Des réfugiés soudanais à la frontière avec le Soudan du Sud, mai 2023 | © Keystone/Peter Louis/WFP via AP
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Violences contre des réfugiés au Soudan du Sud, Mgr Ameyu appelle au calme

Les meurtres présumés de 29 sud-soudanais réfugiés au Soudan, pays déchiré depuis avril 2023 par une nouvelle guerre civile dévastatrice, ont déclenché de lourdes représailles au Soudan du Sud. Le cardinal Stephen Ameyu, de Djouba, a appelé son peuple à la retenue et à la compassion.

Lucienne Bittar, à Rome

Les violences ont éclaté au Soudan du Sud après l’apparition d’une vidéo montrant des soldats des forces armées soudanaises qui auraient tué 29 civils sud-soudanais dans la ville de Wad Madani, capitale de l’État de Gezira, dans le centre du Soudan. Selon la BBC, les meurtres auraient eu lieu sur une base ethnique et des enfants figuraient parmi les victimes.

Aussitôt des commerces tenus par des Soudanais ont été pris pour cible et pillés à Djouba, capitale du Soudan du Sud. Les violences visant les ressortissants du pays voisin se sont ensuite propagées à travers le pays, touchant quatre États différents.

Selon des rapports locaux, 16 Soudanais ont été tués au Soudan du Sud et des dizaines d’autres ont été blessés lorsque les forces de sécurité ont affronté des jeunes armés de machettes et de gourdins.

Mettre fin au cycle de la vengeance

«Le meurtre de sang-froid de citoyens innocents du Soudan du Sud est un acte odieux que nous devons condamner sans réserve en tant qu’Église unie et société compatissante. Une telle violence, enracinée dans la haine et l’oppression, n’a pas sa place parmi nous», a déclaré le cardinal Ameyu, président de la Conférence des évêques catholiques du Soudan et du Sud-Soudan.

Mais il a aussi appelé son «cher peuple du Soudan du Sud à faire preuve de retenue et de compassion». «Bien que la douleur et la colère découlant de ces événements soient compréhensibles, nous vous implorons de ne pas chercher à vous venger des réfugiés qui se trouvent dans notre pays.»

Le cardinal-archevêque de Djouba a encore déclaré que ces actes de violence, générés par des régimes et des systèmes oppressifs, déshumanisent les individus en raison de leur appartenance ethnique, de leurs croyances et de leurs affiliations politiques.

«Nous sommes fiers de l’esprit d’unité et de résilience qui caractérise notre communauté sud-soudanaise. Ensemble, nous devons travailler à la guérison et à la reconstruction, en favorisant un environnement où chaque individu peut se sentir en sécurité et valorisé, quelle que soit son origine», a-t-il déclaré.

Le gouvernement du Soudan du Sud, pour sa part, a imposé un couvre-feu nocturne dans tout le pays pour endiguer la propagation de la violence. Les autorités ont entamé le transfert des réfugiés soudanais vers le camp de Gorom près de la capitale. Cette communauté vulnérable est déjà très marquée et traumatisée par la nouvelle guerre au Soudan qui dure depuis bientôt deux ans. Elle a plongé dans la famine 638’000 personnes, fait plus de 24’000 morts et contraint au déplacement plus de 3 millions de personnes.

Du sel sur des plaies non encore refermées

Ces dernières attaques entre Soudanais et Soudanais du Sud ravivent aussi, et surtout, les souvenirs de décennies de lutte au Soudan entre le Nord, islamique, et le Sud, chrétien et animiste, avant que cette région ne devienne en 2011 un État indépendant.

Les tensions actuelles sont aussi inquiétantes au vu de l’instabilité chronique qui mine le Soudan du Sud et des tensions ethniques sous-jacentes qui y persistent. Le pays peine à se reconstruire et à pacifier les relations entre ses différentes composantes. (cath.ch/ag/lb)

Des réfugiés soudanais à la frontière avec le Soudan du Sud, mai 2023 | © Keystone/Peter Louis/WFP via AP
23 janvier 2025 | 15:39
par Lucienne Bittar
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