Ils protestent contre l’interventionnisme des évêques

Canada: Les jeunes francophones boycottent les campagnes de «Développement et Paix»

Montréal, 22 octobre 2012 (Apic) Les jeunes Canadiens francophones boycotteront les prochaines campagnes de «Développement et Paix» (D&P), l’organisme catholique canadien pour le développement et la paix. Suite à «l’interventionnisme des évêques», ils annoncent qu’ils ne participeront pas à la campagne d’éducation lancée la semaine dernière, de même qu’à la prochaine campagne de Carême de partage, rapporte la radio chrétienne «Radio Ville-Marie».

Les jeunes protestent contre le fait que les évêques canadiens se sont opposés au lancement de la campagne d’éducation automnale de leur organisme «Développement et Paix «, la trouvant «trop politique». D&P, l’organisme officiel de solidarité internationale de l’Eglise catholique au Canada, également membre de Caritas Internationalis, avait décidé de reporter sa campagne et de la reformuler. D&P propose habituellement deux campagnes par années: une campagne d’éducation à l’automne, et une campagne de collecte de fonds pendant le Carême.

D&P victime de pressions politiques

La traditionnelle campagne d’automne, intitulée cette année «Agissons pour la justice», n’avait pourtant rien de révolutionnaire. Parmi le matériel éducatif qui n’a pas été déployé, il y avait notamment une carte postale destinée au Premier ministre canadien Stephen Harper, l’exhortant à repenser l’aide canadienne au développement, notamment en créant un comité parlementaire spécial chargé de réfléchir à l’avenir de cette aide.

D&P avait lui-même été lourdement pénalisé par les processus d’octroi de fonds par l’Agence canadienne de développement international (ACDI). L’organisme catholique, qui recevait 8 millions de dollars canadiens par année de la part du gouvernement, n’en reçoit plus que 3. La nouvelle, tombée en mars dernier, a fait mal à D&P, puisque l’apport gouvernemental constituait 40% de son budget annuel.

Dans une déclaration émise suite à la «Rencontre nationale jeunesse francophone» de D&P, qui s’est déroulé les 13 et 14 octobre à Montréal, plusieurs leaders jeunesse au sein de l’organisme ont fait état de leur «colère suite à la décision des leaders du mouvement d’annuler la campagne d’action de 2012». En guise de représailles, les jeunes annoncent qu’ils entendent boycotter la nouvelle campagne d’éducation que vient de lancer D&P, de même que la prochaine campagne de Carême de partage.

Sentiment de trahison exprimé par les jeunes francophones

Neuf représentants des jeunes de D&P étaient présents à cette assemblée des jeunes francophones. Ceux-ci venaient du Québec, du Manitoba et du Nouveau-Brunswick. Dans leur déclaration, ils font état de leur «souffrance» et de leur «colère» suite à la décision de ne pas lancer la première version de la traditionnelle campagne d’éducation automnale de l’organisme qui semblait trop politisée aux yeux de certains évêques canadiens.

«Cette décision de nos leaders mine la crédibilité du mouvement et nous rend presque impossible la tâche de recruter de nouveaux membres ou de maintenir la mobilisation dans nos groupes locaux jeunesse», peut-on lire dans la déclaration.

«Nous souffrons de la manière dont cette décision a été prise (…) Nous nous sentons trahis par les dirigeants de Développement et Paix. De plus, nous nous sentons impuissants à nous faire entendre. Notre foi dans le mouvement est gravement atteinte», insistent les représentants jeunesse de D&P.

Michael Casey, directeur général de D&P, a pris connaissance de la déclaration. Il reconnaît le droit des membres de l’organisme de s’exprimer, mais il préfère ne pas trop s’avancer pour l’instant. Le contenu de cette déclaration sera notamment abordé lors de la prochaine rencontre du Conseil national de D&P qui aura lieu lors du dernier week-end du mois de novembre, à Montréal.

Des attaques pilotées par les milieux conservateurs et «pro-vie»

Les attaques portées contre D&P par des milieux conservateurs et «pro-vie» ont trouvé un écho chez certains évêques canadiens. Ces milieux avaient notamment pris pour cible le «Centre Miguel Pro», un centre de protection des droits humains à Mexico auquel D&P, mis sous pression, a coupé les fonds.

Ce désaveu a incité les jésuites du Canada et du Mexique à prendre la défense de ce centre fondé par le jésuite Luis Arriaga. Ce printemps, l’archevêque d’Ottawa, Mgr Terrence Prendergast, avait, conjointement avec Michael Casey, fait annuler l’invitation comme conférencier adressée au Père Luis Arriaga, directeur du Centre PRODH, à Mexico.

Réaction face aux pressions des évêques mexicains

Les supérieurs jésuites du Canada français, du Canada anglais et du Mexique avaient salué en mai dernier «l’intégrité du travail» du Centre Miguel Pro pour les droits humains de Mexico (PRODH) et de son directeur, «un engagement porteur de l’enseignement social de l’Eglise catholique». Ils prenaient ainsi leurs distances de groupes qui accusent ce centre de contribuer à la «promotion de l’avortement au Mexique».

Le centre PRODH représente devant les tribunaux des victimes d’abus de pouvoir, de répression et d’injustice. D&P reconnaît que cette mission n’est en rien liée à l’avortement ou même à la contraception. Mais des évêques mexicains avaient soulevé des questions à ce sujet. Et c’est en considération de ces préoccupations au sein de «l’Eglise du Mexique» que l’archevêque d’Ottawa puis D&P ont mis fin à un partenariat datant de 1995. (apic/com/rvm/be)

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