«Vatileaks 2»: La défense obtient l’examen de nouvelles preuves et la comparution de témoins
Le procès dit «Vatileaks 2», dans lequel cinq personnes sont poursuivies pour avoir divulgué des informations confidentielles sur la gestion financière du Vatican, a repris le 7 décembre 2015.
Lors d’une audience de près de deux heures, la défense a obtenu l’examen de certaines preuves et la possibilité d’entendre plusieurs témoignages.
Les juges ont en revanche rejeté les objections d’une prévenue contestant le fait d’être jugée au Vatican et non en Italie.
Les cinq prévenus étaient tous présents à cette audience: l’Espagnol Mgr Lucio Angel Vallejo Balda, les laïcs italiens Francesca Chaouqui et Nicola Maio, tous trois anciens membres ou collaborateurs de la Commission d’étude sur l’organisation économico-administratives du Saint-Siège (COSEA), et les deux journalistes italiens Emiliano Fittipaldi et Gianluigi Nuzzi.
Le collège des juges a d’abord écouté les avocats de la défense qui ont fait une requête d’exception, mais aussi plusieurs demandes d’examen des preuves et d’admission de témoins. Le promoteur de justice a émis quelques réserves sur certains témoins, puis le collège s’est retiré pendant une heure pour délibérer.
Francesca Chaouqui se prétend «réfugiée politique» en Italie
La requête d’exception a été sollicitée par l’avocate de Francesca Chaouqui, pour «manquement de juridiction du Tribunal», au motif que les faits reprochés à sa cliente seraient advenus en Italie, et non au Vatican, et que sa cliente s’était déclarée «réfugiée politique» en Italie. Cette demande a été rejetée par le collège.
Celui-ci a expliqué que la loi actuellement en vigueur au Vatican (votée en 2013 après la première affaire «Vatileaks») permettait au Tribunal de l’Etat de la Cité du Vatican de juger toute personne ayant commis un délit, y compris hors de son territoire, du moment que cette personne avait travaillé pour le petit Etat. Son statut de «réfugiée politique» n’a pas non plus été pris en compte: la prévenue s’est déjà rendue aux interrogatoires du tribunal ces derniers jours, reconnaissant de fait la juridiction du Vatican.
Expertise psychologique rejetée
L’avocat de Mgr Vallejo Balda avait demandé une expertise psychologique de son client, espérant ainsi prouver qu’il n’était pas stable psychologiquement au moment des faits. Cette demande a été rejetée. Le système juridique du Vatican permet des expertises psychiatriques», mais non «psychologiques»«, a expliqué le promoteur de justice.
L’avocat a en revanche obtenu une réponse favorable à sa demande d’étudier, en guise de preuve, une expertise psychiatrique de Mgr Vallejo Balda déjà établie par le passé.
Le cardinal Parolin, témoin de Francesca Chaouqui
Toutes les autres demandes ont été approuvées. L’avocat de Mgr Vallejo Balda a ainsi obtenu la possibilité d’examiner certaines preuves, à savoir des courriels auxquels l’instruction fait référence, mais aussi des SMS, et des conversations avec Francesca Chaouqui via l’application Whatsapp.
Récemment, la presse italienne avait fait état de conversations sur Whatsapp où la jeune femme faisait des propositions à caractère sexuel au prélat espagnol. L’avocate de Francesca Chaouqui a assuré que ces conversations étaient tronquées et qu’elle souhaitait faire réaliser une expertise informatique sur les ordinateurs et téléphones saisis par la justice. Le promoteur de justice a donné son accord, à condition qu’il y ait une contrexpertise. Une audience à huis clos aura lieu pour évaluer ce qui sera retenu dans les actes d’accusation.
Le procès renvoyé à une date ultérieure
Toutes les demandes de témoignages ont finalement été acceptées. Francesca Chaouqui pourra ainsi disposer de témoins ecclésiastiques de haut rang, parmi lesquels le cardinal Abril y Castelló, président de la commission cardinalice de surveillance de l’Institut pour les œuvres de religion (IOR), l’aumônier du pape, Mgr Konrad Krajewski, et même le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’Etat du Saint-Siège. Il n’est pas impossible que le ›numéro 2’ du Saint-Siège fasse cependant valoir son immunité afin de ne pas témoigner.
Mgr Vallejo Balda pourra, lui, bénéficier du témoignage de Mgr Alfredo Abbondi, fonctionnaire de la Préfecture des affaires économiques du Saint-Siège. Le journaliste italien Emiliano Fittipaldi n’a pas demandé de témoins, mais simplement la prise en compte de trois articles de «L’Espresso» attestant de son statut de journaliste d’investigation.
Le journaliste Gianluigi Nuzzi disposera pour sa part de plusieurs témoignages, notamment de personnalités du journalisme italien comme Paolo Mieli, ex-directeur du quotidien national «Corriere della Sera». Le procès a été renvoyé à une date ultérieure, qui n’a pas encore été communiquée. (cath.ch-apic/imedia/bl/be)