Syrie: Le Père Mourad raconte les circonstances de sa libération
Homs, 16.10.2015 (cath.ch-apic) «J’ai été sauvé grâce à l’aide humanitaire que nous donnons aux musulmans et aux chrétiens», a déclaré le 16 octobre 2015 le prêtre syrien Jacques Mourad à l’organisation «L’Oeuvre d’Orient», après avoir échappé aux griffes des djihadistes. Il a également rendu grâce pour sa liberté à la Vierge Marie et à l’aide d’un ami musulman.
«C’est le miracle que Dieu m’a offert: lorsque j’étais prisonnier, j’attendais le jour où j’allais mourir, mais avec une grande paix intérieur», a affirmé le prêtre enlevé en mai dernier à Qaryatayn, au nord-ouest de la Syrie, par des membres du groupe djihadiste Etat islamique (EI). Il a expliqué à la chaîne de télévision italienne TV2000 ne pas avoir de problème avec le fait de mourir pour le nom du Seigneur. «Je ne serais pas le premier, juste un parmi les milliers de martyrs pour le Christ». Le prêtre catholique syriaque a remercié tous ceux qui ont prié pour sa libération. «C’est un véritable miracle qu’un prêtre ait été libéré des mains de Daech [acronyme arabe de l’EI, ndlr.], un miracle que je dois à la Vierge Marie», a-t-il assuré.
Le Père Mourad est prieur du monastère de Mar Elian (Saint Julien), à Qaryatayn, à 60 km de la ville de Homs. Il a été capturé le 21 mai, avec le moine Boutros, après une offensive de Daech contre la ville.
Refus de se convertir à l’islam
Il a expliqué à la télévision italienne avoir été enfermé quatre jours, dans les montagnes, à bord de la voiture appartenant au monastère, dans laquelle il avait été emmené. Il a ensuite été transporté à Raqqa, le bastion de l’EI, dans l’est du pays. Le Père Mourad raconte que ses ravisseurs lui demandaient régulièrement de professer sa foi. Presque chaque jour, quelqu’un venait dans la prison et lui demandait «qu’est-ce que tu es?». Il répondait: «Je suis un chrétien». Ces geôliers criaient alors: «Tu es donc un infidèle. Puisque tu es un chrétien, si tu ne te convertis pas, nous te couperons la gorge avec un couteau!» Malgré les menaces, le prêtre a refusé de renoncer au Christ. Au 83e jour de captivité, un combattant leur a demandé qui était Jacques Mourad. Le Père s’est levé et s’est présenté. L’homme lui a dit «chaque jour les gens nous disent: rendez-nous le Père Jacques», rapporte l’organisation de défense des chrétiens «L’Oeuvre d’Orient», qui a interrogé le prêtre sur sa captivité.
Trois enfants baptisés en secret
Le combattant l’a ensuite emmené à Palmyre avec Boutros, les a fait changer de voiture puis rentrer dans une maison. Il leur a ensuite débandé les yeux et poussé la porte et, «oh surprise, il y avait 250 chrétiens de Qaraytayn» dans la pièce. «Quel choc! raconte le Père Jacques, retrouver sa paroisse et ses fidèles après 83 jours de détention! Comment réagir?»
Avec ses fidèles, le Père Jacques priait en cachette et est même arrivé à baptiser trois enfants. Encore et toujours, Daech leur demandait de se convertir, de payer l’impôt sous la menace d’être décapités. Un contrat a finalement été signé entre les chrétiens de Qaraytayn et l’EI: les chrétiens pouvaient revenir chez eux à condition de payer l’impôt chaque mois et de respecter la loi du Coran.
Le Père Mourad a expliqué qu’il avait pu s’enfuir en portant un déguisement. Il s’est échappé sur une motocyclette, avec l’aide d’un ami musulman. Aidé par la même personne, le diacre Boutros s’est enfui trois semaines avant le Père Jacques.
Le catholique syriaque a indiqué qu’il travaillait à présent avec un prêtre orthodoxe, des amis bédouins et un ami musulman pour libérer les 200 autres chrétiens encore emprisonnés. 50 autres chrétiens de la zone de Qaryatayn ont réussi à s’enfuir le 11 octobre.
«J’ai été sauvé grâce à l’aide humanitaire que nous donnons aux musulmans et aux chrétiens», a assuré le prêtre à «L’Oeuvre d’Orient». Jacques Mourad a remercié toutes les associations humanitaires et en particulier l’Œuvre d’Orient «pour son aide qui n’a jamais cessé depuis le début».
Les troupes de Daech ont détruit en août dernier le monastère de Mar Elian, vieux de 1600 ans. (apic/ag/rz)