Synode: la Suisse romande chemine avec les pauvres
Questionnaire synodal en ligne, simplifié, discuté en famille, partagé en assemblée après la messe, à l’occasion d’un rendez-vous paroissial, etc. Au milieu de tout ce foisonnement, les aumôneries de rue des cantons romands ont inclus les personnes situées en marge de la société et de l’Église dans la démarche synodale. Tour d’horizon (non exhaustif).
Vu de Lausanne*: Bernard Hallet/cath.ch
Les aumôneries de rue au service des personnes en situation de précarité ou vivant dans la rue s’activent, sans bruit, à organiser des réunions à l’intention des personnes en marge de la société et des parvis. «Ils nous amènent une expertise du terrain dont ils sont, en fait, les meilleurs connaisseurs. A travers cette démarche synodale, il y a vraiment quelque chose à recevoir d’eux», indique Pascal Bregnard, responsable du Département Solidarités de l’Église catholique dans le canton de Vaud (ECVD).
Avec toutefois le risque qu’ils ne prennent pas la parole, ajoute-t-il, en raison de difficultés à s’exprimer ou par rapport à leur situation de vie, qui les inciterait à s’autocensurer.
La synodalité sans le savoir
Pascal Bregnard y voit également le prolongement de la démarche entamée par les pastorales de rue pour travailler en coresponsabilité avec les personnes en précarité. «Avant on parlait d’eux sans avoir leur avis. Avec le groupe Fratello, notamment, on travaille en co-reponsabilité, avec eux et… on a commencé à faire de la synodalité sans le savoir!». Pour le responsable du département solidarité, la démarche synodale s’inscrit naturellement dans les groupes avec les personnes en précarité.
A Morges (VD), Françoise Gariazzo, de la pastorale de rue dans l’Unité pastorale La Venoge – Eaubonne, veut profiter d’un groupe de parole autour de la Bible déjà existant pour y insérer des échanges autour d’une ou deux questions sur la synodalité. Notamment en rapport avec l’écoute des personnes en dehors de l’Église. «Ce sont des gens cabossés par la vie et ne sont pas tous catholiques».
Privilégier la parole des pauvres
Elle espère, dans le cas d’une bonne discussion, renouveler l’expérience avec, si nécessaire, des entretiens individuels. «Il est important de privilégier leur parole, même si elle est parfois difficile à capter. S’exprimer sur ces sujets est parfois très difficile pour eux. Ils peuvent se refermer très vite». Raison pour laquelle elle ne compte pas ouvrir le groupe plus largement. «En revanche, s’ils adhèrent au projet, cela peut être très riche. Ils s’expriment sans filtre».
Marie-Antoinette Lorwich, de la pastorale de rue à Moudon (VD), adoptera la même démarche. Elle a l’intention de réunir, ces prochains jours, une dizaine de personnes en précarité et en cours de réinsertion après un séjour en prison. «Il faut un langage simple. Je me focaliserai au maximum sur trois questions». Elle espère des retours intéressants, d’autant que certains ne sont pas catholiques, d’autres sont en dehors de l’Église ou en train d’y revenir.
Au bout du lac, Inès Calstas, responsable de la pastorale catholique des Milieux ouverts du canton de Genève, projette de sonder les personnes en situation de rue qui fréquentent le groupe de lecture biblique qui leur est destiné.
Avec Fratello
Dans le diocèse de Sion, la Maison de la Diaconie de Sion organise déjà les «Samedis du synode» au restaurant le Verso l’alto: des samedis soirs dédiés à certaines thématiques du synode ouverts à tous, dans ce restaurant où les plus modestes peuvent venir prendre un repas et participer. Joëlle Carron, du service de la diaconie, annonce que les questions autour du synode seront spécifiqument abordées au cours d’une réunion de l’association Fratello-Valais, le dernier dimanche de janvier. Une quarantaine de personnes devraient y participer.
«Par votre appel téléphonique vous m’avez donné envie d’organiser un partage sur le thème de la synodalité avec des personnes rencontrées dans la précarité», écrit dans un courriel à cath.ch Bernard Tripet, de l’association «Le Pèlerin des rues», à Cortaillod (NE). La question de cath.ch sur une éventuelle réunion synodale avec des personnes de la rue l’a titillé. Il va donc, une fois la semaine de l’unité des chrétiens passée, thématiser une des soirées organisées par l’association, sur le synode.
«Ce synode est une belle opportunité de donner la parole aux gens de ›l’extérieur’. Leur voix comptent», estime Françoise Gariazzo. (cath.ch/bh)
*Une collaboration entre centres médias
C’est déjà le cas actuellement, mais de manière ponctuelle. Désormais, cath.ch publiera régulièrement des articles proposés par les rédactions de Zürich et Lugano illustrant, décryptant ou analysant une réalité ecclésiale de leur région linguistique qui intéresse le reste de la Suisse. Cela afin de faire découvrir aux lecteurs des spécificités régionales, au-delà d’une simple actualité.
A la veille de l’ouverture, par le pape François, le 10 octobre 2021, du Synode sur la synodalité, cath.ch a sondé les diocèses romands sur leur manière d’entamer cette «marche ensemble». Petit tour d’horizon de la mise en route d’un processus qui va durer deux ans.