Suisse: L’Université de Lucerne examine la possibilité d’un parlement musulman
Lucerne 23 octobre 2012 (Apic) Les musulmans de Suisse souhaitent pouvoir constituer une «oumma» suisse, et mettre sur pieds leur propre assemblée parlementaire. Le processus de mise en place d’une telle communauté religieuse islamique nationale demandera cependant encore du temps. Pour l’heure, la chaire de droit ecclésiastique de l’Université de Lucerne a reçu le mandat d’étudier la faisabilité d’une telle démarche, rapporte le 21 octobre 2012 le journal «Zentralschweiz am Sonntag».
Pour Adrian Loretan, professeur de droit canon et de droit ecclésiastique, l’étude d’un tel projet demandera au moins un an. Il faut examiner diverses questions de droit constitutionnel et ecclésiastique. Il s’agit de voir comment une religion telle que l’islam peut se mouvoir dans le système de démocratie directe que connaît la Suisse. En outre le statut de la communauté musulmane doit être en conformité avec les Constitutions des 26 cantons suisses, puisque la question religieuse est de la compétence des cantons.
Le mandat d’étude a été confié par les deux principales associations nationales de musulmans, la Coordination des organisations islamiques de Suisse (KIOS) et la Fédération d’organisations islamiques de Suisse (FOIS). Mais ces deux associations reconnaissent elles-mêmes représenter surtout la minorité des pratiquants soit environ 15% de l’ensemble des quelque 400’000 musulmans de Suisse en provenance de plus de 120 pays.
Le président de la KIOS, Farhad Afshar, est un des partisans de ce parlement musulman. Il prône la création d’une «oumma» suisse qui serait une corporation de droit public regroupant l’ensemble des musulmans de Suisse. A l’instar des Eglises chrétiennes, l’»oumma» suisse serait structurée au plan local, cantonal et fédéral. Elle serait gouvernée par un parlement national élu selon des procédures démocratiques.
Ce parlement serait l’équivalent des synodes des Eglises cantonales protestantes ou catholiques. Il pourrait également se prononcer sur des questions sociales et politiques, telles que le port du voile ou la mixité des cours de sport, relève Farhad Afshar.
Le Conseil central islamique suisse (CCIS), de Nicolas Blancho, formé notamment de Suisses convertis, de tendance plus intégriste, ne s’est pas associé à ce projet. Selon lui, la création d’une «oumma» suisse ne serait pas utile et pourrait être considérée comme une provocation par la population suisse. En outre, les musulmans sont très hétérogènes. Il y a en Suisse environ 300 associations musulmanes, le plus souvent regroupées par pays ou par ethnie, qui ne définissent pas l’islam de manière unitaire.
Selon le spécialiste des religions lucernois Samuel Behloul, une lutte pour la suprématie se déroule actuellement entre le Conseil central et les autres fédérations musulmanes. Le Conseil central islamique créé en 2009 est secoué par des tensions internes et a perdu en influence. Pour Samuel Behloul, l’idée d’une «Umma» suisse semble néanmoins prématurée car les musulmans de Suisse sont à peine organisés et ont des origines et des conceptions très différentes. (apic/job/mp)
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