«La situation des réfugiés dans les camps en Grèce est intenable»
«La situation des réfugiés dans les camps en Grèce est intenable. L’Europe doit ouvrir les yeux sur ce qui se passe sur son propre territoire et tout faire pour que ces personnes puissent vivre dans des conditions dignes», estime Wolfgang Bürgstein. Le secrétaire général de la Commission Justice et Paix de la Conférence des évêques suisses (CES) a répondu, le 26 avril 2016, aux questions de kath.ch au retour d’un bref séjour à Athènes.
Le secrétaire général de la Commission Justice et Paix de la CES a pris part à Athènes à une rencontre de deux jours du réseau international Justice et Paix sur le thème de la migration. Les représentants des divers pays ont notamment collaboré à une soupe populaire en faveur des réfugiés, le représentant de Justice et Paix Grèce étant aussi le président de Caritas-Athènes.
La soupe populaire de Caritas-Athènes distribue quelque 600 repas par jour, notamment grâce au soutien des Caritas de Suisse, d’Allemagne et d’Autriche. L’organisation très professionnelle fonctionne grâce à l’aide de nombreux bénévoles venus de divers pays.
«Voyez notre détresse»
«Beaucoup de choses passent dans la tête, lorsque l’on est confronté pour la première fois à ces cuisines d’urgence», reconnaît le secrétaire à Justice et à Paix de Suisse. «Nous avons aidé à la distribution. J’ai été surpris du professionnalisme, du calme avec lesquels ces gens travaillent. Les réfugiés eux-mêmes sont très calmes. Ils sont venus parfois de loin, parfois de camps où la nourriture est mauvaise et où ils n’ont reçu que des spaghettis froids.» Des camps que les représentants de Justice et Paix n’ont d’ailleurs pas pu visiter. L’ancien aéroport d’Athènes a été transformé en camp de réfugiés. Selon les échos qui lui sont parvenus, Wolfgang Bürgstein y décrit les conditions comme catastrophiques. Les tensions et les querelles entre les groupes de réfugiés pèsent sur l’ambiance. Les femmes sont exposées à des violences sexuelles.
Les personnes sont elles-mêmes dépassées. «J’ai toujours demandé aux réfugiés quel message ils souhaiteraient faire passer à la chancelière allemande Angela merkel ou au président de la Confédération suisse Johann Schneider-Ammann. Leur réponse à été: ‘voyez notre détresse’»
Des frontières toujours plus étanches
Les réfugiés savent qu’ils ne pourront pas venir en Europe. La première vague arrivée de Syrie était composée de gens formés de la classe moyenne. Ils avaient aussi quelques moyens financiers pour payer les passeurs et leur hébergement dans des hôtels. «Maintenant arrivent des gens plus pauvres qui se trouvaient dans des camps en Turquie et en Grèce et qui veulent partir plus loin», explique Wolfgang Bürgstein. Mais les frontières de l’Europe deviennent de plus en plus étanches. Hormis les Syriens, les autres réfugiés devraient être renvoyés en Turquie.
Le repli de l’Europe se manifeste en Grèce. Justice et Paix ne peut pas rester silencieuse face à cette situation, souligne Wolfgang Bürgstein. Il reconnaît cependant que l’attitude envers les réfugiés n’est pas la même dans les divers pays du continent. Si l’Allemagne et la Suisse ont une attitude assez ouverte, d’autres pays font le blocus.
A Athènes, les réfugiés sont comme des prisonniers dans la ville
«Il est clair que nous ne pouvons pas accueillir tout le monde. C’est la problématique de l’histoire. Plus des gens arrivent, plus les fronts politiques se durcissent.» A Athènes, les réfugiés sont comme des prisonniers dans la ville, sans perspective. «Pour l’instant, ils ont encore un grand soutien des Athéniens et des organisations internationales, mais qu’en sera-t-il dans six mois ou dans deux ans?»
Beaucoup de familles de réfugiés se trouvent à Athènes. Caritas s’efforce de leur venir en aide en priorité. Il s’agit par exemple d’offrir aux femmes des lieux où se doucher à l’écart des hommes et de s’occuper des enfants pendant ce temps. Ce sont des choses tout à fait banales. Mais dans les camps officiels, de telles tâches sont très difficiles à cause des conditions catastrophiques.
Ne pas trahir les valeurs de l’Europe
Pour le secrétaire de Justice et Paix, la situation sur place est intenable. L’Europe doit ouvrir les yeux sur ce qui se passe sur son propre territoire. La Suisse aussi doit aussi tout faire pour que ces personnes, qui sont déjà en Europe, puissent vivre dans des conditions dignes. Il ne s’agit pas seulement d’un soutien financier, mais aussi d’infrastructures qui fonctionnent selon des normes minimales et de la volonté politique de s’engager pour des valeurs communes à l’Europe.
Pour Wolfgang Bürgstein, cette visite en Grèce symbolise la complexité tragique du monde, avec d’un côté l’Acropole sous un ciel étoilé et de l’autre les camps de réfugiés et les soupes populaires. (cath.ch-apic/kath.ch/mp)