Difficile existence de l’Eglise catholique dans le pays

Chine: Trois prêtres ordonnés par un évêque «officiel» illégitime

Nantong, 3 novembre 2011 (Apic) Trois jeunes diacres du diocèse de Shantou, dans la province du Guangdong, ont été ordonnés prêtres en la cathédrale du Bon Pasteur à Nantong, diocèse de Haimen, dans la province du Jiangsu située à 1400 km de Shantou. La cérémonie a eu lieu le 27 octobre dernier et était présidée par deux évêques «officiels» reconnus par Rome, à savoir l’évêque de Pékin, Mgr Joseph Li Shan, et l’évêque du lieu, Mgr Joseph Shen Bin. La messe s’est déroulée en l’absence de Mgr Joseph Huang Bingzhang, ordonné évêque de manière illicite – car sans mandat pontifical – le 14 juillet dernier à Shantou, annonce l’agence de presse catholique «Eglises d’Asie», le 3 novembre 2011.

Cinq prêtres ont été ordonnés le 27 octobre à Nantong : trois diacres de Shantou, Chen Zifa, Wang Feijing et Zeng Qingyao, et deux diacres appartenant au diocèse de Haimen.

En apparence, l’ordination des trois prêtres de Shantou permet de résoudre un certain nombre des difficultés qui découlent du fait que l’évêque auquel ils se rattachent s’est placé en dehors de la communion ecclésiale en acceptant d’être ordonné évêque sans l’accord de Rome. Il semble toutefois que cette ordination soulève plus de questions qu’elle n’apporte de réponses, notent les observateurs.

Un évêque exposé à excommunication

En effet, deux jours après l’ordination le 14 juillet dernier de Mgr Huang Bingzhang, le Saint-Siège avait rendu public le fait que le Mgr Huang s’était de lui-même exposé à une peine d’excommunication et qu’il n’avait donc pas autorité à diriger la communauté catholique de son diocèse. Concrètement, selon le droit canon, Mgr Huang ne peut célébrer l’eucharistie, administrer aucun sacrement ou bien encore exercer les fonctions ministérielles attachées à son ministère ; tous les actes qu’il serait amené à prendre dans le cadre de son diocèse sont entachés de nullité.

Selon des sources ecclésiales locales, Mgr Huang, conscient des sanctions qui pèsent sur lui, n’a pas voulu que les conséquences de ses actes retombent sur les séminaristes de Shantou et que ceux-ci se trouvent dans une situation qui les empêche de devenir prêtre. Il aurait donc, toujours selon ces sources, trouvé un accord avec l’évêque de Haimen et l’évêque de Pékin, tous deux vice-présidents des structures nationales «officielles» de l’Eglise, comme Mgr Huang Bingzhang, pour que ce soient eux qui confèrent l’ordination sacerdotale aux trois jeunes diacres. Cité par l’agence Ucanews, une de ces sources explique que le P. Huang «a probablement pris en compte les circonstances dans lesquelles se trouvent ces jeunes et il a voulu desserrer la contrainte psychologique qui pèse sur eux en renouant avec une pratique adoptée par un de ses prédécesseurs». Evêque de Shantou de 1981 à sa mort en 1997, Mgr John Cai Tiyuan, dont le mandat épiscopal n’était pas reconnu par Rome, n’a ordonné aucun des vingt prêtres qui ont accédé au sacerdoce du temps de son épiscopat dans son diocèse.

En réalité, à considérer de plus près tant le droit canon que le contexte entourant les ordinations sacerdotales du 27 octobre, il semble que l’accès au sacerdoce de Chen Zifa, Wang Feijing et Zeng Qingyao n’aille pas de soi.

Complexités de l’Eglise officielle et de l’Eglise souterraine

Concernant le contexte des ordinations, selon les informations qui sont parvenues à l’agence «Eglises d’Asie», au moins deux autres séminaristes du diocèse de Shantou ayant terminé leur formation auraient pu être ordonnés. Or, il semble que ces deux séminaristes n’ont pas souhaité accepter l’ordination sacerdotale dans les conditions qui ont été celles du 27 octobre. En agissant ainsi, ils se sont démarqués des trois nouveaux prêtres qui apparaissent comme étant proches de Mgr Huang Bingzhang. A titre d’exemple, Chen Zifa, Wang Feijing et Zeng Qingyao, qui avaient déjà été ordonnés diacres, ont participé à l’ordination illicite du 14 juillet à Shantou.

Du point de vue canonique, les informations disponibles ne permettent pas de dire si le droit de l’Eglise a été respecté pour ces ordinations sacerdotales. En effet, dans l’hypothèse où un séminariste n’est pas ordonné par son évêque, il doit recevoir de lui des «lettres dimissoriales», ce courrier par lequel un évêque ou un administrateur diocésain autorise un autre évêque à conférer les ordres sacrés à l’un de ses diocésains. Dans le cas d’espèce, si ces lettres ont été signées par Mgr Huang Bingzhang, elles sont entachées de nullité en raison de la sanction d’excommunication qui le frappe et du fait qu’il n’est canoniquement pas l’ordinaire du lieu. Pour qu’elles soient valides, ces lettres doivent été signées par le vieil évêque de Shantou, Mgr Pierre Zhuang Jianjian, évêque titulaire nommé par le pape mais non reconnu par le gouvernement. La deuxième question qui se pose est celle de la communion des deux évêques ordinants, l’évêque de Haimen et l’évêque de Pékin, qui, du fait qu’ils ont pris part aux cérémonies d’ordination épiscopale illicite de ces derniers mois, sont eux aussi frappés d’une peine d’excommunication. Dans un cas de figure comme dans l’autre, un canoniste est donc en mesure de s’interroger sur la licéité des ordinations sacerdotales ainsi conférées, ce qui ne fait qu’amplifier le trouble dans le diocèse de Shantou, aussi bien au sein de la communauté des prêtres que de celle des laïcs. (apic/eda/js)

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