Sénégal: musulmans et catholiques contre l'exclusion des prostituées
Des guides musulmans et catholiques sénégalais ont exhorté la société à plus de solidarité envers les prostituées. Ils se sont exprimés à l’occasion de la Journée mondiale du sida, le 1er décembre 2017.
Des guides religieux musulmans et catholiques du Sénégal ont plaidé pour une plus grande solidarité envers les femmes prostituées, plus exposées au sida. Ils s’inquiètent de leur stigmatisation par la société pour des raisons religieuses.
La communauté internationale a célébré la journée mondiale du sida qui vise à sensibiliser et à renforcer la lutte contre cette pandémie. Le Sénégal est l’un des pays d’Afrique qui a le plus faible taux de prévalence du sida. Il est passé de 0,7% en 2016, à 0,5%. Chez les prostituées, il est tombé aussi de 18 à 6,6 %.
Prostituées rejetées par la société
Appelées aussi professionnelles du sexe (PS), ces prostituées sont rejetées par leur entourage et par le personnel sanitaire, encouragé par le discours de certains religieux radicaux, qui préconisent l’éloignement de cette catégorie de personnes, a rapporté le quotidien sénégalais Sud quotidien, dans une enquête publiée à l’occasion de la journée mondiale contre le sida.
«La lutte contre le sida revient à un vœu pieux quand on s’évertue à rejeter ces personnes [les prostituées] en les privant d’une prise en charge médicale», ont déploré des religieux musulmans et catholiques. Ils ont estimé que même si «aucune religion ne cautionne la prostitution, elles ne disent pas non plus qu’il faut les bannir. Elles invitent plutôt à leur tendre la main pour les amener à se repentir».
Comprendre plutôt que juger
«Il faut comprendre que la prostitution est d’abord un problème de pauvreté», a dit l’Iman Pape Kane de la grande mosquée des HLM, quartier populaire de Dakar-ville. Il a regretté que les gens ne cherchent pas à comprendre cette raison avant de juger les PS. «Le religieux doit connaître les problèmes de sa communauté pour pouvoir y intervenir».
«Amener les pratiquants de ce métier à changer, c’est d’abord les soutenir pour qu’elles puissent vivre décemment», a-t-il poursuivi. «A partir de là, a-t-il ajouté, on peut discuter du changement de comportement. Si la solidarité est de mise dans la société, chacun apporte quelque chose pour aider les moins nantis, on peut ensemble faire reculer la prostitution et faire baisser le taux de prévalence du VIH sida chez ces personnes clés».
«La prostitution n’est pas un métier qui dure. L’imam est d’abord un serviteur et doit toujours aller vers ceux et celles qui ont vraiment besoin de lui, dans le secret ou au su de tout le monde», a indiqué enfin l’imam Kane.
Au nom de l’Eglise catholique, l’abbé Denis Ndione du diocèse de Thiès, au nord de Dakar, a précisé que celle-ci aussi ne cautionne pas la prostitution qui renvoie à l’infidélité. «La fin ne justifie pas les moyens dans la religion catholique», a-t-il dit, faisant allusion à la pauvreté invoquée par certaines femmes pour se livrer à la prostitution.
Selon l’abbé Ndionne, l’Eglise du Sénégal est vraiment impliquée dans la lutte contre le sida chez les prostituées, à travers divers programmes. «Toutes les actions de l’Eglise qui sont orientées vers ces personnes sont pour leur offrir une seconde chance dans la vie», a-t-il fait remarquer. (cath.ch/ibc/bh)