Quatre banques suisses ont enfreint la réglementation en matière de blanchiment
Berne, 10 novembre 2011 (Apic) L’enquête de l’Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA) sur l’argent des potentats d’Afrique du Nord – qui pointe du doigt quatre banques suisses qui ont enfreint la réglementation en matière de blanchiment – déçoit les ONG suisses. Les ONG auraient aimé connaître le nom des banques qui ont failli à leur devoir de diligence.
La coalition d’ONG contre l’argent des potentats, dont Alliance Sud, critique les lacunes et les conclusions de l’enquête de la FINMA sur les avoirs bloqués en Suisse suite au «printemps arabe». La FINMA a engagé une procédure à l’encontre de ces banques, qui pourrait aboutir à des sanctions. Les noms de ces établissements n’ont pas été rendus publics. L’Autorité de surveillance leur reproche des «manquements graves» aux règles de surveillance. En raison du «printemps arabe» qui a fait tomber les dictateurs en Tunisie, en Egypte et en Libye, le Conseil fédéral a ordonné le blocage de 830 millions de francs de fonds qui leur étaient liés.
Une coalition de sept ONG suisses – à savoir Action de Carême, Action place financière suisse, Alliance Sud, Déclaration de Berne, Pain pour le Prochain et Transparency International –
a jugé jeudi que l’enquête de la FINMA comportait des «lacunes importantes». Elle demande que le dispositif de lutte contre le blanchiment d’argent soit renforcé. Mais la coalition d’ONG contre l’argent des potentats déplore que le rapport de la FINMA n’indique pas quelles relations d’affaire ont été examinées et lesquelles sont problématiques. Ainsi, il est impossible de se faire une opinion sur le comportement effectif des banques, estiment les ONG. Contrairement à ce qu’affirme la FINMA, elles pensent que le dispositif de lutte contre les avoirs illicites doit être amélioré.
En février 2011, la FINMA avait promis d’enquêter sur les raisons pour lesquelles les avoirs suspects des dictateurs déchus d’Afrique du Nord avaient pu aboutir sur des comptes suisses. Un rapport devait éclairer les lacunes existant dans le dispositif destiné à empêcher l’afflux d’avoirs illicites de potentats. Selon la FINMA, les banques auraient en majorité respecté leurs devoirs de diligence et il n’y aurait pas besoin d’améliorer le dispositif légal réglant les procédures en matière d’argent des potentats.
Pourtant, les enquêtes menées par la FINMA sont lacunaires, affirment les ONG. L’autorité de surveillance s’est contentée d’examiner le comportement des banques qui avaient elles-mêmes bloqué et signalé des fonds suspects après que le Conseil fédéral eût promulgué des ordonnances de blocage. Il aurait été tout aussi important de faire de telles recherches auprès de banques n’ayant pas annoncé de comptes suite au blocage du Conseil fédéral. «Ce n’est qu’à ce prix que des omissions volontaires de déclarer auraient pu être repérées», relève la coalition d’ONG.
Par ailleurs, le rapport se préoccupe uniquement des fonds des personnes dont le nom figure sur les listes publiées par le Conseil fédéral. L’autorité de surveillance n’a pas cherché à savoir si d’autres fonds placés par des hommes de paille ou par des sociétés offshore auprès de banques suisses avaient été passés sous silence. Le rapport n’indique par ailleurs pas quelles sont les relations d’affaire qui ont été examinées et lesquelles sont problématiques. «Ces informations auraient été nécessaires pour savoir si les banques avaient effectivement essayé sérieusement de refuser l’argent de la corruption».
Les ONG ont de la peine à comprendre les raisons pour lesquelles la FINMA conclut qu’en définitive il n’y a pas de raisons de renforcer le dispositif de lutte contre les avoirs illicites. Bien avant le «printemps arabe», soulignent-elles, il était de notoriété publique que Belhassen Trabelsi, le beau-frère de l’ex-président tunisien Ben Ali et l’ensemble du clan Trabelsi, étaient corrompus. Si les dispositions de la Loi sur le blanchiment d’argent relatives aux avoirs illicites de personnes politiquement exposées étaient réellement destinées à empêcher l’afflux en Suisse d’argent provenant de la corruption et volé aux populations des pays d’origine, insistent les ONG, «alors les banques concernées auraient dû annoncer et bloquer les sommes de Belhassen Trabelsi bien avant l’ordonnance du Conseil fédéral». (apic/com/be)
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