L’évangélisation par la pub
Yaoundé, 10 décembre 2011 (Apic) Les nouvelles Eglises ne cessent de proliférer au Cameroun. Elles tentent d’attirer les fidèles à grand coup d’annonces publicitaires dans les médias et de campagnes d’affiches dans les principales villes du pays. Une opération de séduction diversement perçue par la population, rapporte «Radio Nederland» sur son site internet www.rnw.nl.
A Yaoundé, Eglises et entreprises se disputent les encarts publicitaires situés aux endroits stratégiques de la capitale. Sur les affiches géantes, pasteurs évangélistes et autres «prophètes» côtoient les logos des multinationales. Des programmes d’évangélisation sont diffusés sur les ondes radio et sur les télévisions privées. De petites chaînes de télévision religieuses voient aussi le jour. Elles s’appellent «Jésus télévision», «Gloire TV», «Gospel TV», «Fréquence vie radio», «Christ» ou encore «Muslim TV». Elles sont au service de mouvements religieux comme «Ministère va et raconte», «Ministère international prophétique arc-en-ciel» et «Eglise des rachetés de Dieu».
Pour le «prophète» Dieunedor Kamdem, parler de publicité n’est pas le mot approprié. Il s’agit plutôt de communication. «Notre but est de faire savoir au plus grand nombre que Jésus est le même hier, aujourd’hui et éternellement, qu’il ne change pas, qu’il n’a que pour mission de transformer et de changer des vies», explique-t-il. «L’Eglise est la plus à même de communiquer parce que nous apportons le message de salut à toutes ces personnes. Nous ne sommes pas là pour faire de la publicité pour une personne ou pour une Eglise. Nous sommes là pour parler de Jésus.».
Cet avis est partagé par l’évangéliste Aimé Moussounga, pour qui les médias sont «des atouts que la science nous donne» et dont il faut savoir profiter. L’homme dénonce cependant les méthodes de certains pasteurs: «Il est déplorable de voir des vendeurs d’illusions bluffer les âmes en prêchant les miracles sur les chaînes de télévision. La télévision devient un moyen de se faire un nom et d’arnaquer les gens, puisqu’on vend des miracles. Il ne faut pas prêcher le miracle, mais plutôt la parole de Dieu», insiste-t-il.
Pour le cheikh Abdel Karim, imam à la mosquée d’Essos à Yaoundé, la religion n’est pas un objet de propagande. Il rappelle qu’on n’a «pas de besoin de faire de la publicité pour adorer Dieu. Dieu, c’est du sérieux». «Chaque jour, des gens se convertissent à l’islam alors que nous ne faisons aucune propagande sur les chaînes de télévision, sur les ondes radios ou encore via des affiches», fait-il observer.
Christelle Talla, une étudiante, estime quant à elle que ces Eglises ne sont rien d’autre que des lieux où le maraboutisme utilise la Bible à son avantage. «Au gré de leurs intérêts, les prédicateurs manipulent leurs ouailles et vont parfois jusqu’à les déposséder de tous leurs biens. Ces églises devraient plutôt imiter Jésus, qui ne faisait aucune publicité, mais qui agissait au contraire en toute discrétion.»
Dans un pays où le chômage, la pauvreté et les injustices sont le lot quotidien des populations, les faiseurs de miracles et autres pasteurs qui organisent des cérémonies de «délivrance» trouvent un terrain fertile. La prolifération de nouvelles Eglises en est une excellente illustration. (apic/rnw/ibc)
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