Suisse: Ramadan et Fête nationale du 1er Août associés à la Maison des religions à Berne
Une idée qui énerve la droite dure et les nationalistes
Genève, 29 juillet 2012 (Apic) L’idée d’associer le Ramadan et la Fête nationale suisse du 1er Août, qui revient à l’association TUOS et à la Communauté de chrétiens et musulmans en Suisse (GCM), fait grincer des dents aux milieux de la droite dure helvétique. Cette dernière parle même de «souillure de la fête nationale», rapporte samedi 28 juillet le quotidien romand «Le Courrier» à Genève.
La fête nationale suisse tombe cette année en plein rite musulman. L’occasion pour organiser une fête mercredi 1er août lieu dès 18h30 à la Maison des religions à Berne, qui met à disposition son infrastructure. Au menu: discours, buffet, grillades, concert de musique turque, le tout clôturé par un feu d’artifice. Selon «Le Courrier», il s’agirait pour le conseiller national UDC valaisan Oskar Freysinger de «naïveté», voire carrément de «trahison».
«Une trahison», pour l’UDC valaisan Oskar Freysinger
Créée à la suite de la votation sur l’initiative sur les minarets, l’association «Une Suisse tolérante et ouverte» (TUOS), dont le siège est à Berne, veut ouvrir un «débat de clarification et d’échange interculturel entre les membres des différents groupes ethniques et religieux qui vivent en Suisse». TUOS et la GCM sont deux associations interreligieuses bernoises centrées sur le dialogue christianisme-islam, qui réunissent dans leurs comités respectifs entre un tiers et 50% de musulmans, souligne Dominique Hartmann dans «Le Courrier».
Par cette initiative intitulée «Ma Suisse, ta Suisse, notre Suisse», les deux associations cherchent à promouvoir le contact avec des musulmans «parfaitement banals», explique Nicole Maron, membre du comité de TUOS. Et de rappeler que chaque musulman et musulmane a sa façon de vivre sa religion et il importe de montrer ces différences, car «le musulman n’existe pas».
Mais cette volonté d’ouverture aux autres suscite de vives réactions du côté des milieux nationalistes. Sur le site www.reduitnational.com, cette rencontre est considérée comme rien moins qu’une «souillure à notre fête nationale» et «une insulte à la volonté des Suisses».
«En l’occurrence, ce site porte bien son nom, rétorquent TUOS et la GCM, soit celui d’un système de défense qui date de la Deuxième Guerre mondiale. La pensée exposée date de la même période. Et ses tenants seraient bien étonnés de voir tout ce qui peut relier ceux qui se parlent d’être humain à être humain, plutôt que de chrétien à musulman, de Suisse à étranger», peut-on lire dans «Le Courrier».
L’urgence du dialogue interculturel et interreligieux en Suisse
Pour Nicole Maron, de telles affirmations ne font d’ailleurs qu’entériner l’urgence du dialogue interculturel et interreligieux en Suisse. «Ces gens n’ont pas compris qu’il est possible, au XXIe siècle, de côtoyer paisiblement des personnes qui ont des origines culturelles ou religieuses autres que nous. Qu’une nationalité n’implique pas de diaboliser tout ce qui est différent. Et que, pour certains musulmans grandis ici, la Suisse est une partie de leur identité».
Pour le conseiller national UDC Oskar Feysinger, rapporte le quotidien romand, cette rencontre entre chrétiens et musulmans, «c’est n’importe quoi! Il n’est pas question d’associer la célébration de l’idéal démocratique suisse à une religion qui en est une pure trahison». Selon lui, l’intention est totalement naïve: «Sous couvert de tolérance, on laisse un dogme totalitaire se déployer. Car, comme l’islam ne sépare pas le religieux du politique, tout acte religieux devient politique».
Mais pourquoi associer rite religieux et 1er Août? «L’hymne national comporte bien des traces d’un enracinement chrétien, mais il ne s’agit pas de transformer la fête nationale en événement religieux», précise Nicole Maron. Un imam a pourtant été invité pour prononcer la prière rituelle de fin de jeûne. «Du coup, la fête prend un certain caractère religieux. Mais la prière aura lieu dans une salle distincte. Chacun aura la possibilité d’y assister, ce qui permet là aussi de lever des questionnements». (apic/courrier/be)