Suisse: un prêtre se marie avant de mourir
Un prêtre romand, décédé récemment, se marie civilement à «son âme sœur» juste avant de mourir. Cet acte vient légitimer trente ans d’histoire d’amour, qui n’ont jamais affecté l’exercice de son ministère. Mgr Charles Morerod, évêque de Lausanne, Genève et Fribourg, a concélébré ses funérailles en connaissance de cause.
L’histoire paraît dans Le Matin Dimanche du 9 mai 2021. C’est la veuve du défunt prêtre qui a accepté de témoigner. Non pour heurter, mais «dans l’espoir que de bons fruits continueront d’en sortir». Le prêtre et sa compagne se sont connus il y a trente ans, lorsque lui était diacre et elle religieuse. Leur histoire d’amour, qu’elle qualifie de «contrat entre nous et le Seigneur, une espèce de miracle», va s’écrire entre «passion platonique» et «volonté de chasteté apaisée», mais toujours «comme un moyen de se rapprocher de Dieu», étaye le journal dominical romand.
Cohérence et reconnaissance
Le prêtre, condamné par un lymphome, décède en fin avril 2021. Sur son lit d’hôpital, le sexagénaire reçoit Mgr Charles Morerod, évêque de Lausanne, Genève et Fribourg (LGF), un mois auparavant et lui révèle avoir «une âme sœur» qui ne l’a jamais empêché d’accomplir son ministère. «L’abbé C. était aumônier de prison et allait dans les EMS. Je lui suis reconnaissant pour son ministère. À la fin, il m’a confié qu’être prêtre avait été la plus belle mission du monde», déclare Mgr Morerod, qui a concélébré les funérailles de son confrère. Dans son homélie, l’évêque va également évoquer la compagne comme «l’amie fidèle de cœur et de trente ans».
Quelques jours avant que le prêtre soit plongé dans un coma artificiel, il se marie civilement, révèle également Le Matin Dimanche. Le choix du couple de s’unir ne se veut pas militant, mais afin de répondre à un besoin de cohérence et de reconnaissance, et faisant écho au verset «La vérité vous rendra libre» de l’évangéliste Jean. A propos de leur relation, «beaucoup savaient, mais peu s’en offusquaient. Ce secret ne semblait pas peser sur [le prêtre], qui restait jovial», selon un fidèle. «L’annonce de ce mariage devrait être accueillie avec bienveillance, tout au moins parmi les fidèles. D’après nos informations, le pape a été mis au courant des circonstances de la mort de l’abbé C. et prie pour lui», commente encore le journal.
«Renouvelons notre enthousiasme»
«Je redis ma reconnaissance à ce prêtre pour son ministère, qui a été fort bien évoqué à ses funérailles. D’un autre côté je me tourne vers les vivants, en gardant à l’esprit la joie avec laquelle je reçois les engagements des futurs prêtres: gardons l’élan du don de nous-mêmes, avec l’aide de Dieu et notre aide mutuelle, renouvelons notre enthousiasme au gré des circonstances imprévisibles de notre existence», a expliqué l’évêque de LGF dans un communiqué envoyé aux agents pastoraux du diocèse, conscient de la sensibilité de la situation.
«Nous avons là un beau message, certes souvent incompris à la fois dans l’Église et hors de l’Église. Si quelqu’un, après un discernement, pense ne pas pouvoir y persévérer, qu’il me le dise avec cette honnêteté qui doit marquer toute notre annonce de l’Évangile», préconise Mgr Morerod, avant de conclure: «Aimer Dieu suffit pour remplir une existence. Certes l’amour de Dieu n’est pas l’apanage des célibataires, mais nous en portons un témoignage spécifique dans cette imitation du Christ». (cath.ch/lmd/gr)