Synode sur la synodalité: les conseils du pape François à son diocèse
L’Église doit redécouvrir qu’elle est «un peuple qui veut marcher ensemble» : dans un long discours à propos du Synode sur la synodalité, le pape François a encouragé, conseillé et mis en garde les Romains venus le rencontrer le 18 septembre 2021 pour leur rentrée pastorale.
«Il est très important que le diocèse de Rome s’engage avec conviction dans ce voyage», a-t-il insisté devant une assistance nombreuse rassemblée dans la Salle Paul VI au Vatican.
Le 9 octobre prochain, Rome, comme tous les diocèses du monde doit lancer la première phase du Synode sur la synodalité, un chemin de réflexion sur la façon dont l’Église vit et agit aujourd’hui. Décrivant cette première étape comme une «affaire sérieuse», le pontife a détaillé le sens profond de cette démarche.
Il s’est pour cela constamment référé aux Actes des Apôtres, le cinquième livre des Nouveau Testament qui raconte la création de la communauté chrétienne. Il s’agit selon lui le «plus important «manuel» d’ecclésiologie» dont l’exemple doit nourrir le chemin actuel.
Les impasses synodales
Le pape a commencé par ce que le synode n’est pas : «un chapitre d’un traité d’ecclésiologie […] et encore moins une mode, un slogan». Il a aussi écarté une interprétation qui en ferait un «sondage» ou la création d’un «club exclusif» ou d’un «parlement diocésain».
Au contraire d’un parlement, a-t-il insisté, «l’idée de distinguer les majorités et les minorités ne doit pas prévaloir» dans un synode. Les groupes qui veulent se démarquer finissent mal, a-t-il insisté, deviennent tôt ou tard des «hérésies». Et d’assurer : «Le gnosticisme et le pélagianisme sont des tentations constantes dans l’Église» aujourd’hui.
L’autorité dans l’Église ne résulte pas d’une réflexion sur une des nombreuses «ecclésiologies de substitution» qu’on a proposé jusqu’à aujourd’hui, a prévenu le pape. Au contraire, elle naît «de l’écoute de la voix de Dieu et du peuple».
Marcher ensemble pour se redécouvrir
Pour comprendre et interpréter le message de Dieu chez l’autre et dans l’Esprit saint, l’évêque de Rome a ensuite proposé une «herméneutique [système d’interprétation, ndlr] de pèlerin, c’est-à-dire une herméneutique qui est en chemin». Il a une nouvelle fois mis en garde contre la rigidité, un «péché contre la patience de Dieu».
«Les réalités théologiques sont comme l’eau: si l’eau ne coule pas, elle est dormante, et est la première à se putréfier», a ensuite déclaré le pape François. Insistant sur le fait que le Saint Esprit ne «connaît pas de frontières et ne se laisse pas limiter par les appartenances», il a appelé à ouvrir les portes des paroisses afin de ne pas se retrouver qu’avec «ceux qui fréquentent ou qui pensent comme vous, à 3, 4 ou 5%».
Ce Synode, a insisté l’évêque de Rome, doit ainsi faire émerger les misères de chacun. «Si nous n’incluons pas les «misérables» de la société, ceux qui sont mis au rebut, nous ne pourrons jamais prendre en charge notre [propre] misère», a-t-il prévenu.
Le sens du peuple
Le pape François, comme à son habitude, a mis en garde contre le cléricalisme qui «détache» le prêtre du peuple. Reprenant la métaphore évangélique du bon pasteur, le pape a appelé les prêtres à marcher «avec le peuple, parfois devant, parfois au milieu, parfois derrière». Et de s’expliquer: il faut être devant pour guider le troupeau, au milieu pour encourager et sentir le peuple et derrière pour aider ceux laissés derrière.
À rebours, le pape a largement décrié l’action de «ceux qui s’obstinent à prendre la place de Dieu, en prétendant modeler l’Église sur leurs propres convictions culturelles et historiques, en la contraignant à des frontières armées, à des coutumes culpabilisantes, à des spiritualités qui blasphèment la gratuité de l’action impliquante de Dieu».
Au contraire, le sensus fidei [le bon sens surnaturel qui guide le Peuple de Dieu, ndlr] permet à chacun de «discerner quelles sont les voies de l’Évangile dans le présent». Cette dimension, insiste-t-il, est personnelle et ecclésiale à la fois, et ne peut donc se résumer à un «activisme catholique».
Se laisser, agiter, confronter, choquer
La dimension individuelle du synode doit susciter chez chacun une «agitation intérieure continue, née de la foi de chacun et nous invitant à réfléchir à ce qu’il convient de faire, à ce qu’il faut maintenir ou changer», a affirmé le pape François.
Pour cela, il a appelé à ne pas craindre qu’une «confrontation» se produise parce qu’elle fait partie des «signe de docilité et d’ouverture à l’Esprit». L’Église, a-t-il insisté, ne se renforce pas seulement en réformant les structures mais par ce dialogue volontaire avec l’autre et l’Esprit saint.
En conclusion, le pape François a enfin invité à se «nettoyer les oreilles pour bien entendre». Et a donné du courage à ses brebis : «Laissez-vous choquer par le dialogue : c’est le dialogue du salut». (cath.ch/imedia/cd/mp)