Tanguy Coral, catéchumène: «La foi c’est mon être réel. C’est la Vie.»
Elève de troisième année au Collège du Sud à Bulle, Tanguy Coral, 18 ans, s’apprête à recevoir le baptême à Pâques. «Je passe parfois pour un OVNI ou un illuminé, mais je suis arrivé à la foi surtout par la recherche et la réflexion personnelle», explique-t-il à cath.ch.
Élégamment vêtu d’un costume foncé avec chemise blanche et cravate, Tanguy Coral a déposé son manteau et son large chapeau noir sur une chaise. Issu d’une antique famille française ayant fui la Révolution vers l’Italie, avant de faire souche en Suisse, il cultive une certaine distinction qui imprègne aussi son langage assez éloigné du style ‘d’jeuns’. Intéressé par la philosophie, il a choisi cette option d’études. Engagé au sein de la chorale de l’école et de la société d’étudiants du Collège du Sud, représentant des élèves, secrétaire des jeunes UDC, il a été candidat de ce parti pour les élections nationales de 2023.
Quel a été l’itinéraire qui vous a conduit vers le baptême?
Tanguy Coral: Mon père catholique et ma mère protestante avaient choisi de ne pas me faire baptiser afin de me laisser la liberté de choisir plus tard. Je n’ai pas suivi non plus de catéchèse et je ne suis allé que de rares fois à l’église dans mon enfance pour des mariages ou des enterrements. Enfant je n’avais pas d’intérêt pour la religion, voire même une certaine révulsion pour l’Église et les religions. Je pensais que la science suffisait pour expliquer la vie.
A un moment donné, vous avez commencé à avoir des interrogations?
Vers 13 ou 14 ans, j’ai commencé à me poser des questions et à avoir des doutes sur mon absence de foi. Quand à 15 ans j’ai rejoint la société d’étudiants du Collège du Sud à Bulle, j’ignorais qu’il s’agissait d’un groupe à identité catholique et conservatrice. Parmi les activités de la société, il y avait un certain nombre de messes ou de célébrations religieuses, j’y participais mais cela ne me parlait pas vraiment.
«J’ai été saisi par la beauté de la célébration de la messe traditionnelle»
Quel a été le déclic qui vous a poussé à allez plus loin?
En discutant avec l’un de mes camarades, il m’a conseillé de participer une fois à la messe traditionnelle célébrée par la Fraternité Saint-Pierre (FSSP), à Notre-Dame de Compassion à Bulle. Après pas mal de tergiversations, j’y suis allé seul un dimanche, car mon camarade était malade ce jour là. J’ai été saisi par la beauté de la célébration et en particulier, comme je suis chanteur, par celle du chant grégorien. Ce fut une expérience forte et un déclic. J’ai pris l’habitude d’aller régulièrement à cette messe toujours plus intrigué par ce que je découvrais.
Comment avez-vous poursuivi cette découverte?
J’ai commencé alors à m’intéresser aux questions de foi et de théologie et de vie des saints. J’ai lu pas mal de livres ou d’articles, entre autres autour de saint Augustin et de saint Thomas d’Aquin. Malgré l’écart temporel, je me retrouvais dans l’expérience du jeune Augustin. Mais ces réflexions sont restées d’abord personnelles non suivies de démarche officielle.
Après quelques temps vous décidez d’entrer en catéchuménat
Au bout de six mois, vers mi-2022, je me suis rendu compte qu’il serait assez naturel de devenir catholique et donc de demander le baptême. Je me suis adressé à la paroisse de Bulle et j’ai intégré le parcours de catéchuménat. Mais je m’y suis pas senti à l’aise. Après une messe à Bulle, je m’en suis ouvert au prêtre de la Fraternité qui m’a dit que je pouvais faire ce catéchuménat avec eux. Ce que j’ai fait. Dans le même temps, je me suis mis aussi à la prière quotidienne pour mieux rencontrer Dieu et le connaître.
Comment votre entourage a-t-il réagi?
Cela n’a pas provoqué de grands changements. Mes camarades de collège m’ont vu plus croyant et plus engagé, mais cela n’a pas suscité beaucoup de questions de leur part. Les membres de la société d’étudiants sont évidemment heureux que je partage désormais leur foi.
