Semaine pour l'unité des chrétiens: des méditations venues du Liban
La traditionnelle Semaine de prière pour l’unité des chrétiens commence le 18 janvier 2022 avec pour thème une parole des Rois mages : «Nous avons vu son astre à l’Orient et nous sommes venus lui rendre hommage». Du Liban, le Père Gabriel Hachem, de l’Église grecque melkite catholique d’Antioche, a participé durant plus de deux ans à l’élaboration des textes de méditation. Il se confie à I.MEDIA sur les difficultés rencontrées par la petite équipe orientale qui a travaillé ainsi que sur le choix de la thématique.
C’est à l’automne 2019 que la conception de la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens 2022 a débuté. Le Père Gabriel Hachem, alors directeur du département de théologie et des relations œcuméniques au Conseil des Églises du Moyen-Orient (CEMO), vient de recevoir la proposition du cardinal Kurt Koch, président du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens, de préparer cette semaine. Pour l’édition 2022, il est prévu de confier au CEMO, dont le siège est à Beyrouth (Liban), l’élaboration des textes.
Nombreuses difficultés
De nombreuses difficultés vont venir freiner le bon déroulement de la préparation. En octobre 2019, le Liban vit un soulèvement populaire et les conditions sécuritaires sont précaires. Puis arrivent les contraintes sanitaires liées à la crise du Covid-19. La majeure partie des réunions doit se tenir en ligne, dans un pays où la connexion internet est plus que capricieuse.
«Toutes ces difficultés représentent en fait la condition de notre vie en Orient», confie le Père Gabriel Hachem. «Elle nous oblige à trouver l’ingéniosité nécessaire pour assurer le témoignage à la Lumière dans la médiocrité et l’obscurité de la situation politique, sociale, économique et sanitaire», explique-t-il.
Ne pas s’apitoyer sur le sort des chrétiens d’Orient
Un groupe de travail œcuménique se forme: huit personnes représentant les quatre familles du CEMO – grecque orthodoxe, syro-orthodoxe, évangélique et catholique. «Les conditions ne s’étant pas améliorées, nous nous sommes contentés de ce petit comité afin de sauver le projet», poursuit le prêtre grec-melkite. Impossible par ailleurs d’aller à Rome pour échanger physiquement. La grande partie du travail se fait en ligne, avec cette connexion qui laisse à désirer. «La réalisation de ce projet a été un exploit, un miracle», résume le prêtre qui enseigne à l’Université Saint-Esprit de Kaslik.
Devant les aléas, le groupe ne baisse pas les bras et ne souhaite pas s’apitoyer. «On entend souvent dire que les chrétiens d’Orient sont en voie de disparition, qu’ils sont persécutés, maltraités… Ce discours ne nous intéresse pas. Ce qui nous importe, c’est l’espérance qui jaillit de la Lumière du Christ. C’est cela qui nous a guidés du début à la fin du projet».
Ainsi, le comité établit deux axes dans le processus d’élaboration des textes de la semaine 2022. Il s’agit d’abord d’offrir un signe d’espérance aux chrétiens du Moyen-Orient allant «au-delà des lamentations et de l’ambiance de désespoir qui y règne». Ensuite, les membres souhaitent proposer un message oriental à l’ensemble des Églises du monde, en insistant sur le fait que le Christ s’est incarné dans cette région pour éclairer toutes les nations.
Après réflexion, c’est la visite et l’adoration des rois Mages qui est retenue à l’unanimité, «pour son originalité et sa perspicacité œcuménique», confie le Père Gabriel Hachem. Ce thème rejoint la liturgie orientale, «cœur de la vie chrétienne au Moyen-Orient», où l’adoration du Dieu trinitaire devient le ciment de l’unité de la diversité ecclésiale et ethnique. La thématique des Rois mages contient aussi l’idée d’un Salut destiné à tous les hommes, «le fait que la Lumière du Christ brille sur tout le monde», insiste le prêtre, qui voit donc dans ce choix une forte dimension œcuménique mais aussi interreligieuse.
Une expérience synodale
À force de réunions en ligne, les membres du comité avancent sur le contenu de la célébration œcuménique et des médiations de chaque jour de la semaine de prière. Mais une autre difficulté apparaît. «Nous avons écrit le texte en arabe, pour qu’il exprime le génie de nos Églises et de notre culture», explique le Père Hachem, rédacteur en chef de la revue œcuménique Proche-Orient chrétien. Mais en traduisant les textes en anglais, une grande partie de leur richesse et de leur originalité est édulcorée.
Ainsi, lorsque le bureau international qui coordonne la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens reçoit les texte en anglais, ses membres ont du mal à «entrer dans l’optique orientale, sans doute plus symbolique », rapporte le prêtre. D’autant plus qu’aucun chrétien du Moyen-Orient ne fait partie de ce bureau international. C’est après de multiples réunions et d’échanges que le processus aboutit.
Finalement, le Père Hachem considère avoir vécu une véritable expérience synodale, en partant d’une feuille blanche, «sans projet préétabli qu’on voudrait confirmer». C’est ainsi que l’image des Mages est advenue, «une histoire qui reflète bien notre spiritualité orientale et ce message plein d’espérance dont le monde et le Moyen-Orient ont tant besoin». (cath.ch/imedia/hl/mp)