Entretien avec Brigitte Gobbé avant les rencontres pour la Paix des 29 et 30 octobre à St-Maurice (VS)
Saint-Maurice, 27 octobre 2011 (Apic) A deux jours du «Concert des Religions» commémorant le 25ème anniversaire de la rencontre d’Assise, cath.ch s’entretient avec Brigitte Gobbé, animatrice du Souffle d’Assise et coordinatrice de l’évènement. Ces réjouissances œcuméniques et interreligieuses pour la paix se veulent parfaitement intergénérationnelles.
Cath.ch: Madame Gobbé, en plus d’être interreligieuse, cette rencontre pour la paix sera intergénérationnelle, est-ce là le pari de réunir tout le monde?
Brigitte Gobbé: Le samedi à partir de 18h30, il y aura une rencontre spéciale jeunes de 16 à 25 ans, quelque chose de tout à fait nouveau que nous n’avions pas vécu il y a cinq ans. Nous ne voulions pas seulement inviter les jeunes à venir à notre rencontre d’adultes; ils auront une vraie rencontre interreligieuse à eux. L’animation a été confiée à Joëlle Carron, responsable de la jeunesse dans le canton de Vaud. Ils nous rejoindront ensuite le samedi soir lors de la marche pour la Paix. Les enfants sont aussi accueillis, avec des ateliers de 0 à 12 ans et un programme particulier pour les 12-15 ans. Nous voulions quelque chose d’intergénérationnel, en évitant de s’enfermer dans des démarches structurelles.
Cath.ch: Et que réservez-vous aux moins jeunes? Votre programme annonce une rencontre oecuménique le samedi, devenant interreligieuse le dimanche.
B.G.: Nous aurons une célébration oecuménique à 17h30, à la Basilique de l’Abbaye de St-Maurice, mais l’interreligieux commence déjà le samedi soir avec la marche pour la paix. Elle se déroulera aux flambeaux à travers les rues et les places de St-Maurice. Des membres des différentes traditions liront des textes pendant que des gestes symboliques seront posés… hmm, je peux pas en dire plus…
Cath.ch: A découvrir!
– … à découvrir, répète Brigitte Gobbé en souriant. Puis il y aura une partie musicale. La musique sera notre fil rouge pendant les deux jours, parce qu’elle nous permet de découvrir un peu plus les autres religions autrement que par les aspects conceptuels ou théoriques. On s’aperçoit que la musique ne joue pas le même rôle suivant les traditions. Par exemple, chez les musulmans, le Coran n’est jamais chanté. Jamais on ne chante dans une mosquée, c’est très différent de nos pratiques.
Cath.ch: Comment faites-vous alors pour la célébration?
B.G.: Attention, la célébration du samedi est oecuménique, entre chrétiens. Il n’y a pas de célébration interreligieuse; c’est impossible. Par contre, dans l’interreligieux, nous aurons le dimanche matin une table ronde consacrée à la musique au coeur des différentes traditions et l’après-midi, le concert des religions, au théâtre du Martolet, à 14h30, suivi du bouquet final. Des groupes se produiront jouant de la musique juive, musulmane, notamment algérienne et tunisienne, nous aurons aussi le privilège d’entendre l’Octuor Vocal de Sion, dirigé par François-Xavier Amherdt.
Cath.ch: Donc le concert serait le moyen d’harmoniser la variété des couleurs religieuses oeuvrant toutes pour un arc-en-ciel de paix.
B.G.: Jean Paul II a eu le geste prophétique de vouloir rassembler des acteurs de différentes traditions, de manière publique, dans un même espace, à la même heure. C’était en 1986, année de la paix proclamée par les Nations Unies, alors que nous étions en pleine guerre froide. C’était une période où l’on pensait que les religions allaient mourir de leur belle mort, avec l’idée que de toute façon elles n’étaient pas au service de la paix, mais de la guerre. Jean Paul II a voulu montrer au monde que toutes les religions ont un projet de paix. Simplement les hommes qui sont dans ces religions sont comme tout être humain, traversés par la violence. Vous savez que dans le mot «violence», il y a le mot «vie» et le mot «viol».
Le dialogue doit faire place à la courtoisie, au désir d’amitié car ce que nous avons en commun est plus important que ce qui nous sépare. Nous avons en commun d’être des frères en humanité. A partir de notre condition humaine, nous pouvons envisager comme François d’Assise en pleine Croisade, un dialogue pour la paix. Attention toutefois à ne pas confondre conflit et violence. Etre en dialogue ne signifie pas absence de conflit. Le conflit existe quand on n’est pas d’accord, ce qui n’empêche pas de se respecter et d’éviter que tout dégénère en violence. Mais être en dialogue ne signifie pas avoir la langue de bois et toujours dire c’est beau, c’est bien, c’est gentil. On peut au contraire avoir des discussions vives. Justement parce que nous ne sommes pas indifférents à l’autre et que l’on ne cherche pas à mettre la main sur lui.
Cath.ch: Cette fin de semaine à St-Maurice nous faisons la paix, nous commémorons un geste prophétique initié par Jean Paul II, et ensuite, à partir de dimanche soir n’aurons-nous plus rien à partager jusqu’au prochain jubilé dans 5 ans?
B.G.: Non. Après le message pour la paix, l’envoi depuis la place du Parvis, on tient à continuer l’évènement interreligieux pendant une année avec des rencontres, des séminaires, ici au Foyer Franciscain. On ne veut pas d’un évènement prétexte et qu’ensuite l’on n’entende plus parler d’interreligieux. C’est la vocation franciscaine de servir le dialogue des religions. Notre structure baptisée le Souffle d’Assise porte ce projet. Il y a une petite chose que j’aimerais vraiment mettre sur pieds. Ce serait de permettre que ce ne soit pas toujours les chrétiens, surtout les catholiques, qui invitent à un évènement du dialogue, mais que se constitue un petit groupe de prière-méditation avec des gens de chaque tradition. Ils feraient vivre la réalité interreligieuse chaque mois ou même chaque semaine et porteraient le 30ème anniversaire de la rencontre d’Assise. (apic/pf/js)
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