Toussaint: Pèlerinage à la chapelle des 5'000 reliques
A la veille de la Toussaint, fêtée dans l’Eglise catholique le 1er novembre, le pèlerinage à la chapelle des 5’000 reliques, à l’est des Etats-Unis, revêt une signification particulière.
Nichée dans un quartier endormi dans les collines de Pittsburgh, en Pennsylvanie, la chapelle de Saint-Antoine conserve pas moins de 5’000 reliques: Des éclats de la Vraie Croix, des fragments d’os de tous les apôtres, une dent de saint Antoine de Padoue, des reliques de Thérèse de Lisieux, Rose de Lima, sœur Faustine, ou Kateri Tekawitha. Après Rome, elle rassemble la plus grande collection de reliques au monde.
Les fragments de corps et les restes des biens d’innombrables saints ont continué d’avoir des aventures terrestres longtemps après leur mort. Beaucoup de ces reliques ont voyagé à travers les âges et les régions du monde pour échapper à la guerre, la confiscation et la profanation, avant d’achever leur périple dans la chapelle de Saint Antoine, comme le raconte l’agence d’information américaine Catholic News Agency (CNA).
Les reliques enjeux des luttes anti-cléricales
A l’origine de cette étonnante collection se trouve le prêtre et médecin d’origine belge Suitbert Mollinger fondateur de la chapelle à la fin du XIXe siècle. Son hobby consistait à acquérir des reliques de toutes provenances.
Au milieu de l’agitation politique et sociale que l’Europe a connu à la fin du XIXe siècle, ce passe-temps curieux était crucial pour sauver des reliques à travers le continent. En raison de leur place importante dans la dévotion catholique, les reliques devinrent en effet une cible de la persécution anti-catholique en Europe. Les régimes laïques en France, en Allemagne, en Italie, en Belgique ou en Suisse firent souvent de la confiscation ou de la destruction des reliques un axe de leur politique anticléricale.
Un clou de la Passion, un os de saint Pierre et une dent de saint Antoine
Beaucoup de paroisses, de congrégations religieuses ou de familles nobles cherchèrent alors à mettre en lieu sûr leurs précieuses reliques. Ce fut un moment opportun pour le Père Mollinger d’enrichir sa collection personnelle. Comme il est interdit par l’Eglise de vendre ou d’acheter des reliques, le prêtre se les fit remettre en don, en prêt ou en dépôt par des amis dans son pays d’origine, la Belgique, ainsi que lors de ses voyages aux Pays-Bas, en Italie et ailleurs.
Prêtre-médecin-guérisseur
Initialement, le Père Mollinger conserva sa collection de reliques dans son presbytère. Comme il était également médecin, ses patients pouvaient vénérer les reliques entre deux consultations, mêlant les traitements médicaux et spirituels. Il acquit ainsi une réputation de ‘prêtre-médecin-guérisseur’ et des milliers de personnes venaient le trouver.
Le Père Mollinger pensa alors qu’il faudrait une belle église pour que chacun puisse visiter et vénérer ses reliques. Il entreprit donc, sur ses propres fonds, la construction d’une chapelle pour les loger. L’édifice fut achevé pour la fête de saint-Antoine en 1883. Comme le prêtre continuait de recevoir des reliques, il fallut prévoir une extension qui sera construite neuf ans plus tard en 1892. Le Père Mollinger mourut deux jours après l’achèvement de la chapelle.
Toutes les reliques sont certifiées
Parmi les reliques de la chapelle de Saint Antoine, on trouve des fragments de la Vraie Croix et de la colonne de la flagellation; une pierre du jardin de Gethsémani; un clou qui a tenu le Christ à la croix; des parcelles de vêtements de Jésus, Marie et Joseph, un morceau d’os de chacun des douze apôtres et pour les plus proches de nous, des reliques de Thérèse de Liseux (1873-1897), Rose de Lima (1586-1617), Sœur Faustine (1905-1938) ou Kateri Tekawitha (1656-1680). «Si je devais citer tous les saints, nous resterions ici longtemps,» plaisante Carole Brueckner, présidente du comité pour la Chapelle Saint-Antoine.
«Entrer dans cette chapelle c’est comme entrer dans un coin du paradis»
Quand une relique est placée dans un reliquaire, il est scellé et il ne peut jamais être à nouveau ouvert. Peu à peu, l’Eglise a émis des règles strictes contre la falsification des reliques. «Pour qu’une relique puisse être vénérée, elle a besoin d’un certificat d’authentification émis par une autorité d’Eglise. Ce document doit dire qui est le saint ou la sainte en question et en quoi consiste la relique, fragment de corps, objet personnel, vêtement ou objet ayant été en contact avec le saint. «Nous avons les certificats d’authenticité pour la quasi-totalité de nos reliques», relève Carole Brueckner.
Bien que la croyance en l’authenticité des reliques ne soit pas une question de foi, «les visiteurs éprouvent toujours la même présence illustrée par la collection de reliques. Je crois que c’est comme entrer dans un petit coin du paradis, parce que vous êtes entouré par tant de personnes dont l’Eglise affirme qu’elles nous précèdent dans le ciel», conclut Carole Brueckner.
Le culte des reliques
Dès le deuxième siècle, les chrétiens honorent les reliques des saints, soit des parties du corps ou des objets chers de saints hommes et femmes. Les sépultures des martyrs sont particulièrement honorées et les fidèles qui s’y rendent en pèlerinage souhaitent emporter avec eux un souvenir concret de leur passage. Aujourd’hui encore, les autels des églises catholiques renferment toujours une relique.
L’Eglise enseigne que les reliques ne doivent pas être adorées, et ne détiennent pas de pouvoirs magiques. On leur rend un culte dit de dulie qui exprime à la fois le respect dû aux saints et la demande d’intercession envers Dieu. Ainsi, même si les reliques n’ont pas de pouvoir en elles-mêmes, Dieu peut continuer à faire des miracles en présence du corps du saint, même après sa mort.
La vénération des reliques existait déjà dans le bouddhisme et le judaïsme. Elle se retrouve aussi dans l’islam et même dans le communisme athée avec par exemple Lénine et Staline en Russie, Mao Tse Toung en Chine ou Kim il sung en Corée du Nord. (cath.ch/cna/mp)