Suicide assisté: l’Eglise italienne confrontée à un dilemme
Alors que l’Italie pourrait bientôt autoriser l’euthanasie, l’Église catholique en Italie cherche sa voie dans le débat et pourrait accepter une loi «imparfaite» qui encadrerait le suicide assisté afin de «prévenir de dérives encore pires», explique à I.MEDIA le Père Renzo Pegoraro, chancelier de l’Académie pontificale pour la vie, le 10 février 2022.
Alors que le pape François vient de rappeler sa condamnation de toutes les formes de «suicide assisté», la situation de l’Eglise est délicate, explique le le Père Renzo Pegoraro. En Italie, le Parlement italien se penche en effet sur une proposition de loi sur le suicide assisté alors que plane la possibilité d’un referendum sur l’euthanasie dont l’issue inquiète l’Église. «Il y a une pression pour l’euthanasie, qui vient d’un mouvement radical».
La législation sur le sujet doit évoluer du fait d’une décision de 2019 de la Cour constitutionnelle ayant dépénalisé le suicide assisté sous certaines conditions. «Elle a ouvert la porte à cette possibilité, en admettant la pratique. Mais il manque encore des règles, des procédures, des limites», détaille le numéro 2 de l’Académie pontificale qui alerte: «Tout peut devenir l’objet d’abus». Dans ce scénario noir pour les catholiques, l’Église en Italie ne veut pas rester passive et cherche à se positionner pour espérer une meilleure voie.
Le grand chancelier résume l’alternative: «Soit on ne fait pas de loi, et l’on ne sait pas ce qu’il se passera avec la décision de la Cour; soit on fait une loi qui parvient à limiter les dérives, à renforcer les soins palliatifs, et à bloquer le processus de référendum pour l’euthanasie».
Maintenant qu’une fenêtre est ouverte, poursuit-il, l’Église veut éviter que ne s’ouvre «une grande porte». C’est pourquoi, elle voudrait pousser le Parlement à établir la meilleure loi possible qui évite une banalisation du suicide assisté.
Cette stratégie a selon lui fait ses preuves en 2004 avec le projet sur la procréation médicalement assistée. «L’Église a participé à l’élaboration de la loi actuelle qui ne reflète pas fidèlement la Doctrine de l’Église mais admet la FIV à des conditions très limitées», rappelle-t-il, estimant que l’Église avait alors évité le «chaos».
«L’Église propose une solution: les soins palliatifs«
C’est dans ce contexte italien délicat que le pape François a fait une sortie remarquée sur la fin de vie, lors de sa catéchèse du 9 février 2022. Rappelant que la mort devait être accueillie et non administrée, il a condamné les dérives inacceptables qui conduisent à tuer et toutes les formes de suicide assisté.
«Hier, le pape avait en tête ce contexte, en redisant le principe de fond», réagit le Père Pegoraro. «Il a confirmé la position morale du «non» à l’euthanasie, «non» au suicide assisté, et «non» à l’acharnement thérapeutique. C’est un «oui» fort et décisif aux soins palliatifs», souligne-t-il.
De son côté, le docteur Carlos Centeno Cortés, spécialisé dans les soins palliatifs et lui aussi membre de l’Académie pontificale pour la vie, se réjouit que le pape ait insisté sur l’importance des soins palliatifs. «Je vois depuis vingt ans que le discours de l’Église est toujours le même. Hier le pape François a parlé très clairement. Rien n’a changé», insiste le médecin espagnol, qui ne veut pas commenter la situation italienne.
Il reconnaît que l’Académie pontificale à laquelle il appartient est souvent sollicitée sur des dossiers particulièrement épineux. «Mais l’Église propose une solution: les soins palliatifs», martèle-t-il. (cath.ch/imedia/cv/mp)