(Photo:Susan/Flickr/CC BY-NC-ND 2.0)
Suisse

De la droite à la gauche, large mobilisation contre le diagnostic préimplantatoire (DPI)

Berne, 31 mars 2015 (Apic) Le Comité national «NON au Diagnostic préimplantatoire (DPI)», rassemblant une large coalition de politiciens de Suisse, de la droite à la gauche, s’est prononcé, le 31 mars 2015, contre cette méthode de «sélection des êtres humains». Une révision de la Constitution, soumise au vote populaire le 14 juin prochain, devrait permettre l’adaptation de la loi en vue d’autoriser l’examen des embryons pour déceler les anomalies chromosomiques de toutes sortes, ainsi que la congélation des embryons surnuméraires.

«Cette modification de la Constitution, prétendument inoffensive, ouvrirait grand les portes à la sélection ciblée d’êtres humains», a lancé le Comité interpartis, à l’occasion d’une conférence de presse, à Berne. La coalition, comptant des membres du Parti bourgeois-démocratique (PBD), du Parti démocrate-chrétien (PDC), du Parti évangélique (PEV), du Parti socialiste (PS), de l’Union démocratique du centre (UDC) et de l’Union démocratique fédérale (UDF) a démarré ainsi, sous la direction du PEV, sa campagne contre le DPI. Force est de constater, que sur ce sujet, la ligne de fracture ne passe pas entre la droite et la gauche, mais à l’intérieur même de la plupart des partis.

La révision de la loi sur la procréation médicalement assistée, déjà adoptée en décembre par le Parlement, ne peut entrer en vigueur que si, le 14 juin, le peuple et les cantons modifient la Constitution, rapporte le Comité dans un communiqué. La coalition refuse catégoriquement cette modification ainsi que ses conséquences.

Des êtres humains «dignes de vivre» et d’autres «indignes»?

«Nous voulons éviter que la porte soit ouverte à la sélection d’êtres humains», a expliqué Marianne Streiff, conseillère nationale bernoise. Pour la présidente du PEV, le DPI est clairement un instrument de sélection entre des êtres humains qui seraient considérés comme «dignes de vivre» et «indignes de vivre».

L’élargissement de l’article 119 de la Constitution fédérale est un pas de plus vers une médecine de la reproduction assistée sans limite, a déclaré Dominique de Buman, conseiller national PDC fribourgeois. «Lorsque le DPI est autorisé pour la recherche de maladies héréditaires et d’anomalies chromosomiques, ne reste qu’un petit pas à faire pour autoriser ‘l’enfant à la carte’ – ce qui signifie la sélection du sexe, de la couleur des cheveux et des yeux, ainsi que d’autres propriétés physiques et intellectuelles. D’autres étapes de libéralisation, comme la création de ‘bébés sauveurs’ (mis au monde dans le but d’aider médicalement un membre de la famille, ndlr.), le dons d’ovules, le don d’embryons ou les mères porteuses seraient déjà objets de discussions politiques en Suisse», a averti le démocrate-chrétien.

Des milliers d’embryons détruits?

«Cette modification de la Constitution conduit à ce que les embryons ne bénéficient presque plus de protection», a souligné Sylvia Flückiger-Bäni, conseillère nationale UDC argovienne. Elle a affirmé que des milliers d’embryons congelés resteraient en surplus, qui devraient être dégelés au plus tard après 10 ans, détruits ou utilisés par la recherche. «La vie humaine est un miracle et ne peut pas devenir un moyen de parvenir à une fin», a déclaré la politicienne.

«Le DPI ne peut pas tester en même temps tous les défauts génétiques connus. Beaucoup ne sont pas répertoriés ou ne sont reconnaissables qu’à des stades ultérieurs de développement», a relevé Christine Bulliard-Marbach, conseillère nationale PDC du canton de Fribourg. Elle a critiqué le mythe d’un monde sans souffrance préconisé par les partisans du DPI. 40% des embryons sont blessés à un tel point lors du DPI, soi-disant sans danger, que la nidation devient impossible. De plus, le DPI n’apporte rien de concret aux progrès de la médecine. Au contraire: au lieu de rechercher de nouvelles thérapies, les handicapés et malades éventuels sont simplement éliminés, a dénoncé la démocrate-chrétienne.

Ne pas stigmatiser les handicapés

«Si l’on poursuit sur cette voie, les êtres humains porteurs de handicap seront à l’avenir étiquetés comme ‘indignes de vivre’», avertit Christian Lohr, conseiller national PDC de Thurgovie. Ils seraient considérés comme indésirables, comme des risques évitables et comme des charges – avec des conséquences graves pour l’image d’eux-mêmes ainsi que pour la cohabitation avec eux. Des refus de prestations des assurances sociales et des caisses maladies pourraient en être la conséquence, affirme le politicien centriste. «Il est de la responsabilité du politique, de la société et de la loi, d’intégrer socialement et économiquement les personnes avec des handicaps – et non pas de les empêcher de vivre et de les éliminer», estime Christian Lohr. L’autorisation du DPI engendrerait une pression sociale très importante sur les futurs parents afin d’empêcher la mise au monde d’une vie porteuse de handicap, a-t-il ajouté. (apic/com/rz)

31 mars 2015 | 15:41
par Raphaël Zbinden
Temps de lecture : env. 3  min.
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