Témoignage de Mgr Zakaria, évêque copte catholique de Louxor

Egypte: A Louxor, les manifestants pro-Morsi criaient «mort aux chrétiens»

Louxor/Le Caire, 20 août 2013 (Apic) «Les réserves alimentaires touchent à leur fin et la population a peur de sortir de chez elle. Les personnes aisées elles-mêmes ne parviennent plus à acheter de la nourriture parce que tous les magasins sont fermés. Je voudrais me rendre chez eux pour les aider, mais je ne peux le faire car je suis moi aussi isolé chez moi», témoigne Mgr Youhannes Zakaria, évêque copte catholique de Louxor.

Le prélat copte catholique a été menacé le vendredi 16 août, jour des manifestations organisées par les Frères musulmans pour protester contre la destitution du président Morsi. «Les manifestants pro-Morsi, après avoir été chassés du centre de Louxor, sont arrivés sous les fenêtres de l’évêché en criant ‘mort aux chrétiens’. Par chance, la police est arrivée à temps pour nous sauver. Maintenant, la police et l’armée surveillent la maison avec deux blindés», a confié Mgr Zakaria le 20 août 2013 à l’agence d’information vaticane Fides.

Les célébrations de l’Assomption du 22 août ont été annulées

«A Louxor, la situation est critique même si elle n’a rien de comparable avec celle de la Haute-Egypte (Minya, Assiout) ou du Caire. Dans tous les cas, ici aussi, des désordres ont eu lieu, désordres au cours desquels différentes maisons de chrétiens ont été incendiées. Voici dix jours, en outre, dans un village proche d’ici, cinq chrétiens et un musulman ont été tués», déclare Mgr Zakaria.

«Pour des raisons de sécurité, nous avons annulé les célébrations de l’Assomption, qui est fêtée ici le 22 août et non pas le 15. Chacun est cloîtré à son domicile. Je suis enfermé dans l’évêché depuis 20 jours environ. Les forces de sécurité m’ont conseillé de ne pas sortir», ajoute l’évêque.

Mgr Zakaria relève que la campagne contre les chrétiens mise en œuvre par les partisans des Frères musulmans est due au fait qu’ils «pensent que les chrétiens sont à l’origine de la chute de Morsi».

«Il est vrai – ajoute-t-il – que les chrétiens ont participé aux manifestations contre Morsi, mais ce sont 30 millions d’Egyptiens qui sont descendus dans les rues, la majeure partie musulmans, contre le président destitué. En attaquant les chrétiens, ils veulent jeter l’Egypte dans le chaos».

Mgr Zakaria met à jour les chiffres relatifs aux destructions subies par les différentes confessions chrétiennes au cours de ces derniers jours. «Plus de 80 églises et différentes écoles chrétiennes ont été incendiées. Je rappelle qu’en Egypte, l’Eglise catholique gère, d’Alexandrie à Assouan, plus de 200 écoles où élèves chrétiens et musulmans étudient côte à côte».

La violence «terroriste» vise le peuple égyptien, estime l’Eglise catholique copte

De son côté, le patriarche des coptes catholiques Ibrahim Isaac Sidrak, dans un message à l’agence de presse catholique italienne SIR, a exprimé le soutien «ferme, conscient et libre» de la petite communauté copte catholique à la police égyptienne et aux forces armées «pour tous les efforts qu’ils accomplissent pour protéger le pays».

Il ne s’agit pas en Egypte d’une «lutte politique entre factions rivales mais d’une lutte de tous les Egyptiens contre le terrorisme», affirme-t-il. Patriarche d’Alexandrie des coptes catholiques et président de l’Assemblée de la Hiérarchie Catholique d’Egypte, le patriarche Sidrak relève que l’Eglise catholique égyptienne suit «avec douleur et anxiété, mais dans l’espérance, les souffrances qu’endure notre pays du fait d’actes terroristes abjects qui tuent les personnes, brûlent les églises, les écoles et toutes les institutions de l’Etat».

Il exprime, «du fond du cœur, par amour pour notre patrie et en solidarité avec tous nos frères égyptiens, chrétiens et musulmans», son soutien «ferme, lucide et libre à l’égard de toutes les institutions du pays et tout particulièrement la police égyptienne et les forces armées». Le patriarche catholique dit son refus absolu et catégorique de «toute tentative d’intervenir dans les affaires intérieures de l’Egypte ou d’influencer ses décisions souveraines, quel qu’en soit le but ou le prétexte».

Des médias accusés de partialité

Mgr Sidrak condamne «les médias qui propagent des mensonges et contrefont la vérité dans le but d’induire en erreur l’opinion générale mondiale» sur ce qui se passe en réalité en Egypte et se dit reconnaissant à l’égard «de nobles musulmans qui se sont tenus à nos côtés, au maximum de leurs possibilités, pour défendre nos églises et nos institutions». Il exhorte «la conscience mondiale et tous les responsables des pays» à faire l’effort de connaître ce qui se passe en Egypte aujourd’hui et souhaite que le Vatican aide les Etats-Unis et l’Union européenne à comprendre qu’il ne s’agit pas en Egypte de fracture entre chrétiens et musulmans, mais bien d’une «lutte de tous les Egyptiens contre le terrorisme». (apic/fides/sir/be)

20 août 2013 | 15:36
par webmaster@kath.ch
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