Une figure emblématique de l’Eglise catholique au 20e siècle
Milan, 31 août 2012 (Apic) Le cardinal italien Carlo Maria Martini, jésuite, ancien archevêque de Milan et figure emblématique de l’Eglise catholique au 20e siècle, s’est éteint dans l’après-midi du 31 août 2012, à l’age de 85 ans. Il était atteint depuis plusieurs années de la maladie de Parkinson. En retraite depuis 2002, il avait ensuite passé 6 ans à Jérusalem avant d’être contraint de rentrer en Italie, du fait d’une dégradation de sa santé.
Le cardinal Martini n’en restait pas moins actif dans le débat sur l’Eglise et sur la foi dans le monde contemporain. Après sa mort, le collège cardinalice compte 206 membres, dont 118 électeurs en cas de conclave.
Sur la sonnette de son ›2 pièces’ à Gallarate, près de Milan, dans la maison jésuite où il résidait depuis 2008, le cardinal Martini avait préféré faire écrire «padre» plutôt que le «card.» qui lui revenait. Son caractère discret ne lui enlevait pas un grand charisme. Figure éminente de l’épiscopat italien, c’était un intellectuel passionné d’études bibliques, polyglotte – il maîtrisait une dizaine de langues – qui parlait avec franchise, liberté et audace.
Présenté comme un «papabile» par la presse lors du conclave d’avril 2005 qui a vu l’élection de Benoît XVI, le cardinal Martini, qui faisait figure de chef de file de l’aile «progressiste» de l’Eglise, a parfois été vu comme un «anti-Ratzinger». Mais malgré l’expression d’opinions parfois divergentes du magistère officiel de l’Eglise, l’obéissance du cardinal jésuite n’a jamais fait défaut au pape actuel ni à son prédécesseur.
Né à Turin le 15 février 1927, il est entré chez les jésuites à l’âge de 17 ans, et a été ordonné prêtre le 13 juillet 1952. Exégète de formation, Paul VI (1963-1978) l’a nommé, en 1969, recteur de l’Institut biblique, où il est resté jusqu’en 1978, puis de l’Université pontificale Grégorienne. Cette année-là, il a prêché la retraite de carême au Vatican.
En 1980, Jean Paul II l’avait nommé archevêque de Milan, le plus grand diocèse d’Europe. Il y a affronté la période de terrorisme des années 1980, lorsque la ville était aux prises avec la violence des Brigades rouges. Il s’est fait connaître comme un pasteur proche de ses fidèles, sensible aux maux des grandes villes. En même temps, il a beaucoup écrit. Des lettres pastorales très prisées, mais aussi de nombreux livres, – au total une quarantaine -, notamment sur la Bible, dont des best-sellers traduits en plusieurs langues.
Créé cardinal en 1983, il était à l’époque l’un des 7 cardinaux du secrétariat général du Synode des évêques, chargé de conseiller toutes les assemblées synodales. Par ailleurs, de 1986 à 1993, il a présidé le Conseil des Conférences épiscopales européennes et, à ce titre, la première Rencontre oecuménique européenne de Bâle (Suisse), en 1989.
Exégète avant tout, le vœu le plus cher du cardinal Martini était de partir à Jérusalem dès sa retraite, qu’il a prise en juillet 2002. Cette année-là, il a annoncé qu’il était atteint de la maladie de parkinson. Il a alors passé une grande partie de son temps près du Mont des Oliviers, à prier et à étudier la Bible. Ce lien avec la Ville Sainte a toujours été très fort pour le cardinal jésuite. Il est revenu en Italie en 2008, se retirant dans une maison d’études des jésuites, à Gallarate, au Nord-Ouest de Milan.
Le cardinal Martini avait longtemps été le favori des catholiques ›progressistes’, qui voyaient en lui un cardinal désireux d’opérer des changements sur les points les plus controversés de l’enseignement de l’Eglise, comme l’interdiction de la contraception ou encore de l’ordination des femmes.
Personnage audacieux, il aimait évoquer les possibilités de «développement» de la doctrine catholique. Ainsi, à l’automne 1999, au cours du Synode pour l’Europe au Vatican, il avait affirmé qu’il était nécessaire de repenser la primauté du pape, et avait appelé à un instrument permettant aux évêques de résoudre ensemble les problèmes du jour.
Il n’a jamais perdu sa volonté d’intervenir dans les débats qui agitent l’Eglise et la société. En avril 2006, dans un magazine italien, le cardinal avait ainsi qualifié le préservatif de «moindre mal» dans certains cas. Il avait aussi ouvert la porte à la fécondation assistée et à l’adoption d’embryons congelés par des femmes seules, mettant la curie romaine dans l’embarras. En janvier 2007, il était sorti à nouveau de sa réserve alors que l’Eglise italienne se prononçait contre l’euthanasie et venait de refuser des obsèques religieuses à un homme dont un médecin, à la demande du patient, avait accéléré la mort. Le cardinal Martini n’avait alors pas hésité à appeler l’Eglise à «plus d’attention pastorale» face à cette question.
Depuis 2009, il tenait une rubrique sur le quotidien Il Corriere della Sera, l’un des plus diffusés dans la péninsule, dans laquelle il échangeait avec les lecteurs sur des thèmes relatifs à la foi sur une page qui lui était réservée 2 fois par mois. Il avait dû interrompre cette collaboration au début de l’été, son état de santé s’étant dégradé. Le cardinal Martini avait alors écrit aux lecteurs en disant que l’heure était venue pour lui de se retirer encore davantage des «choses terrestres» et de se préparer au prochain «avènement du règne».
Malgré de grandes difficultés à s’exprimer, Carlo Maria Martini est resté lucide presque jusqu’à la fin de ses jours. Au mois de juin dernier, lors de la visite de Benoît XVI à Milan, les 2 hommes s’étaient rencontrés en privé. Le cardinal jésuite avait assuré le pape de ses prières dans le contexte difficile des ›Vatileaks’, cette «lourde croix» à porter. (apic/imedia/mm/bb)
webmaster@kath.ch
Portail catholique suisse
https://www.cath.ch/newsf/une-figure-emblematique-de-l-eglise-catholique-au-20e-siecle/