. Dominant l’économie angolaise, ce «triumvirat» comprend, outre le général «Dino», Manuel Vicente, ancien CEO de Sonangol et actuel vice-président angolais, et le général «Kopelipa». Ces trois personnages font l’objet de poursuites pénales au Portugal pour fraude fiscale et blanchiment d’argent. Par ailleurs, une firme américaine, Cobalt International Energy, est sous enquête pénale aux Etats-Unis pour s’être alliée à ce trio. Contactée par la Déclaration de Berne, Trafigura a refusé de commenter ces faits.

La Suisse décide de ne rien décider

Alors que les Etats-Unis ont adopté des lois contraignant les firmes actives dans l’industrie pétrolière et minière à publier leurs paiements aux gouvernements des pays producteurs, que l’Union européenne s’apprête à faire de même, la Suisse décide de ne rien décider, déplore la Déclaration de Berne. Le manque de transparence et de régulation prévalant en Suisse offre à des firmes peu scrupuleuses un refuge pour concourir à l’enrichissement de potentats au détriment des populations les plus pauvres de la planète, note la DB. L’Angola s’ajoute à une liste trop longue de cas où la Suisse est complice du pillage des ressources naturelles. Les autorités helvétiques doivent suivre leurs homologues américaines et européennes en légiférant.

L’enquête de la Déclaration de Berne est téléchargeable sous http://www.evb.ch/fr/p21098.html

(apic/com/mp)

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