Syrie: une professeure catholique dans le processus de la Constitution
La professeure catholique Hind Aboud Kabawat est la seule représentante chrétienne nommée dans le comité chargé de préparer la Conférence nationale syrienne. L’assemblée aura pour tâche de rédiger une nouvelle Constitution et de définir la nouvelle structure institutionnelle du pays.
Le comité de préparation de la Conférence Nationale syrienne compte sept personnes, cinq hommes et deux femmes, dont Hind Kabawat. Le groupe a été nommé par le président autoproclamé «intérimaire» Ahmad al Sharaa, plus connu sous le nom d’al Jolani. Il a dirigé pendant des années le groupe Hayat Tahrir al Sham, une formation à l’origine djihadiste qui a joué un rôle de premier plan dans l’effondrement du régime de Bachar el Assad, en décembre 2024.
La catholique Hind Kabawat est issue d’une famille chrétienne interconfessionnelle, d’un père grec-catholique et d’une mère grecque-orthodoxe. Son curriculum vitae témoigne de son implication constante dans le dialogue interreligieux et les stratégies de médiation, de pacification et de promotion des femmes en Syrie.
Diplômée en économie de l’Université de Damas et en droit à l’Université arabe de Beyrouth, elle a notamment a été directrice adjointe du bureau de Genève de la Commission de négociation syrienne. Hind Kabawat avait participé dès 2017 aux huit rounds des pourparlers de paix de Genève sur la Syrie. Elle est en outre directrice de L’Interfaith Peacebuilding Programm de l’Université George Mason de Virginie.
Véritable «virage modéré»?
En nommant Hind Kabawat au sein du Comité, les détenteurs du pouvoir en Syrie veulent envoyer un signal de leur ouverture proclamée envers les communautés religieuses, notamment chrétiennes, commente l’agence d’information vaticane Fides (14 février 2025).
Des analystes considèrent que les gestes d’accommodation envers la minorité chrétienne visent à donner un crédit international au «virage modéré» du nouveau gouvernement. Un changement de cap qui pose question, alors qu’al Jolani avait été qualifié en 2013 de «terroriste global» par le Département d’État américain. Son groupe Hayat Tahrir al Sham avait également participé à des dégradations d’églises.
En 2022, des think tanks américains ont toutefois mis en avant «l’évolution» déclarée de divers groupes au sein de la galaxie djihadiste. L’analyste Aaron Y. Zelin écrivait qu’al Jolani «n’est plus seulement le chef d’un groupe terroriste ou d’une faction rebelle», mais qu’il doit être considéré comme le représentant d’un mouvement en évolution, qui comprend également un changement d’attitude à l’égard des États-Unis. Selon Aaron Y. Zelin, Hayat Tahrir al Sham aurait utilisé des canaux détournés pour envoyer aux responsables américains des messages de conciliation. (cath.ch/fides/arch/rz)