Sida: le pape François exprime la «perplexité» de l’Eglise sur le préservatif
Lors de sa traditionnelle rencontre avec les journalistes dans l’avion qui le ramenait d’Afrique, le 30 novembre 2015, le pape François a fait part de la «perplexité» de l’Eglise concernant l’usage du préservatif dans la prévention du Sida. Visiblement un peu agacé et ne souhaitant pas faire de considérations «casuistiques», le pape a laissé planer le doute dans une réponse très jésuite, préférant pointer du doigt le «problème plus grand» à ses yeux de «l’injustice en ce monde».
Voici la question posée au pape François sur l’usage du préservatif dans la prévention du Sida et sa réponse:
«Le virus du Sida ravage l’Afrique. Grâce aux soins, les malades vivent plus longtemps, mais l’épidémie continue. Seulement en Ouganda, il y a eu l’an passé 135’000 nouvelles infections du virus et c’est pire au Kenya. Le Sida est actuellement la plus grande cause de mort en Afrique. Vous avez rencontré les enfants de mères séropositives et écouté un témoignage bouleversant en Ouganda, mais vous avez dit peu de choses encore sur cette question. Nous savons que la prévention est un élément clef. Nous savons aussi que le préservatif n’est pas la seule façon d’arrêter l’épidémie, mais nous savons que c’est une part importante de la réponse. Le moment n’est-il pas venu pour l’Eglise de changer de position sur cette question et de permettre l’usage du préservatif pour éviter de nouvelles infections?»
«La question me semble trop… étroite. Il me semble aussi que c’est une question partiale. Oui, c’est l’une des méthodes, et la morale de l’Eglise se trouve, sur ce point, devant une perplexité. Est-ce le 5e ou le 6e commandement? Il faut défendre la vie… le rapport sexuel doit être ouvert à la vie. Mais ce n’est pas le problème. Le problème est plus grave.
Cette question me fait penser à ce que l’on a demandé un jour à Jésus: ›Dis-moi maître, est-il autorisé de guérir le jour du Sabbat?’ Il est obligatoire de guérir! Cette question posée ainsi pour savoir s’il est licite de guérir… mais la malnutrition, l’exploitation des personnes, le travail qui rend esclave, le manque d’eau potable, ça ce sont des problèmes! Ne nous demandons pas si on peut utiliser ce pansement ou tel autre pour guérir une petite blessure.
La grande blessure c’est l’injustice sociale, l’injustice de l’environnement, l’injustice de l’exploitation et de la malnutrition dont j’ai déjà parlé. Cela ne me plaît pas de descendre dans des réflexions aussi casuistiques lorsque des gens meurent par manque d’eau, (qu’ils meurent) de faim, (de problèmes) de logement.
Lorsque tous seront guéris, lorsqu’il n’y aura plus ces maladies tragiques provoquées par l’homme, que ce soit par injustice sociale ou pour gagner plus d’argent – il suffit de penser au trafic des armes -, lorsqu’il n’y aura plus ces problèmes, je crois que l’on pourra se poser la question: est-il licite de guérir le jour du Sabbat? Pourquoi continue-t-on à fabriquer les armes, à faire du trafic d’armes? Les guerres sont le plus grand motif de mortalité. Je dirai qu’il ne faut pas se demander s’il est licite ou illicite de guérir le jour du Sabbat, je dirai à l’humanité: ›faites justice’, et lorsque tous seront guéris, lorsqu’il n’y aura plus d’injustice en ce monde, nous pourrons parler du Sabbat». (cath.ch-apic/imedia/ami/rz)