RDC: Une étude d’ONG suisses dénonce les activités de Glencore en Afrique

Le profit avant tout, au détriment des droits humains et de l’environnement

Lausanne, 16 avril 2012 (Apic) Action de Carême et Pain pour le prochain accusent Glencore de générer des profits au détriment des droits humains et de l’environnement en Afrique. Dans une nouvelle étude, les ONG suisses reprochent au groupe zougois, numéro un mondial du négoce de matières premières, de ne pas se soucier des mauvaises conditions de travail et de l’exploitation des enfants.

Action de Carême et Pain pour le prochain, en collaboration avec des ONG congolaises, ont évalué durant six mois l’impact des activités de Glencore en République Démocratique du Congo (RDC). Le bilan de ce rapport est inquiétant: «rachat de minerais extraits par des mineurs de moins de 17 ans dans des conditions déplorables à Tilwezembe, pollution massive de cours d’eau à Luilu, un dialogue lacunaire, voire inexistant avec les communautés affectées, ou encore stratégies d’optimisation fiscale qui font perdre des millions de dollars au fisc congolais».

Une mine «dormante» occupant 1’600 mineurs

L’étude publiée le 15 avril 2012 s’intéresse aux activités au Katanga, plus particulièrement à la mine à ciel ouvert de Tilwezembe, à 40 km de Kolwezi, dont la concession est en main de la société Kamoto Copper Company (KCC), une filiale de la société zougoise. Dans un rapport de 2011 de Glencore, la mine est déclarée «inactive» et «dormante». Ce que contestent les ONG suisses: «près de 1’600 mineurs artisanaux y extraient du cuivre et du cobalt des sous-sols». «Plus du tiers» d’entre eux sont des enfants de moins de 17 ans.

L’étude démontre aussi «qu’une partie de la matière première… arrive à différents intermédiaires», dont la société Glencore Mopani en Zambie, détenue à 73% par Glencore. La firme zougoise conteste cette analyse: «KCC n’est pas impliqué dans les activités minières actuelles de Tilwezembe et ne rachète aucun minerai de ces opérations».

Conditions de travail déplorables et importants dégâts environnementaux

Les conditions de travail et de vie sont déplorables. Il faut creuser «entre 25 et 80 mètres, les puits n’ont pas de structure de sécurité». Les risques d’éboulements sont grands. En cas d’accident, «les mineurs ne reçoivent aucun dédommagement des négociants et avec leur salaire, ils peinent à payer l’hôpital ou des frais médicaux», indique le rapport des ONG. Les conditions d’hygiène sont aussi source de nombreuses maladies. «Il n’y a aucune mesure d’hygiène et de santé, pas d’eau ni de toilettes», témoigne un travailleur. Les mineurs «boivent de l’eau impropre à la consommation».

Le salaire est maigre: 200 dollars par mois en moyenne, précise le rapport. Sur place le négociant Misa Mining sous-évalue le taux de change, la teneur et le poids des minerais. Conscients de la manœuvre, les mineurs «ne peuvent pas aller vendre leurs minerais à d’autres comptoirs». Car Misa Mining détient le monopole à Tilwezembe et «fait arrêter tout mineur soupçonné de quitter la carrière avec du cuivre ou du cobalt».

L’étude pointe aussi les importants dégâts environnementaux dont sont responsables des filiales de Glencore. «L’enquête met à jour une pollution massive de la rivière par l’usine hydro-métallurgique de Luilu. L’analyse effectuée en laboratoire révèle un pH de 1.9». En Suisse, le seuil admis se situe entre 6.5 et 9. L’usine rejette de l’acide pratiquement pur dans la rivière. Cette pollution constitue un risque d’extinction pour la faune et la flore aquatique de la région. «Elle rend aussi l’eau impropre à la consommation».

Reconnaître ses responsabilités

«Nous exigeons que les responsables de Glencore reconnaissent les problèmes existants et montrent clairement ce qu’ils entendent entreprendre pour les résoudre», déclare Chantal Peyer de Pain pour le prochain, rédactrice de l’étude. Pour elle, il est urgent que la firme zougoise cherche le dialogue avec les communautés concernées au Congo et mette en place des mesures concrètes pour améliorer les conditions de vie, notamment l’accès à l’eau potable des communautés affectées.

Une politique fiscale transparente doit également être mise en place. «Des multinationales telles que Glencore doivent publier ouvertement leur compte par pays, afin qu’il soit établi de façon transparente quels impôts elles paient (ou ne paient pas)», estime François Mercier de l’Action de Carême, corédacteur de l’étude. «Si le secteur minier au Congo était correctement fiscalisé, les recettes qui en résulteraient dépasseraient l’aide humanitaire à disposition du pays», conclut-il.

Ce cas révèle le manque de cadre politique et légal en Suisse, pour encadrer les activités des entreprises transnationales. Des modifications sont nécessaires pour obliger juridiquement les maisons mères, établies en Suisse, à éviter toutes violations des droits humains et de l’environnement par leurs filiales à l’étranger, défendent les ONG. Ces revendications sont au cœur de la campagne «Droit sans frontières» (www.droitsansfrontieres.ch), réunissant plus de cinquante ONG et syndicats, dont Action de Carême et Pain pour le prochain. (apic/com/ggc)

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