Vatican: une déplacée climatique, victime du cyclone Idai, témoigne
«Le pire est arrivé en mars 2019 avec le passage du cyclone Idai», témoigne Maria Madalena Isaau, réfugiée climatique de 32 ans. À l’occasion de la publication par le Saint-Siège de ses Orientations pastorales sur les déplacés climatiques le 30 mars 2021, la Mozambicaine a pu raconter son histoire, qui a été bouleversée par les inondations et ses conséquences pour elle et sa famille.
Maria Madalena est une mère de cinq enfants, et s’occupe en plus de deux neveux orphelins. De 2001 à 2019, elle habitait dans le quartier de Praia Nova, une partie de la ville de Beira située à proximité de la mer. L’érosion progressive de la plage avait alors l’habitude de provoquer de fréquentes inondations, raconte-t-elle en portugais.
En 2014, une «inondation extraordinaire» a détruit les maisons du quartier: «J’ai perdu mes biens et ma nourriture». Mais la jeune femme retourne à Praia Nova car elle n’a «nulle part où aller et aucun autre moyen de subvenir aux besoins» de sa famille. En 2018, elle perd aussi son mari.
Depuis quelques années, les eaux du Canal du Mozambique – la mer située entre l’île de Madagascar et les côtes continentales – se réchauffent. Ce changement climatique favorise le développement des tempêtes tropicales dans cette bande de mer autrefois calme. En 2019, la tempête devient un cyclone, nommé Idai.
La catastrophe de 2019
Son quartier est alors intégralement «détruit». Maria Madalena en réchappe, et est hébergée avec toutes les familles de son quartier dans deux écoles. Deux mois plus tard, l’État la reloge dans un camp de réfugiés à 60 km de la ville de Beira, un endroit isolé, à 5km du premier village, Mutua.
Le gouvernement leur accorde une «parcelle de terrain de 20 mètres sur 30» pour planter une tente, et installe une «borne-fontaine». Une terre leur a aussi été donnée, mais elle est trop éloignée du lieu de résidence, aussi n’est-elle souvent pas cultivée.
Des ONG et l’Église catholique en seuls soutiens
Depuis 2020, une ONG a commencé à construire 200 vraies maisons pour les réfugiés les plus vulnérables, se réjouit-elle, notamment pour les veuves comme elle. Mais les conditions sont toujours très difficiles: le poste de santé le plus proche est à 8 km, l’école à 5km. Et il n’y a ni électricité, ni travail, ni commerce, ni «projet pour éduquer les jeunes ou pour occuper les gens». Pire: l’ONG qui donnait de la nourriture «a cessé son activité», et l’avenir est plus que jamais source d’inquiétudes.
Cette non-catholique dit sa gratitude pour l’action de l’Église dans le village. L’évêque de Beira, Mgr Claudio Dalla Zuanna, a en effet ouvert plusieurs classes dans le camp. Son diocèse a aussi pris en charge la construction d’une chapelle et a montré sa présence «dès les premiers mois » de leur arrivée. La paroisse qui s’est constituée est devenue centrale: elle donne du lait aux enfants et des vêtements à toute la population, rapporte la Mozambicaine. (cath.ch/imedia/cd/bh)
«Voir ou ne pas voir: telle est la question!»
«Je suggère que nous adaptions la célèbre phrase de Hamlet [héros de la pièce éponyme de Shakespeare, ndlr] ‘être ou ne pas être’ et affirmions: ‘voir ou ne pas voir: telle est la question!’», a déclaré le pape François dans une préface publiée le 30 mars 2021.
Le pape signait l’avant-propos des Orientations pastorales sur les déplacés climatiques, un document qui porte sur les conditions d’accueil, d’aide et de soutien que doit porter l’Église catholiques partout dans le monde face au phénomène émergeant des migrations climatiques. Ce document a été rédigé par la Section migrants et réfugiés du Dicastère pour le service du développement humain intégral.
Introduisant ce texte, le pape a déploré «le nombre immense et croissant des déplacés climatiques […] visible presque chaque soir sur nos écrans». «Ceux que la crise climatique chasse de chez eux doivent être accueillis, protégés, promus et intégrés», a-t-il demandé. CD