Et votre famille?
Ma mère protestante mais peu croyante a eu de la peine à comprendre ma démarche. Mais elle l’a accepté en me disant: «Si cela te fait du bien c’est tant mieux». Mon père catholique, bien que peu pratiquant, est heureux de me voir rejoindre l’Église. Le côté catholique de ma famille m’a tout de suite soutenu et encouragé, mais il faut dire que j’ai peu échangé avec eux car nous sommes assez dispersés. Ma famille protestante est restée plus indifférente.
«Je passe parfois pour un OVNI ou un illuminé. Mais la foi a ‘boosté’ mon désir de m’engager contre les injustices»
Recevoir le baptême pour entrer dans l’Église ne semble pas très facile quand beaucoup la quittent.
L’Eglise catholique a effectivement une image assez négative que j’ai d’ailleurs partagée. Mais j’ai l’impression qu’il y a comme une résurgence, un nouvel intérêt. Peut-être parce que les jeunes la connaissent peu ou pas du tout. Il y a beaucoup de clichés et de critiques. J’essaye d’y répondre, la discussion doit permettre de voir ce qu’il a de positif. Les critiques portent surtout sur le comportement de certains prêtres qui ne vivent pas la morale qu’ils prêchent. L’institution est effectivement composée d’humains faillibles.
Vous risquez de passer pour quelqu’un de bizarre?
Oui je passe parfois pour un OVNI ou un illuminé. Mais la foi est beaucoup plus qu’un sentiment, c’est mon être réel, c’est la vie. C’est ensuite mon guide pour la justice et la morale. En ce sens, la foi a ‘boosté’ mon désir de m’engager contre les injustices qui ‘me font grimper les murs’ selon une expression de ma mère. La foi et l’Église sont des moteurs pour la justice.
Comment vous préparez-vous à recevoir le baptême?
Au fur et à mesure que le baptême s’approche, j’essaye de mettre Dieu dans ma vie. Cela passe par la prière, le chapelet ou l’examen de conscience. Comme Augustin, je pense aussi à toutes ces années où j’ai rejeté la foi.
En tant qu’adulte je vais recevoir ‘en bloc’ les trois sacrements du baptême, de l’eucharistie et de la confirmation. Je me réjouis beaucoup. Pouvoir marcher vers la table de la communion est une grande joie. Jusqu’à présent je n’avais qu’une bénédiction, recevoir le Seigneur sera un grand changement.
Vous allez être baptisé à la basilique Notre-Dame à Fribourg.
Nous serons trois jeunes entre 18 et 25 ans à recevoir le baptême lors de la vigile pascale à Notre-Dame. Notre formation a été individuelle mais nous avons fait plus connaissance à partir du moment de l’appel décisif. Chacun a son propre parcours, et je trouve cela magnifique. (cath.ch/mp)
Bien tard je t’ai aimée
Les confessions de saint Augustin, œuvre autobiographique, écrite entre 397 et 401, restent un ouvrage majeur de la spiritualité chrétienne dans laquelle il raconte sa quête de Dieu et sa rencontre…
Bien tard, je t’ai aimée,
ô beauté si ancienne
et si nouvelle, bien tard,
je t’ai aimée !
Et voici que tu étais au-dedans,
et moi au-dehors,
et c’est là que je te cherchais,
et sur la grâce de ces choses
que tu as faites,
pauvre disgracié,
je me ruais !
Tu étais avec moi
et je n’étais pas avec toi ;
elles me retenaient loin de toi,
ces choses qui pourtant,
si elles n’existaient pas en toi,
n’existeraient pas !
Tu as appelé, tu as crié
et tu as brisé ma surdité ;
tu as brillé, tu as resplendi
et tu as dissipé ma cécité ;
tu as embaumé, j’ai respiré
et haletant j’aspire à toi ;
j’ai goûté, et j’ai faim et j’ai soif ;
tu m’as touché
et je me suis enflammé
pour ta paix.
Saint Augustin, Les Confessions 10, 27
cath.ch est allé à la rencontre de plusieurs catéchumènes. Récits de parcours parfois surprenants qui ont mené ces personnes sur le chemin de la foi catholique. Elles seront baptisées lors de la veillée pascale.